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Attentats de 1995 : quand Claude Guéant subissait les foudres du président Chirac
©Reuters

Bonnes feuilles

Claude Guéant a côtoyé, quarante années durant, ministres, patrons, artistes et chefs d’État. Il a fait, comme il dit, "partie du cercle des puissants", sans cesser d’aller à la rencontre des "Français ordinaires". Une vie de travail et de dévouement riche de rencontres, mais qui lui a valu aussi la rancune et la calomnie. Extrait de "Quelques vérités à vous dire" de Claude Guéant, aux Editions de l'Archipel (1/2).

Claude Guéant

Claude Guéant

Claude Guéant est un haut fonctionnaire et homme politique français. Il a été secrétaire général de la présidence de la République française, puis ministre de l'Intérieur, de l'Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l'Immigration.

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Bien avant la menace terroriste actuelle, la France avait déjà été victime d’une vague d’attentats en 1995. Une période parfois oubliée. Ces attentats répondaient à un schéma relativement proche de ce que l’on connaît aujourd’hui : un projet conçu à l’étranger, des émissaires venus d’Algérie pour organiser sa mise en œuvre, de multiples ramifications internationales, des participants que rien ne semblait destiner à de telles actions. Je dois le dire : il s’agit de la pire crise que j’aie eu à gérer comme directeur général de la police. Au total, nous avons connu huit attentats échelonnés entre le 25 juillet et le 17 octobre 1995. Durant trois mois, la France a vécu dans la hantise d’une nouvelle bombe qui explose dans un lieu public. Les Français réclamaient de plus en plus impatiemment que les pouvoirs publics mettent un terme à cette série noire. Les responsables politiques exigeaient des résultats rapides. Un dimanche après-midi, le président de la République en personne, Jacques Chirac, organisa une réunion avec le ministre de l’Intérieur, Jean-Louis Debré, et tous les responsables policiers pour leur faire part de son exigence que nous mettions immédiatement un terme à la menace. Il ne cacha ni sa colère ni son mécontentement envers nous. Tout le monde comprit que les deux principaux visés par les propos du chef de l’État étaient le directeur de la police judiciaire, Bernard Gravet, et le directeur général de la police nationale, c’est-à-dire moi-même. Le climat pouvait être malsain. Au sein de la police, certains essayaient de tirer profit de la situation pour régler des comptes ou assurer leur promotion. Mais nous partagions tous le même objectif : mettre fi n au carnage. Tous ceux qui, jour et nuit, étaient engagés dans les enquêtes avaient constamment à l’esprit les images terrifi antes du premier attentat, celui de la station Saint-Michel survenu le 25 juillet.

Nous n’avions qu’une seule idée en tête : qu’aucun de nos compatriotes ne soit à nouveau tué. C’était une course contre la montre de tous les instants, mais une course dans laquelle nous ne devions jamais céder à la précipitation. Pendant plus d’un mois, aucun indice ne fut judiciairement exploitable. Les enquêteurs et leurs responsables travaillaient comme des forcenés, mais se heurtaient à des murs. Deux fois déjà la mort et la désolation avaient fait leur œuvre. Un troisième attentat, dirigé contre un TGV, avait échoué. Malgré tous nos efforts, nous ne pouvions nier la vérité : nous ne disposions d’aucune piste sérieuse. Pour la simple raison qu’il nous manquait des pièces essentielles d’un puzzle macabre. Même si nous l’ignorions encore à l’époque, en réalité tout avait commencé le 11 juillet 1995 à la mosquée de la rue Myrha, dans le XVIIIe arrondissement de Paris. L’imam Sahraoui, un fondateur du FIS algérien, est assassiné par deux hommes armés d’un fusil à pompe et d’un pistolet. En quittant les lieux, les individus abattent aussi un proche de l’imam. Ils laissent sur place un sac contenant un fer à souder, des fils électriques et des ampoules halogènes. Ce n’est qu’après les attentats à l’explosif que les enquêteurs feront le lien avec cet assassinat. Sur le coup, la mort de l’imam avait été perçue par les services français comme un règlement de comptes avec pour toile de fond la guerre civile algérienne. Nous n’avions pas compris qu’il s’agissait de la première étape d’un tragique enchaînement. La cause de l’assassinat fut dévoilée dans un numéro du journal Al Ansar, bulletin publié en Suède qui servait de voix officielle au GIA. Cette organisation terroriste, dirigée par Djamel Zitouni, faisait régner la terreur en Algérie, où les morts se comptaient par dizaines de milliers. Le journal reconnaissait implicitement la responsabilité du GIA dans la mort de Sahraoui en accusant la victime d’être trop tiède dans sa défense de l’islam.

Extrait de "Quelques vérités à vous dire" de Claude Guéant, aux Editions de l'Archipel

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