Ce bourdonnement venu du début de l’univers écouté attentivement par les scientifiques pour comprendre la matière noire<!-- --> | Atlantico.fr
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Le télescope spatial Planck a pu capter les échos des ondes de l'univers primitif.
Le télescope spatial Planck a pu capter les échos des ondes de l'univers primitif.
©YE AUNG THU / AFP

BAO

Des scientifiques sont parvenus à étudier et analyser les échos d'ondes sonores émises lors de la naissance de l'univers.

Olivier Sanguy

Olivier Sanguy

Olivier Sanguy est spécialiste de l’astronautique et rédacteur en chef du site d’actualités spatiales de la Cité de l’espace à Toulouse.

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Atlantico : Au cours des premières centaines de milliers d’années qui ont suivi la naissance de notre Univers, des ondes sonores (BAO) se sont propagées. Le télescope spatial Planck a pu capter les échos des BAO de l'Univers primitif et les scientifiques ont pu les traduire en fréquences audibles. En quoi consiste ce bourdonnement primitif ? Quelles sont les spécificités de ces ondes sonores (BAO) ?

Olivier Sanguy : Il est important de noter, comme vous le faites, que ces «ondes sonores» ont été traduites en fréquences audibles pour les vulgariser auprès du grand public. Car il s’agit bien entendu (si je puis dire…) d’un phénomène que personne ne pourrait écouter ! Ces ondes sont dénommées par l’acronyme BAO qui signifie en anglais Baryon Acoustic Oscillations, soit oscillations acoustiques des baryons. Pour les comprendre, revenons aux premiers instants de l’univers lorsqu’il n’est qu’un plasma primordial excessivement chaud après le Big Bang. Dans cette soupe de particules, pour simplifier, deux forces majeures s’opposent : la gravité, via la matière noire, crée des «puits» qui attirent le plasma alors que ce dernier est si chaud qu’il induit une force contraire. De la «bagarre» entre ces deux forces résulte une oscillation acoustique. Mais attention, la longueur d’onde de celle-ci est gigantesque puisqu’elle mesure 450 000 années-lumière ! À titre de comparaison, la longueur d’onde de la classique note la à 440 Hz est de 78 cm. Aucune chance d’entendre cette BAO, outre le fait que l’univers primitif de l’époque est invivable.

Les scientifiques étudient ces sons avec l’espoir d’acquérir de nouvelles connaissances sur l’énergie noire. Quels sont les principaux enseignements de ce son sur notre connaissance de l’énergie noire, sur la matière noire ?

Ces oscillations répondent à des principes physiques connus, comme celui de la vitesse du son dans un plasma. De plus, on pense qu’elles n’ont que peu changé après l’époque de la recombinaison, soit 380 000 ans après le Big Bang, sauf en raison de la gravitation et de l’expansion de l’univers. L’idée des scientifiques est donc d’utiliser ces ondes comme une sorte de repère, de règle, qui fixera des limites à la quantité d’énergie noire. N’oublions pas que l’énergie noire ou énergie sombre (deux appellations pour le même phénomène) est une force qui accélère l’expansion de l’univers. Il s’agit d’une découverte fondamentale réalisée grâce à des mesures accomplies avec le télescope spatial Hubble. Elle a d’ailleurs été couronnée par un prix Nobel en 2011 attribué aux astrophysiciens Saul Perlmutter, Brian Schmidt et Adam Riess. Avec les BAO, on dispose surtout d’un outil indirect pour mieux comprendre l’énergie noire ou en tout cas certaines de ces limites. N’oublions pas que si on constate très bien les effets de cette énergie sombre, à savoir l’accélération de l’expansion de l’univers, en revanche la nature de cette énergie reste un mystère. Et ce n’est pas secondaire, car le bilan énergétique de l’univers c’est, en arrondissant, 5% de matière ordinaire, 25% de matière noire et… 70% d’énergie noire !

Comment les scientifiques parviennent à étudier et analyser ces ondes sonores qui ont laissé une empreinte sur la répartition de la matière autour de l’Univers ? Quelles sont les perspectives de leurs études ?

On les étudie justement, car elles ont causé une «empreinte». Ces oscillations ont en effet laissé une marque dans la distribution de matière dans l’univers et on les observe tel un écho, dans le fond diffus cosmologique (ou CMB en anglais pour Cosmic Microwave Background). C’est un rayonnement émis voir 380 000 ans et que l’expansion de l’univers a décalé dans le domaine des micro-ondes. La cartographie la plus précise de ce rayonnement découvert en 1964 a été réalisée par l’observatoire spatial Planck de l’Agence Spatiale Européenne lancé par Ariane 5 en 2009. Depuis 2013, la mission de Planck est finie, mais l’analyse des données de son catalogue continue. On en voit ici une des applications concrètes de recherche.

En quoi les travaux des scientifiques pourraient permettre d’acquérir de nouvelles connaissances, notamment sur l'origine de l’univers ?

On est ici dans un domaine pointu de la cosmologie. Les modèles théoriques doivent être régulièrement confrontés aux réalités des observations et ensuite affinés si besoin. Avec cette démarche où les oscillations fournissent un repère capable de borner la quantité d’énergie sombre, il y aura peut-être besoin d’affiner le modèle standard et ainsi d’encore mieux comprendre comment l’univers est devenu ce qu’il est.

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