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Une nouvelle arnaque sur les brevets venue des Etats-Unis ? (deuxième partie)
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Astérix

Gagner de l’argent sans rien inventer mais en rançonnant les inventeurs, c’est possible aux États-Unis grâce à la législation locale sur les brevets. Une petite firme française soumise à une tentative d’intimidation juridique résiste par une mobilisation en ligne et en brandissant… le Minitel.

Nathalie Joannes

Nathalie Joannes

Nathalie Joannès, 45 ans, formatrice en Informatique Pédagogique à l’Education Nationale : création de sites et blogs sous différentes plates formes ;  recherche de ressources libres autour de l’éducation ;  formation auprès de public d’adultes sur des logiciels, sites ;  élaboration de projets pédagogiques. Passionnée par la veille, les réseaux sociaux, les usages du web.

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Pour lire la première partie de cette enquête sur la guerre des brevets, c'est ici

Une structure "familiale"… familière

Des ingénieurs, des hommes d’affaires et des journalistes américains parlent carrément d’un capitalisme mafieux doté d’une structure comparable à celles de Cosa Nostraà la grande époque : un consortium ou un cartel qui régule le racket exercé par plusieurs "familles".  D’où le surnom, pas vraiment usurpé, de  " baron des brevets" donné au boss d’Intellectual Ventures.

Car le journalisme d’investigation a encore de beaux restes aux États-Unis. L’émission de radio This Americain Life a démonté unmécanisme de blanchiment de brevets qui consiste à faire enregistrer une "invention" par une des 1100 à  1300 sociétés écran en affaires avec Intellectual Ventures. Il importe peu que l’invention en question ait été "brevetée" cinq cents fois auparavant ; ce qui compte, avec quelques modifications mineures dans la formulation, c’est de  faire enregistrer un procédé, une technique, une vague idée qui fait ou va faire l’objet de vraies recherches.

Le brevet générique circule d’une société écran à l’autre ; au point que son origine disparaît complètement. Il sert juste à intimider d’éventuels vrais inventeurs qui mettraient au point – simple exemple – "un système de stockage en ligne accessible par identification et mot de passe." Pas de chance ! Ce système est breveté N°5771 354 US Patent.

La firme creuse de Marshall (Texas)

Et ce brevet est détenu par Oasis Research, petite firme texane de "protection" de la propriété intellectuelle. Les journalistes de This American Life se sont rendus au siège d’Oasis Research à Marshall (Texas). Ils ont trouvé un immeuble vide, sans bureaux ni employés, mais dont la façade est garnie de plaques portant des noms de sociétés qui n’existent pas.

Oasis Research n’a même pas pris la peine de se doter d’un site web, avouant ainsi sa véritable nature de coquille vide. Une coquille qui n’a pas eu le "nez creux" en osant attaquer Oracle pour six violations de sa "propriété intellectuelle" : le patron d’Oracle, Larry Ellison est un vraibad guy qui hurle sur scène comme un prêcheur possédé et qui cogne vite et fort (le patron le mieux payé du monde à 1,8 milliards de dollars par an, ne peut pas être un enfant de chœur. Quand on le cherche, on le trouve). Oracle vient de lancer une action en justice contre Oasis Research. Cette réplique aboutira peut-être au cœur du problème : Intellectual Ventures.

Intellectual Ventures n’engage jamais de poursuites en matière de propriété intellectuelle. Telle une pieuvre, l’honorable fonds d’investissement dispose de 1300 bras juridiquement armés pour (essayer de) ramasser l’argent.

David et son Minitel contre Goliath et ses US Patents

Voilà à quoi la start up française prétend résister dans un combat que des newsletters américaines comparent à celui de David contre Goliath. De fait, il y a de la fronde dans l’air. D’abord avecce site dédié qui recueille les expériences de tous ceux qui ont été harcelés par Lodsys ou une autre des tentacules d’Intellectual Ventures.

Il ne s’agit pas d’un site de pleurnicheries ou de remugles anti-américains mais d’un centre de ressources. Tous ceux qui ont résisté sont invités à expliquer comment ils ont perdu ou gagné afin que leur expérience serve aux prochaines cibles de Lodsys.

Car ce qui est significatif dans la lettre recommandée du 29 septembre 2011 adressée à Group Camp, c’est qu’elle est la première attaque menée en Europe par le cartel américain des brevets. Donc, il y en aura d’autres. En raison, notamment, du fait que beaucoup de vrais créateurs américains, ulcérés par le racket, se délocalisent en Europe, surtout en Grande-Bretagne pour des commodités de langage.Donc, tout ce qui pourra aider les futures cibles à ne pas se laisser intimider est recevable sur le forum ouvert par Group Camp. Ducrowdsourcing juridico-préventif, en somme.

En même temps, la société d’avocats Itenau, spécialisée dans les technologies et dans la propriété intellectuelle répond aux juristes de Lodsys que, d’abord, la législation américaine sur les brevets ne s’applique pas en Europe et que, ensuite et surtout, l’invention dont Lodsys se dit propriétaire n’a aucune valeur, même aux États-Unis. En effet, pour qu’une invention soit considérée comme novatrice, elle doit apporter quelque chose de plus que les celles qui l’ont précédée. Cela s’appelle l’antériorité. Or l’interaction de l’usager à propos d’un produit en ligne existait avant le web et l’US patent de 1993. Sur le Minitel français. Na !

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