Quand Facebook manipule nos émotions <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
High-tech
Un demi-million d'utilisateurs Facebook écrivant en anglais ont été soumis à un "mur" d'actualité manipulé.
Un demi-million d'utilisateurs Facebook écrivant en anglais ont été soumis à un "mur" d'actualité manipulé.
©Reuters

Revue de blogs

Une étude conduite sur la possibilité de contrôler l'humeur des utilisateurs de Facebook a fait hurler la science et les utilisateurs américains.

Claire Ulrich

Claire Ulrich

Claire Ulrich est journaliste et fan du Web depuis très longtemps, toujours émerveillée par ce jardin aux découvertes, et reste convaincue que le Web peut permettre quelque chose de pas si mal : que les humains communiquent directement entre eux et partagent la chose humaine pour s'apercevoir qu'ils ne sont pas si différents et qu'il y a donc un moyen de s'entendre.

Voir la bio »

Qui fait encore attention aux émoticons "merveilleusement bien" ou "triste" de Facebook ? Si insérés dans le paysage de notre page bleue et blanche que personne ne se demande qui a le temps d'aller chercher précisement l'émoticon qui correspond à son humeur. Et encore moins si un algorithme ne ferait pas le travail à sa place par la technologie de reconnaissance et association des mots. La machine FB est tellement tatouée dans nos vies que les alertes aux multiples fuites de données, censures, suspiscions de surveillance par la NSA ne font plus un clic. Mais ce week-end, les réseaux sociaux américains ont vu rouge, car la dernière manipulation du réseau social est scientifique et celle-là, même si on ne comprend pas bien pourquoi, après d'autres atteintes à la vie privée ou émotionnelle,fait scandale.

Un demi-million d'utilisateurs Facebook écrivant en anglais ont été soumis à un "mur" d'actualité manipulé. Dans le flux d'environ 1500 parutions-jour du fil d'actualité, l'algorithme sélectionnait intentionnellement des messages plutot positifs ou plutôt négatifs, et observait ensuite ce qui se passait. Les cobayes "positivés" postaient plus "positivement" que les autres, eux aussi inconscients de la manipulation, exposés à des émotions négatives.

Tom's Guide donne le lien vers l'étude en question, accessible en ligne réalisée il y a longtemps (2012) pendant une semaine. Elle a un titre très 21e siècle : "Preuves  de contagion a grande échelle des émotions sur les réseaux sociaux"?

Résumé :

"Nous démontrons par une expérience de grande ampleur (N = 689,003) sur Facebook, que les états émotionnels peuvent se communiquer à d'autres par une contagion émotionnelle, conduisant les personnes à éprouver les mêmes émotions sans en être conscientes. Nous démontrons par des preuves tirées de l'expérience qu'une contagion émotionnelle a lieu sans interaction diecte entre les personnes (le contact avec un ami exprimant une émotion est suffisant) et en l'absence totale de signaux non verbaux."

Les anciens émoticons Facebook

L'enquête de The Atlantic, "Tout ce que nous savons sur la manipulation de FB", très complète et ultra retweetée a fait monter la température. Le site a demandé à des chercheurs d'examiner la valeur scientifique de cette étude. Pas convaincainte, pour eux. Il a ensuite disséqué  tous les manquements à la déontologie. Il remarque aussi que l'université Cornell a reçu des fonds de l'institut pour la recherche militaire ( info démentie par l'université après l'esclandre ). Le site pose une question dont on suspecte que la réponse n'est pas zéro :  sur combien d'autres expériences de manipulation des émotions FB travaille-t-il ?

C'est grave ?

Ethiquement, oui, et surtout aux Etats-Unis. Pour les RP de Facebook aux Etats-Unis et donc pour le cours de l'action, oui, au moins passagèrement. The Wirevoit deux problèmes derrière la fureur actuelle des américano-facebookiens. "Le plus dérangeant dans la manière avec laquelle Facebook a conduit l'étude est qu'ils ont manipulé les sentiments de milliers de personnes sans leur en demander l'autorisation. (...) Cette étude nous en dit plus sur les pratiques de Facebook que sur notre comportement en ligne".  Facebook ne pensant qu'à la publicité et à comment retenir les utilisateurs, la manipulation des émotions peut devenir ou est devenue une technique comme une autre. En remarquant aussi que les conditions d'utilisation d'un site ont remplacé toutes les formes de protocoles ethiques établis "dans la vraie vie" pour les études psychologiques sur des humains.

Facebook a-t-il le droit de faire ou laisser faire ces expériences ?

"Les numériques" est allé fouiller dans les conditions d'utilisations de FB. Côté avocats, tout est bordé.

"Il paraît légitime de se pencher sur les conditions d'utilisation du réseau social et a fortiori sur des pages importantes qui ne font l'objet que d'un renvoi, comme celle abordant la question de l'utilisation de nos données personnelles. On y constate, en effet, que Facebook se réserve le droit d'utiliser nos données, entre autres, pour "des opérations internes, dont le dépannage, l’analyse de données, les tests, la recherche et l’amélioration des services". La firme de Mark Zuckerberg est donc, a priori, dans son bon droit. Que dire.... À quand la prochaine étude ? Nous pouvons même leur suggérer un nouveau sujet : l'influence politique du réseau social à la veille d'une élection présidentielle".

Numérama est encore plus direct : "Est-ce plus rassurant que ces outils de manipulation des masses soient mis dans les mains d'une société privée plutôt que dans celle d'un régime autoritaire ?" 

Et maintenant ? Il n'y a pas grand-chose à attendre de FB et de ses confrères de la Silicon Valley, selon le blog américain MMMS, qui, problème après problème et semblant tomber des nues ne savent que répondre : "Nous sommes des gens intelligents et nos intentions sont bonnes". Et pas plus des utilisateurs eux-mêmes de Facebook, nous, selon le Dr Ramani, un comportementaliste, qui lève les yeux au ciel sur son blog : "Utilisateurs de Facebook, pour l'amour du ciel, grandissez. Avant de hurler que votre vie privée est violée, vos humeurs manipulées, refléchissez : êtes-vous prêts à renoncer à vos selfies, vos jérémiades, vos diastribes politiques et les photos d'encore un autre coucher de soleil ? Tout à un prix."

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !