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Montée de fièvre : des vagues de chaleur record s’abattent de plus en plus souvent sur les océans
©cc Flickr

Green

Des courants d'eau chaude sont en train de détruire les écosystèmes marins: plantes aquatiques, algues corail. Ils auraient le même effet que des incendies, mais sous l'eau.

Nicolas Imbert

Nicolas Imbert

Nicolas Inbert est directeur exécutif de Green Cross France et Territoires.

Co-auteur de l'ouvrage "OCEAN: des clés pour agir " www.desclespouragir.com 

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Atlantico :  Pouvez-vous nous explique d'où provient ce phénomène et quel impact a-t-il concrètement sur les fonds marins ?

Nicolas Imbert : Il y a deux choses qu'on constate dans la continuité des rapports du GIEC et qui sont de plus en plus alarmants, deux phénomènes qui s'additionnent. Le premier phénomène, c'est que le dérèglement climatique s'accélère et a un impact de plus en plus négatif sur les écosystèmes marins. Le second phénomène, c'est que dans un certain nombre de zones de la planète parmi les plus riches et les plus denses, et en particulier dans des zones où se trouvent les massifs coralliens, on se retrouve à avoir une très rapide et grande détérioration biochimique des écosystèmes. Les deux phénomènes s'amplifient l'un l'autre. Dans le premier cas, ce sont les effets de l'activité humaine et de notre incapacité à lutter efficacement contre les gaz à effets de serre. Dans le second, c'est la vie sous-marine, en particulier dans les lagons et les récifs coralliens, qui commence à se transformer d'une manière dramatique.  

Des études récentes ont montré que ces vagues d'eau chaude deviennent plus fréquentes, plus prolongées et plus destructrices. A quoi doit-on cette accentuation ?

On est dans cette phase où le dérèglement climatique est rentré dans notre quotidien. Ces vagues chaudes surviennent à un moment où la température moyenne est en augmentation et font partie des effets de cette augmentation qui sont irréversibles et qui se propagent un petit peu partout : depuis les glaciers de l'Antarctique qui fondent à une vitesse bien supérieure à ce qu'on anticipait, à la route de l'Arctique qui commence à devenir navigable 6 à 9 mois par an, avec ce que cela suppose en termes d'altération sur les courants chauds et froids. L'activité humaine de plus en plus soutenue en zone tropicale accentue le phénomène (nos stations d'épuration remplies de nos produits solaires sont en train d'avoir un impact direct en zone tropicale en venant se déverser sur les massifs coralliens qui sont des zones à risque).

Risque-t-il d'y avoir un impact irréversible sur l'écosystème marin (invertébrés, planctons, etc.) et par répercussion sur l'humanité et les populations côtières par exemple ? Le mesure-t-on déjà ?

L'impact est assez large et à chaque fois qu'on l'analyse, y compris en zone tempérée, on trouve des résultats. Les récifs coralliens sont effectivement très étudiés. Sur le plancton, on a des suspicions, des éléments d'analyse scientifique qui sont en train d'être développés et dans lesquels on constate à chaque fois des effets indéniables. On a d'autres espèces qui sont des traceurs et qui doivent nous alerter. Je pense à particulier près des côtes aux sardines qui sont en train d'avoir une migration vers le nord de plus en plus marquée alors qu'on avait déjà constaté une altération de leurs caractéristiques sexuelles secondaires, notamment du côté du Golfe du Morbihan ou du côté de la rive en Occitanie de la Méditerranée.

Est-ce que cela peut avoir un impact sur l'économie du littoral ?

Tout est affecté et en même temps, quand on dit cela, il faut aussi qu'on se rende compte à quel point notre économie littorale est partie prenante dans l'établissement de la solution. Notamment, on a identifié dans les années 90 que la pèche industrielle allait détruire les Océans et courait directement à sa perte si elle continuait avec les mêmes méthodes. Cela a donné lieu à une politique européenne intégrée et à l'élaboration des quotas de pêche. A cette époque-là, une partie des filières professionnelles était vent debout contre les quotas de pêche. Maintenant il y a un consensus au niveau de la pêche européenne qui a réalisé a quelle point cette politique des quotas doit être continuée et encouragée parce qu'elle a contribué à maintenir le gisement, à éviter des effets encore pire et irréversible, et à faire en sorte que l'activité existe encore aujourd'hui. Quand on a également travaillé sur la reconquête de l'anchois en Méditerranée , quand on a travaillé sur la population de thonidés et Méditerranée et dans l'Atlantique, cela a permis de maintenir la durabilité de la ressource. Simplement, aujourd'hui, les efforts qui nous restent à faire pour l'économie maritime et littorale sont d'une toute autre ampleur de ce qui a déjà été fait. Le Président Emmanuel Macron, dans le cadre du Grand Débat, s'est fait interpellé par un adolescent qui lui a demandé quand on allait enfin changer de braquets dans la lutte contre le dérèglement climatique et qu'on passe aux mesures sérieuses : voilà exactement ce qui nous attend maintenant. Il faut qu'on soit beaucoup plus ambitieux dans le passage à la sobriété énergétique et aux énergies renouvelables, et qu'on accélère l'accord de Paris au lieu de repousser à 2035 la fin des centrales et une politique énergétique sérieuse à l'échelle de la France. Il faut qu'on mette en place des politiques de lutte contre le développement de la vulnérabilité et pour le développement de la résilience qui soit plus sérieuse. La France, qui a la deuxième frontière maritime au monde, a un rôle énorme à jouer et jusqu'à maintenant, on a beaucoup parlé et paradé dans les relations internationales en expliquant à quel point il était important d'agir, mais on n'est pas du tout à la hauteur dans la mise en place des actions de transition.

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