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Ce que la présence de Beyoncé à l’investiture d’Obama révèle du rapport des Américains à la politique
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800 000 individus sont venus acclamer lundi Barack Obama à Washington pour sa seconde cérémonie d’investiture organisée sur les marches du Capitole et assister ensuite à la "parade" organisée dans la foulée. Les Américains sont de grands enfants, consommateurs d’émotions et dont les transports revêtent un aspect éminemment fédérateur.

Jacques Charles-Gaffiot

Jacques Charles-Gaffiot

Jacques Charles-Gaffiot est l'auteur de Trônes en majesté, l’Autorité et son symbole (Édition du Cerf), et commissaire de l'exposition Trésors du Saint-Sépulcre. Présents des cours royales européennes qui fut présentée au château de Versailles jusqu’au 14 juillet 2013.

 

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Tout en s’arqueboutant sur la continuité du deuxième amendement de sa constitution garantissant à tout citoyen américain le droit de porter des armes, les Etats-Unis d’Amérique ont aussi inventé Disneyland et la mode des parcs d’attraction exportée sur les continents les plus riches.

Chaque ressortissant s’accommode facilement d’une pareille contradiction persuadé de l’excellence des vertus prônées par l’Oncle Sam comme du bien fondé de sa domination mondiale étendue sans partage.

Ce sont donc 340 000 individus (si le dénombrement en avait été confié au préfet de police de Paris) qui sont venus acclamer hier Barack Obama à Washington pour sa seconde et dernière cérémonie d’investiture organisée sur les marches du Capitole et assister ensuite à la "parade" organisée dans la foulée, comme chez Blanche-Neige ou chez Cendrillon.

Tout avait été prévu pour marquer la solennité de la circonstance : une débauche de drapeaux tricolores, de fanfares, de fanions donnant à cette journée du 21 janvier une allure de gigantesque superbowl si majorettes et pompom girls avaient été de la partie !

Mais le moment du spectacle le plus attendu du public et sans doute plus encore des médias fut l’instant où la chanteuse de R’n’B, amie du couple présidentiel, Beyoncé Knowles, interpréta l’hymne national suivi d’une ovation générale dont l’adresse incertaine (envers l’hymne ou envers l’interprète ?) laisse tout de même songeur.

Les Américains se révèlent être de grands enfants, consommateurs d’émotions et dont les transports pourraient, une fois tous les quatre ans, revêtir un aspect éminemment fédérateur.

Cette ivresse dans laquelle subjectivisme, émotivité, affectivité devraient mettre en branle la terre entière muette d’admiration, dissimule une fraternité factice inversement proportionnelle au consumérisme qu’elle occasionne. L’acteur principal de ce show, pour le coup bien à l’américaine, entrainé dans le mouvement d’une tradition rendue d’autant plus coercitive qu’elle est récente, peut difficilement s’en rendre compte. De l’autre côté de l’Atlantique, ce spectacle apparaît puérile tant les démonstrations fusionnelles semblent à la fois conventionnelles et passagères.

Que l’on considère tout d’abord l’interprétation donnée par Beyoncé ou ses devancières à l’hymne national américain. L’inspiration du moment, l’état d’âme de la chanteuse, ses impressions etc. déterminent désormais le rythme de la musique, le balancement des paroles. L’expérience conduite autrefois par Valéry Giscard d’Estaing pour modifier légèrement l’orchestration de la Marseillaise a fait long feu et avait été particulièrement critiquée. Il convient mieux, en effet, de donner un caractère stable à un symbole pour lui conférer une portée intemporelle et universelle.

Remarquons également les inévitables marques d’affection échangées entre les membres de la famille Obama ou entre divers participants. Ces conventionnelles embrassades se limitent à d’impersonnels tapotements sur le dos, sans doute pour éviter tout procès en harcèlement. Remarquons encore, phénomène plus récent, la désignation d’une personne noyée dans la foule par un index pointé en sa direction. Cette attitude qui se voudrait familière et spontanée est en passe de devenir un tic de comportement. Il faut souhaiter que cette innovation, encore sévèrement condamnée dans le savoir-vivre observé sur le vieux continent, ne soit jamais singée par les puissants qui nous gouvernent, tant cette marque de salutation se situe à l’opposé de l’authenticité d’une rencontre ou d’un vrai contact.

L’aspect festif et émotionnel de la cérémonie d’hier a sans doute fait larmoyer sur place bien des assistants ainsi que nombre de spectateurs assis dans leurs chaumières, les pieds sur la table devant un verre de whisky. De la sorte, insidieusement une nouvelle dose de soporifique a été administrée. Elle risque une fois encore de laisser ces grands enfants aux prises avec leurs démons et imaginer le monde à l’aune de leurs plus veules sentiments et de la satisfaction de leurs seuls appétits.

Les Etats-Unis d’Amérique ont pourtant la capacité de mieux faire !

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