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Prigojine trouve une porte de sortie, Poutine évite l'affrontement au prix de son autorité
Prigojine trouve une porte de sortie, Poutine évite l'affrontement au prix de son autorité
©GAVRIIL GRIGOROV and Sergei ILNITSKY / SPUTNIK / AFP

Victoire amère

Alors que la médiation du dictateur biélorusse Loukachenko a permis d'éviter un affrontement armé entre les forces de Wagner en approche de Moscou et l'armée régulière, et a offert au chef mercenaire un asile hors de Russie, le président Poutine apparaît affaibli aux yeux des Occidentaux.

Après avoir défié pendant 24 heures l'autorité de Vladimir Poutine, en lançant ses troupes vers Moscou et en promettant de "libérer le peuple russe", le groupe Wagner en la personne de son chef, Evguéni Prigojine, a finalement fait marche arrière. Dans la soirée du samedi 23 juin, à la suite de négociations où le patron du groupe paramilitaire aurait obtenu a minima l'amnistie pour lui-même et ses hommes ainsi qu'un exil en Biélorussie, acceuillit par le président Loukanchenko avec qui il négociait, Prigojine a fait volte-face et le retrait de ses troupes de plusieurs villes russes. Brève mais marquante, cette rébellion contre le Kremlin et surtout le commandement militaire, que certains interprètent comme un coup de pression d'un mercenaire aux abois, risque de laisser de profondes traces en Russie.

Après avoir espéré un renversement de la dictature poutinienne, sans pour autant se faire d'illusions sur le meneur du coup, les opposants au régime de Moscou ont souligné la faiblesse de ce dernier : "La seule conclusion, certaine, c'est que le régime poutinien est faible, que les criminels sont en train de se dévorer entre eux", juge ainsi Olga Prokopieva, porte-parole de Russie-Libertés. De même dans les milieux diplomatiques, la facilité avec laquelle Wagner s'est emparé de villes majeures et a progressé vers la capitale a été notée : "Il n'y a que des perdants" dans cette rébellion avortée, observe aussi sur franceinfo Sylvie Bermann, ancienne ambassadrice de France en Russie entre 2017 et 2019. A ses yeux, les perdants sont non seulement Evguéni Prigojine, mais également la Russie, qui a offert "l'image d'un pays qui ne va pas bien", tout comme Vladimir Poutine lui même. La diplomate met l'emphase sur le fait que "la stabilité était le mot d'ordre et l'atout principal" du président russe, qui "à la veille de l'intervention en Ukraine avait les pleins pouvoirs en Russie et était respecté dans le monde entier comme une puissance forte".

Une forme de mise à nue du pouvoir russe, très factionnisé, en proie à des rivalités internes dangereuses pour l'édifice même de l'Etat Russe, comme l'exprime le centre de réflexion américain Institute for the Study of War dans une analyse affirmant que "Le Kremlin est désormais confronté à un équilibre profondément instable (...) La rébellion de Prigojine a révélé de graves faiblesses". Face à une telle remise en cause, le pouvoir russe va donc devoir réagir et faire subir les conséquences de ses actes à Prigojine, estime l'analyste Samuel Bendett. "Sinon le message est qu'une force militaire peut ouvertement défier l'Etat, et d'autres doivent comprendre que l'Etat russe a effectivement le monopole de la violence à l'intérieur du pays", selon ce chercheur au Center for Naval Analyses.

De quoi radicalement changer la donne en Ukraine ? Sans doute pas. Le Kremlin a d'ailleurs tenu à l'affirmer samedi soir : La rébellion avortée de Wagner n'affectera "en aucun cas" les forces russes en Ukraine. Mais dans un contexte de piétinement voire de recul sous l'impact d'une contre-offensive ukrainienne encore floue, difficile d'ignorer l'impact d'une affaire pareille sur le moral des troupes au front. D'autant que Wagner se vante depuis plusieurs mois de la prise de Bahkmout, l'unique ville prise aux ukrainiens depuis 2022. L'ancienne ambassadrice Sylvie Bermann ne considère pas la guerre en Ukraine "remise en cause", mais la rébellion de la milice Wagner pourrait tout de même représenter une sorte "de victoire pour les Ukrainiens qui ont renforcé leur offensive". Lors de son discours télévisé samedi, Vladimir Poutine a bien "assuré que cela ne changerait rien dans sa résolution à mener une guerre", mais il n'en sort pas moins "affaibli psychologiquement".

FranceInfo

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