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Besoin de reconnaissance ? Comment se manifeste la peur de ne pas être à la hauteur
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Bonnes feuilles

Vous mourrez d'envie d'être reconnu et, dans le même temps, vous n'osez pas vous mettre en avant. Depuis des années, vous vous débattes dans ce paradoxe. Le sentiment d'être "illégitime" vous le connaissez bien et vous rêvez d'en sortir. Mais peut-on jamais s'en débarrasser ? Dans son livre "Besoin de reconnaissance", Richard Robert vous donne quelques clés. Extraits (1/2).

Richard Robert

Richard Robert

Richard Robert est directeur d'une revue internationale. A vingt-huit ans, il claque la porte de l'enseignement supérieur et passe par le journalisme, le syndicalisme, le monde associatif, le conseil et le coaching. Son livre "Besoin de reconnaissance ?" condense 20 ans d'observations au contact les milieux les plus divers.

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Le sentiment d’être illégitime ? Vous le connaissez bien. Il vous surprend au restaurant, quand le serveur est mieux habillé que vous. Il vous rattrape au travail, quand le chef oublie de vous dire bonjour. On vous le renvoie en famille, où de toute façon, quoi que vous fassiez, tout est déjà joué depuis toujours.

Ce n’est pas que le monde entier vous regarde de haut. Non, c’est quelque chose de plus subtil, de plus intérieur : une certaine façon d’accepter, d’avance, les jugements négatifs qu’on pourrait porter sur vous. Vous avez parfois la vague impression de ne pas être tout à fait à votre place. Et ce sentiment se double d’un embarras presque inavouable : la crainte que quelqu’un s’en rende compte.

Tout au fond de vous, il y a cette zone trouble où se mêlent la honte, une timidité enfantine, une pointe d’angoisse, aussi. Vous avez fini, comme tout le monde, par vous débrouiller, plutôt pas malen y repensant. Vous avez des amis, un travail, un couple, toutes les cases sont remplies. Et si elles ne le sont pas en ce moment, elles l’ont été à un moment ou à un autre. Mais à l’arrière-plan, il y a cette petite voix qui se demande si vous êtes vraiment, comment dire, à la hauteur. À la hauteur de qui, de quoi ? Vous ne savez pas trop. Et vous préférez ne pas trop vous y attarder. Mais il y a ce bruit de fond – un doute, en sourdine, qui vous taraude. Quelque chose comme le sentiment d’une imposture. Vous vous débrouillez, oui, mais ce n’était pas évident au départ, et il vous arrive de penser que c’est un peu par hasard si tout va
àpeu près bien. Sans jamais parvenir complètement à vous défaire de ce doute : et si tout se défaisait ?

La plupart du temps, vous n’y pensez pas. C’est comme l’écho d’un écho. Mais il revient sans crier gare, au revers d’un mot dur que quelqu’un a laissé échapper. Étonnante, cette capacité de certains mots à traverser vos barrières, à vous faire soudain sentir tout petit, toute petite. Comme si les autres, soudain lucides, vous avaient percé à jour. Comme s’ils vous remettaient brutalement à votre place. Vous savez parfaitement que c’est abusif, injuste. Pourquoi alors êtes-vous dans vos petits souliers ? Parce qu’avec un instinct infaillible, ils ont visé juste. Sans même savoir, peut-être, quelle corde ils faisaient vibrer. Il est d’ailleurs probable qu’ils ne voient pas à quelleprofondeur ils vous ont atteint. Ils ne connaissent pas votre histoire. Mais ils ont du flair.

Parfois, un mot injuste passe sur vous comme le vent. D’autres fois non, et vous ne savez pas pourquoi. Comment se fait-il que vous soyez touché si profon- dément ? Si une parole un peu dure suffit à déclencher un petit cataclysme intérieur, c’est qu’elle réveille tout un monde de craintes et d’incertitudes. Un monde souterrain que vous aviez patiemment stabilisé, sur lequel vous étiez arrivé à bâtir quelque chose, et qui se met à vaciller, comme agité par un tremblement de terre. Le sol se dérobe sous vos pas. Vous vous sentez, physiquement, chanceler. Ce vertige, cette douleur au creux du ventre, ce sentiment soudain d’être perdu, c’est une cicatrice qu’on ouvre et dans laquelle on tisonne. Ça brûle.

Les larmes ne sont pas loin. C’est un chagrin d’enfant qui vous surprend et vous laisse sans défense. C’est une enfance qu’on relance en vous. Comme si toute une vie patiemment édifiée chance- lait sur ses bases, menaçant de tout renvoyer au début. Confirmant cette angoisse profonde, presque toujours tue et d’autant plus lancinante : que tout ce qui vous est arrivé de bien n’était au fond qu’une erreur.
Bien sûr, au bout de quelques secondes ou de quelques jours, vous repartez. En bon petit soldat, pas du genre à vous apitoyer sur vous-même. Mais, demain ou dans un an, cela reviendra. Ce sentiment d’être illégitime, personne n’y échappe. Mais nous le savons bien, certains sont plus égaux que d’autres, comme disaient les cochons de George Orwell.

Extraits du livre "Besoin de reconnaissance ?" de Richard Robert publié aux Editions Michalon

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