Comment 30 ans après, Tchernobyl est devenu une réserve naturelle pour (presque) tous les animaux<!-- --> | Atlantico.fr
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Jim Smith a répertorié une croissance importante de sangliers, de loups, de chevreuils et de wapiti.
Jim Smith a répertorié une croissance importante de sangliers, de loups, de chevreuils et de wapiti.
©Pixabay

L'impact du nucléaire

Selon le professeur d'université Tim Smith, la croissance des populations de mammifères "ne signifie pas que les radiations sont bonnes pour la faune" mais que "les effets de l'habitation humaine, y compris de la chasse, de l'agriculture et de l'exploitation forestière, sont bien pires".

Le 26 avril 1986 à 1h23, se produisait l'une des catastrophes nucléaires les plus importantes de l'histoire, celle de Tchernobyl en Ukraine, à 96 km au nord de Kiev. Cet incident provoqué par la fusion du réacteur n°4 et survenu dans la centrale nucléaire V.I. Lénine, a permis la propagation dans l'atmosphère d'un énorme nuage de fumée de l'équivalent radioactif de 400 fois la bombe d'Hiroshima, tuant près de 4000 personnes selon l'OMS et favorisant le développement d'un cancer chez 200 000 personnes selon Greenpeace. Une zone de sécurité d'un rayon de 30 km avait été délimitée autour de la centrale et les habitants évacués. En 2010, la population de Tchernobyl comptait 500 habitants, tous restés volontairement. Aujourd'hui, 30 ans après la catastrophe, elle serait estimée à 625.  

L'état de contamination en 1996 après la catastrophe nucléaire

Crédit photo : Wikipédia

Tchernobyl : le paradis pour les grands mammifères

Si l'accès aux humains est interdit, il semblerait que les animaux eux, y trouvent leur compte. Une étude menée par Jim Smith, professeur en sciences de l'environnement à l'université de Portsmouth (Angleterre) et publiée dans la revue Current Biology, a recensé une véritable faune sauvage où les grands mammifères comme les sangliers et les loups y prospèrent depuis l'incident. Selon lui, cela "ne signifie pas que les radiations sont bonnes pour la faune" mais que "les effets de l'habitation humaine, y compris de la chasse, l'agriculture et l'exploitation forestière, sont bien pires". Pour arriver à ce résultat, Jim Smith et son équipe ont étudié les populations de mammifères vivant dans une zone de 4 200 kilomètres carrés autour de Tchernobyl et recensé leurs empruntes dans la neige, pour dénombrer le nombre d'espèces différentes. "Les résultats démontrent pour la première fois, qu'outre les effets potentiels des radiations sur les animaux, la zone d'exclusion de Tchernobyl permet à une communauté abondante de mammifères, de survivre après trois décennies d'exposition chronique aux radiations".

Crédit photo : Valeriy Yurko

Jim Smith a répertorié une croissance importante de sangliers, de loups, de chevreuils et de wapiti, un mammifère herbivore de la famille des cervidés (rennes, daims, cerfs…). Si la santé de ces animaux avait été affectée par la catastrophe nucléaire, elle se serait rapidement améliorée. Le nombre d'élans, de cerfs et de sangliers aurait par ailleurs considérablement augmenté entre 1987 et 1997. "Le nombre d'animaux que nous avons recensé dans Tchernobyl est similaire aux populations dans les réserves de nature intacte," a expliqué le professeur Smith, qui met l'accent sur l'excellente conservation de la faune sauvage lorsque l'homme n'est pas dans les parages. L'absence de chasseurs a par exemple favorisé l'expansion de la population de loups : jusqu'à 7 fois plus élevée que dans les réserves naturelles de même taille. Selon Jim Beasley de l'université de Georgie, co-auteur de l'étude, "ces données uniques montrant un large éventail d'animaux qui prospèrent à quelques kilomètres d'un accident nucléaire, illustrent la résistance des populations sauvages lorsqu'elles sont libérées de la pression des habitations humaines".

Crédit photo : Valeriy Yurko

Pour Tim Smith, "la zone de Tchernobyl est une zone d'expérience fascinante car elle nous permet d'étudier les transferts et les effets de la radioactivité sur le long terme. Il y a eu beaucoup d'expériences de laboratoire sur les effets des radiations sur les animaux et les plantes, mais elles sont généralement à court terme. Tchernobyl nous permet d'étudier les effets sur les animaux après des années d'exposition aux radiations". Mais qu'en est-il pour les autres espèces animales ?

Tchernobyl : l'enfer pour les volatiles

Si les mammifères ont trouvé refuge à Tchernobyl, les invertébrés et les volatiles qui se nourrissent de ces derniers ont été très impactés par les radiations.  Pour Tim Mousseau, professeur à l'Université de Caroline du Sud et spécialiste de l'évolution des volatiles dans cette zone, cette étude "s'applique aux mammifères qui sont soumis à la pression de la chasse plutôt qu'à la grande majorité des animaux (oiseaux, petits mammifères et insectes) qui ne sont pas influencés par la présence d'habitations humaines". Comme le rapporte la BBC, Tim Mousseau estime que cette étude est une "initiative très positive pour la recherche sur les impacts potentiels sur la santé et l'environnement des accidents nucléaires", mais ne démontre en aucun cas, que "les populations d'animaux de Tchernobyl atteignent les niveaux de croissance observés dans d'autres régions où ils sont protégés de la prédation et de la chasse".

Comme le souligne Slate, pour Anders Møller du Centre national de la recherche scientifique, il serait plus pertinent de réaliser une comparaison à l'échelle européenne.  "Les grands mammifères ont augmenté au cours des dernières décennies partout en Europe, a-t-il expliqué. Donc Tchernobyl n’est pas différent. La question intéressante serait de savoir si l'augmentation des mammifères à Tchernobyl est plus grande qu’en Allemagne, en France ou en Scandinavie". Si les avis divergent, Tim Smith estime que les recherches effectuées à Tchernobyl ont prouvé que les radiations n'étaient "pas aussi nocives que beaucoup de gens le pensent". Selon lui, il s'agit de "la première étude à large échelle qui prouve à quel point [la vie animale] est résistante". 

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