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Emirats arabes unis Israël
Emirats arabes unis Israël
©JACK GUEZ / AFP

Le point de vue de Dov Zerah

Israël a récemment signé des accords de normalisation des relations avec les Emirats arabes unis et Bahreïn. Dov Zerah décrypte les enjeux et le contexte dans la région.

Dov Zerah

Dov Zerah

Ancien élève de l’École nationale d’administration (ENA), Dov ZERAH a été directeur des Monnaies et médailles. Ancien directeur général de l'Agence française de développement (AFD), il a également été président de Proparco, filiale de l’AFD spécialisée dans le financement du secteur privé et censeur d'OSEO.

Auteur de sept livres et de très nombreux articles, Dov ZERAH a enseigné à l’Institut d’études politiques de Paris (Sciences Po), à l’ENA, ainsi qu’à l’École des hautes études commerciales de Paris (HEC). Conseiller municipal de Neuilly-sur-Seine de 2008 à 2014, et à nouveau depuis 2020. Administrateur du Consistoire de Paris de 1998 à 2006 et de 2010 à 2018, il en a été le président en 2010.

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La semaine dernière, j’ai présenté certains aspects des deux accords de normalisation des relations entre Israël et les Émirats arabes unis (EAU) d’une part, et Israël et Bahreïn, d’autre part. Il m’a paru utile d’en savoir un peu plus sur ces deux États.

Les EAU ont été créés en 1971, il y a seulement cinquante ans, après le départ britannique. Leur population est légèrement supérieure à 11 millions d’habitants dont seulement 10 % seraient des nationaux selon les Nations-Unies et n’occupe que 5 % du territoire.

Ils sont une fédération de sept Émirats dont deux prédominants :

  • Abou Dabi, Émirat-ville qui abrite la capitale fédérale a été fondé en 1771. Avant de s’appeler Abou Dabi, « père de la gazelle », la région se dénommait Mihl soit « sel », très abondant. D’un seul tenant, sa superficie représente 87 % des 86 000 km² des EAU ; l’Émirat a un littoral de 700 km avec 200 îlots dont certains sont contestés par le voisin iranien.

Les EAU sont riches, très riches en hydrocarbures avec près de 10 % des réserves pétrolières connues et 5 % de celles en gaz. Á lui seul, Abu Dabi représente la quasi-totalité de la production et des réserves de la fédération.

Président des EAU depuis 2004, l’émir Khalifa ben ZAYED Al Nahyane et son fils, le prince héritier, Mohamed ben ZAYED (MBZ) ont insufflé une politique moderniste pour utiliser la rente pétrolière dans un modèle économique de développement durable pour le jour d’après-pétrole. L’Émirat a multiplié les investissements dans les énergies renouvelables, aussi bien le solaire que l’éolien, et s’est affirmé dans ce domaine au point d’accueillir l’Agence internationale pour les énergies renouvelables. L’Émirat investit également l’industrie, le tourisme de luxe, la distribution… au point qu’en fonction du niveau du prix du pétrole, les activités autres que celles pétrolières ont pu représenter jusqu’aux deux tiers du PIB.

Parallèlement, l’Émirat a développé une société de la connaissance en offrant à près 70 000 étudiants les plus prestigieuses universités de par le monde.

L’affirmation de cette stratégie est allée jusqu’à se décliner dans le domaine culturel avec les créations de musées, le Louvre d’Abu Dabi, le musée Guggenheim Abu Dabi, le musée national des Émirats, le musée maritime…

  • Dubaï dont la ville est devenue la capitale économique des EAU, a emboité le pas d’Abu Dabi tout en développant les investissements dans les énergies nouvelles, les centres commerciaux, les centres d’affaires avec des gratte-ciel qui rivalisent dans la hauteur, les ports francs. Dubaï est le plus grand port des EAU avant celui d’Abu Dabi et celui de Charjah.

Situés entre le golfe persique ou arabique, les Émirats ont trois voisins, l’Arabie saoudite (avec une frontière de 530 km), Oman (avec une frontière de 450 km) et le Qatar (séparé des EAU par les ports naturels saoudiens de Khor Duweihin, et de Khawr al Udayd).

Pour éviter toute contestation territoriale entre les Émirats futurs membres de la fédération, le Royaume-Uni avait fixé les frontières entre eux avant l’indépendance, même si cinq Émirats se contestent la souveraineté de plus de douze enclaves.

Parallèlement, n’est toujours pas purgé le contentieux frontalier avec l’Arabie saoudite, malgré l’accord signé le 21 août 1974. En échange de villages en zone frontalière avec Oman, et une grande partie du désert d’al-Zafra, les EAU ont laissé un accès côtier à l’Arabie saoudite entre Abou Dabi et le Qatar, et surtout le contrôle du gisement pétrolier de Shayba, attaqué le 17 août 2019 par dix drones officiellement houthis, mais probablement iraniens. Mais, les EAU n’ont pas hésité à remettre en cause l'accord de 1974.

En l’espace d’une génération, les EAU se sont affirmés sur la scène régionale, notamment par des actions conjointes avec l’Arabie saoudite au Yémen ou dans la tentative de confinement du Qatar. Parallèlement, ils ont été présents de par le monde via des fonds souverains. Tout en essayant d’utiliser au mieux la manne pétrolière, ils recherchent l’autonomie en matière énergétique hors pétrole, et ont développé la désalinisation pour dépasser l’aridité du pays malgré de nombreuses oasis.

Formé à l’académie royale militaire de Sandhurst, MBZ veut faire des EAU une puissance économique, militaire, scientifique… avec tous les attributs. L’accord avec Israël s’inscrit certes dans la démarche de se protéger de l’Iran. Mais il a une vocation plus systémique. MBZ veut suivre l’exemple de la « start up nation » pour consolider sa stratégie de développement ; il est vraisemblable de voir prochainement de nombreux investissements émirati dans les pépites israéliennes. Cette vision de long terme envoie un message clair. Dans le monde de demain, les nouvelles technologies sont plus importantes que les km² ! Cela pourrait reconfigurer le futur proche Orient, d’autant que MBZ est considéré comme le mentor du prince héritier saoudien MBS. Cela pourrait être une des explications du titre du document explicitant le deal du siècle « Peace to prosperity » !

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