À Europe 1, le malaise s’installe depuis l’arrivée de Cyril Hanouna<!-- --> | Atlantico.fr
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Depuis une semaine, Cyril Hanouna anime une émission de décryptage politique sur les ondes d’Europe 1.
Depuis une semaine, Cyril Hanouna anime une émission de décryptage politique sur les ondes d’Europe 1.
©FRANCK FIFE / AFP

Enquête

Depuis une semaine, Cyril Hanouna anime une émission de décryptage politique sur les ondes d’Europe 1, qui a déjà valu à la chaîne privée une mise en demeure de l’Arcom. En coulisses, le retour de l’animateur provoque des remous au sein de la rédaction.

L’arrivée sur Europe 1 de l’émission "On marche sur la tête", animée par Cyril Hanouna en remplacement de la tranche animée par Sophie Davant, se serait faite sans consultation préalable de la principale intéressée. Ni de la rédaction et des instances du personnel.

Le comité social et économique (CSE) d’Europe 1 n’a, en effet, pas reçu "d’information consultation" comme c’est l’usage : "on nous a pris en traître. On nous a imposé ce choix super clivant", dénonce une journaliste expérimentée de la chaîne qui, comme toutes les personnes interrogées par Franceinfo, souhaite garder l’anonymat de peur des représailles. "Il y a un gros malaise depuis quelques mois et encore plus depuis l’arrivée de Cyril Hanouna", précise-t-elle.

La journaliste précise : "ce choix a évidemment été imposé par le haut. Depuis l’OPA en novembre par Vincent Bolloré, Europe 1 n’est pas une société en commandite, ils n’appliquent que ce qu’on leur demande de faire. Il n’y a plus de capitaine dans le bateau. Ou alors, il se trouve du côté de Vivendi."

En pleine campagne des législatives, l’arrivée de Cyril Hanouna a surpris une rédaction majoritairement composée de jeunes journalistes, qui sont conscients du profond virage idéologique de leur chaîne depuis quelques mois. Résolu à partir avant la rentrée, un journaliste évoque le jour de l’arrivée de Cyril Hanouna à Europe 1 comme un "lundi noir" pour toute une partie de la rédaction. "Ça a été la goutte de trop, explique-t-il à nos confrères de franceinfo. La journée de l'arrivée de Cyril a été lourde pour tout le monde. C'était vraiment une ambiance d'enterrement. C'est un mot choisi parce que c'est vraiment ce qu'on s'est dit. On avait vraiment l'impression d'enterrer Europe 1 et ce qu'était ce média auparavant. On s’est vraiment habitués à avoir un traitement de l'info de droite, voire d'extrême droite, des angles choisis, malhonnêtes, détournés. On en avait l'habitude. Mais là, on était face à deux heures d'information dans un programme complètement idéologique, une caricature complète", dénonce-t-il.

Selon les dires de plusieurs sources au sein de la chaîne, les résultats d’audience de la nouvelle émission de Cyril Hanouna semblent cartonner, mais une partie de la rédaction semble, au contraire, vivre une crise existentielle.

En quelques jours d’enquête seulement, un certain nombre de collaborateurs d’Europe 1 ont spontanément exprimé à franceinfo leur volonté de quitter la rédaction. Au-delà de l’émission de Cyril Hanouna, ces titulaires ou pigistes évoquent un virage éditorial dur depuis septembre dernier, qui ne se soucie plus du contradictoire et filtre les sujets ne répondant pas aux "marqueurs" de la direction.

"Les reporters doivent proposer des sujets 'dans la ligne', assure l’un de ces journalistes. Dans la note du matin (document interne qui permet de faire la liaison entre les différents services de la rédaction, ndlr), on appelle cela 'nos marqueurs'. En clair, on nous demande d’aller vers des faits de société surtout liés à l’immigration… Ce sont souvent des faits divers commis par des clandestins, des fichés S. Politiquement, il nous est par exemple interdit de qualifier le RN ou Reconquête de parti d’extrême droite. En revanche, LFI est d’extrême gauche", précise le journaliste à franceinfo.

Le virage éditorial imposé ces derniers mois aux rédacteurs de la chaîne est une donnée de fond du malaise éprouvée par une partie de la rédaction, selon plusieurs sources au sein de la rédaction. "Que ce soit dans les sujets et les angles choisis, décrit un journaliste-reporter tenté de quitter Europe 1, il y a un vrai accent donné à 'la ligne'. C'est le mot répété sans cesse par la hiérarchie. À savoir, du fait divers ou des sujets qui concernent l'électorat de droite”.

Sollicitée par les journalistes de franceinfo, la direction d’Europe 1 n’a pour l’instant pas répondu aux questions concernant sa récente mise en demeure par l’Autorité de régulation audiovisuelle. "On sent qu’on a passé un palier et on est totalement lâchés par l’ARCOM", réagit une journaliste de la chaîne pour qui le gendarme des médias ne joue pas son rôle en pleine campagne des législatives.

Lors de la dernière réunion du CSE d’Europe 1, tenue le mercredi 19 juin, la nouvelle émission de Cyril Hanouna a été discutée en présence de son directeur général, Donat Vidal-Revel. Selon les informations recueillies par franceinfo, celle-ci est loin d’être remise en question : la présence de l’animateur vedette aurait été considérée comme une "option" de la rentrée pour doper les audiences de la chaîne en perte de vitesse, ces dernières années.

Malgré qu’une partie des journalistes et collaborateurs de la chaîne soit tentée de quitter la chaîne, nombre d’entre eux sont évidemment contraints de rester par leur situation économique, le marché déprimé de la presse, mais aussi le statut particulier d’Europe 1. Au sein de Lagardère News, la chaîne est en effet juridiquement considérée comme une agence de presse, ainsi ses journalistes ne sont pas éligibles à la clause de conscience ou de cession qui auraient pu leur permettre de négocier plus facilement leur départ.

Franceinfo

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