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Bonne nouvelle...ou pas ! Après quatre échecs, la France va-t-elle enfin décrocher l'organisation des JO pour 2024 ?
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Bonnes feuilles

Pascal Boniface décrypte l'histoire du mouvement, entre boycott, polémiques et médiatisation. Il évoque la compétition entre nations, l'affirmation des identités nationales, mais aussi les événements dramatiques et les espoirs portés par l'olympisme. Il nous donne également de nombreuses clés pour repenser les JO, dans leur approche politique et géopolitique. Extrait de "JO politiques", de Pascal Boniface, aux éditions Eyrolles 2/2

Pascal Boniface

Pascal Boniface

Pascal Boniface est directeur de l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) et enseignant à l'Institut d'études européennes de l'université de Paris VIII. Il est l'auteur du livre JO politiques (éditions Eyrolles, 2016). 

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La France reste sur quatre échecs au cours de ce siècle dans les candidatures à l’organisation de Jeux olympiques : Lille 2004, les Jeux d’été Paris 2008 et 2012 et les Jeux d’hiver d’Annecy 2022. Il ne faut pourtant pas en tirer la conclusion que la France ne peut pas obtenir de victoire dans une candidature à l’organisation de compétitions sportives internationales de première importance.

Elle a par exemple organisé les Mondiaux d’athlétisme en 2003, la Coupe du monde de rugby en 2007, les Mondiaux d’équitation et l’Euro de basket en 2015, et accueillera prochainement l’Euro de football 2016, les Mondiaux de handball en 2017 et la Ryder Cup en 2018. Les candidatures françaises savent donc être gagnantes.

Après avoir longtemps hésité, et surtout après avoir tiré les leçons des échecs passés, la France a décidé de tenter une nouvelle fois de candidater, sous l’impulsion du mouvement sportif. Pour ce qui est des JO de 2008, la candidature de Paris n’avait aucune chance de l’emporter face à celle de Pékin. Le Comité international olympique ne pouvait pas infliger au pays le plus peuplé du monde, qui s’était réinvesti dans le mouvement olympique depuis déjà quelque temps, un second refus après celui de 2000. Par ailleurs, la position en flèche de la lutte antidopage de la France en 2001 lui a probablement coûté des appuis.

C’est désormais plutôt un élément qui joue en sa faveur. La candidature d’Annecy a, quant à elle, été un imbroglio politique qui ne pouvait que conduire au désastre. Finalement, le véritable traumatisme vient de l’échec de Paris 2012, candidature perdue à très peu de voix, alors que la France était sûre de sa victoire.

Il n’est pas certain que cette nouvelle candidature pour l’organisation des JO 2024 l’emporte, mais les chances de victoire de Paris sont raisonnables. Ne pas présenter de candidature par peur de l’échec aurait constitué un message particulièrement négatif envoyé à l’ensemble du monde. Cela aurait donné l’image d’une France qui doute, qui a peur d’elle-même et qui estime ne pas être en mesure d’être compétitive au niveau international. Il est donc indispensable de présenter une candidature qui aura par ailleurs un effet mobilisateur et fédérateur, et fournira un souffle d’enthousiasme collectif dont le pays a bien besoin.

Les Français ont appris de leurs échecs et les leçons de 2012 ont été retenues. Faire valoir que la France est le pays de Pierre de Coubertin ou qu’elle n’a pas reçu les Jeux d’été depuis 1924 ne sont pas des arguments de nature à lui donner un droit automatique à les organiser pour 2024.

Contrairement à 2012, c’est désormais le mouvement sportif qui est à la tête de cette nouvelle candidature et non pas les responsables politiques. En accord avec Denis Masseglia, le président du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), la candidature est portée par le couple formé par Bernard Lapasset, un dirigeant sportif mondialement respecté, tout à fait à l’aise en anglais et qui s’y connaît en stratégie d’influence (il a notamment réussi à faire inscrire le rugby à sept comme discipline olympique à Rio), et par Tony Estanguet, triple médaillé d’or dans trois Jeux Olympiques différents et tout nouveau membre du CIO.

Laurent Fabius a par ailleurs innové en créant, en janvier 2014, le poste d’ambassadeur pour le Sport. Après Jean Lévy et Antoine Anfré, c’est Philippe Vinogradoff qui occupe le poste et est chargé de coordonner l’action du ministère des Affaires étrangères et du Développement international dans le domaine de l’influence sportive. Le sport est (enfin) reconnu officiellement comme un facteur du soft power.

Symboliquement, la première annonce de la candidature de Paris a été faite lors de la journée Olympique en juin 2015, en présence d’un parterre impressionnant de champions, toutes disciplines confondues. Le monde du sport semble donc particulièrement investi et est mis au premier plan. L’autre membre français du CIO, Guy Drut, est très mobilisé, alors que Jean-Claude Killy ne l’était pas ou ne l’avait pas été pour la candidature de 2012.

Les responsables politiques – maire de Paris, président de la République, ministres, président de région, etc. – soutiennent cette candidature, sans pour autant être placés au premier plan. C’est la meilleure stratégie à adopter : les sportifs portent le projet tout en ayant la garantie d’un soutien des autorités politiques.

Mais pour espérer une candidature française crédible en 2024, selon la règle implicite de rotation des continents, l’Europe ne devait pas accueillir les JO de 2020. En effet, après l’Asie en 2008 (Pékin), l’Europe en 2012 (Londres), l’Amérique latine en 2016 (Rio de Janeiro), cinq villes se disputaient l’attribution des JO d’été de 2020 : Istanbul, Tokyo, Bakou, Doha et Madrid. Le choix de Tokyo a été particulièrement bien accueilli, car il laisse la porte ouverte à un choix européen pour 2024.

Boston était la ville choisie par le Comité olympique américain. Cependant, la population de Boston est plus que réticente à recevoir ces JO 2024 et le soutien interne n’a cessé de s’amenuiser au fil des semaines. Un mouvement « No Boston Olympics » a même été créé et ne cesse de se renforcer, ce qui n’est pas bien vu par le CIO. À l’été 2015, Boston renonçait et désignait Los Angeles comme ville candidate. Son dossier est sérieux, les Américains se mobilisent. Mais l’application extraterritoriale de la justice américaine dans les affaires sportives, notamment celle du « FIFA gate », est loin de conduire les membres du CIO à être accommodants, et a certainement dû en agacer beaucoup. Rome et Budapest sont également candidates. Il est certain que les élections présidentielles de 2017, qui se dérouleront quatre mois avant la décision du CIO, auront un impact non négligeable. Si les discours de repli sur soi, de rejet des étrangers et de stigmatisation des musulmans font l’arrière-plan majeur de la campagne électorale, et que les candidats surfant sur cette vague font un bon score, cela aura un impact extrêmement négatif sur la candidature française. On ne peut plaider pour le rejet de l’autre et vouloir être l’hôte du monde

Extrait de JO politiques, de Pascal Boniface, publié aux éditions EyrollesPour acheter ce livre, cliquez ici

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