2 milliards d’euros, le coût des attentats de Paris évalué par Bercy dans une note envoyée à Bruxelles<!-- --> | Atlantico.fr
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Depuis les attentats du 13 novembre, les magasins, les avions, les hôtels et les salles de spectacle se sont vidés.
Depuis les attentats du 13 novembre, les magasins, les avions, les hôtels et les salles de spectacle se sont vidés.
©Reuters

L'Edito de Jean-Marc Sylvestre

Après avoir demandé un dépassement de déficit pour payer les mesures de sécurité, Bercy a envoyé une note à Bruxelles pour chiffrer le manque à gagner sur l'économie française : 2 milliards d’euros.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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L’administration des finances se bouge dans tous les sens pour essayer d’évaluer le vrai prix des attentats en France. Elle a évidemment beaucoup de mal et on sent bien que l’objectif de toutes ces manœuvres c'est de préparer l’opinion publique européenne et la Commission de Bruxelles à faire sauter les normes budgétaires qui plafonnent le déficit public à 3%.

La manœuvre est grossière parce qu’aussi bien les dépenses de sécurité que le manque à gagner imputable au ralentissement de l’activité ne vont pas faire exploser les dépenses budgétaires. Il faut cesser de se raconter des histoires. Avant même cet épisode tragique, la France n’aurait pas pu rester dans les clous. Le problème est ailleurs. Cette vague d’attentats, et le risque de guerre, vont servir d’alibi au laxisme très électoraliste de la gestionbudgétaire.

Après le discours au congrès d’un François Hollande transformé en chef de guerre, on a chiffré les créations d’emplois dans la police et l’armée ainsi que l’impact des attentats sur l'économie. Emmanuel Macron est allé rassurer les populations de la défense sur toutes les mesures de sécurité qui ont été prises.

Le principal objectif, c'est de restaurer la confiance des agents économiques. Depuis les attentats du 13 novembre, les magasins, les avions, les hôtels et les salles de spectacle se sont vidés. Selon les secteurs, la perte de chiffre d’affaires varie entre 30% et 50%.

Il est évident qu’une grande partie de ce chiffre d’affaires est définitivement perdu. Les chambres d’hôtels, les places d’avion, les spectacles, les voyages par le train ne seront pas rattrapés. Le manque à gagner dans les grands magasins est également perdu. Parce qu’à cette époque la moitié des achats sont des achats d’impulsion. On ne les retrouvera pas. A l’approche des fêtes de fin d’année, on peut espérer une consommation de rattrapage. Mais là encore, il ne faut pas rêver.

Les commerçants et leurs fournisseurs vont donc souffrir. Cette période de souffrance ne devrait pas durer plus de deux mois si l'on se réfère à ce qui s’était passé à New-York après les attentats du 11 septembre 2001.

La direction du trésor a évalué le coût de cette période à 2 milliards d’euros pour l’économie française soit 0,1 point de PIB. Ce coût consolide le manque à gagner dans le commerce, l’hôtellerie, les transports, l’absentéisme dans les entreprises.

Emmanuel Macron a beaucoup relativisé ces chiffres en considérant qu'il pouvait y avoir des effets de rattrapage. Il espère seulement que cette période ne va pas installer un climat de précaution qui reviendrait à plomber les perspectives et à casser la reprise qui commençait à toucher l’appareil de production. Les enquêtes de confiance publiées cette semaine par l’Insee et par le cabinet Markit sont très contradictoires.

L’Insee envoie des signes d’amélioration de la production résultant de la demande de consommation en octobre mais l’Insee indique aussi qu’il y a une détérioration des carnets de commandes pris sur le marché mondial. Lequel est en voie de ralentissement sous l’effet des pays émergents qui piquent du nez, la Chine et le Brésil surtout.

Du coup, selon l’INSEE, rejoint par des économistes bancaires - BNP notamment - le mois de décembre pourrait présenter des signes de détérioration, avant même de savoir très exactement l’effet des attentats.

Le cabinet Markit lui, a publié un diagnostic mardi dernier avec un indicateur PMI manufacturier en recul de 1,4 point pour le mois de novembre. Les entreprises qui ont été sondées juste après les évènements se sont montrés très pessimistes pour les deux mois à venir. La direction du trésor a évidemment eu connaissance de ces deux études pour réaliser son chiffrage.

Quoi qu’il en soit, les faits et les chiffres ne justifient absolument pas la demande faite pas la France de s’affranchir de ses engagements budgétaires. L’effort supplémentaire à fournir est très faible au regard du poids de tous ces déficits. D’autant que du côté du gouvernement,  on se félicite des taux d’intérêt qui permettent un endettement low-cost. Donc pourquoi se priver !

Ces choix sont dangereux à long terme parce qu'ils exonèrent une fois de plus le gouvernement de faire des efforts de rigueur.  Le ministre de la Fonction publique a déjà laissé entendre que l’année prochaine il faudra faire sauter le gel du point d’indice afin de mieux rémunérer les fonctionnaires. Très bien mais, politiquement, la gravité de la situation permettait de faire un autre type de discours fondé sur la rigueur et sur la réforme.

Il y avait un plan B, pour obtenir le même résultat sans hypothèque ni l’avenir ni le crédit auprès de nos partenaires européens. Ce plan B s’articulait autour de trois axes.

Premier axe, trouver dans la masse des dépenses, les économies à faire pour financer les nouveaux choix et même les dispositifs fiscaux de soutien à l’activité. Deuxième axe, accélérer les réformes afin d’obtenir une productivité de la dépense publique plus grande. Le problèmes de la France n’est pas de dépenser plus, mais de faire mieux. Enfin troisième axe, profiter de la situation qui affecte l’Europe toute entière pour engager un processus de mutualisation des dépenses de sécurité et de défense. Parce que le temps n’est pas à la mutualisation, le temps est plutôt à l'isolement nationaliste.  Du coup, on n’avance pas, on recule.

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