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Voitures électriques : quand le paradis californien se transforme en cauchemar
©Reuters

Du paradis à l'enfer...

Les automobilistes de voitures électriques en Californie sont en colère. En cause ? Des feux de forêts et des intempéries qui créent des pannes massives du réseau électrique, entraînant de fait une immobilisation totale de leur véhicule.

Laurent  Meillaud

Laurent Meillaud

Laurent Meillaud est journaliste, écrivain et consultant spécialisé dans l'automobile et les nouvelles technologies. Il anime le blog Voitures du Futur.

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Atlantico : Comment l'exemple californien montre-t-il que le tout électrique n'est pas une solution dans toutes les parties du monde? Notamment en ce qui concerne la mobilité et l'automobile ? 

Laurent Meillaud : La Californie a toujours connu des problèmes chroniques de réseau électrique. J'ai souvenir d'un séjour dans la Sonoma Valley, où mon hôtel de luxe a été plongé dans le noir et pendant des heures suite à une panne de courant. C'était il y a plus de 15 ans. Si le véhicule électrique est à la mode, parce que jugé plus écolo, il faut se poser la question du réseau. On voit bien en France que lors des pics de froid, il y a des régions qui ont du mal à avoir du courant quand tout le monde met le chauffage (région PACA, Bretagne) parce qu'elles sont mal raccordées. Si demain on ajoute en plus des véhicules électriques qui se branchent en même temps, on ajoute un problème de plus. Contrairement à une idée reçue, on ne va pas devoir construire des centrales nucléaires pour développer la mobilité électrique. La France peut accueillir facilement jusqu'à 9 millions de véhicules avant que ne se posent des questions. Néanmoins, il va falloir apprendre à recharger à bon escient, de préférence la nuit. A plus long terme, la batterie pourra servir de réserve tampon et redonner de l'électricité au réseau. Le problème qui peut se poser est celui de la charge rapide, voire de la recharge ultra rapide. Ces chargeurs ont un impact sur le réseau et ont un coût. Par ailleurs, leur disponibilité et leur performance peuvent fluctuer par forte chaleur ou quand il fait très froid. Une fois qu'on a dit ça, et alors que la France a un réseau plutôt solide, on imagine ce qui peut se passer dans certains pays qui n'ont pas cette chance, particulièrement en Asie du sud est. Par ailleurs, l'origine de l'électricité (charbon au lieu du nucléaire) relativise aussi le discours sur le bilan global. 

Y a-t-il d'autres alternatives que la voiture électrique qui seraient moins émettrices de CO2 et qui ne seraient pas dépendantes du réseau électrique ?

Il y en a déjà une, qui est complémentaire et qui a pour nom l'hydrogène. Ce vecteur d'énergie permet de stocker pendant une longue durée les énergies intermittentes comme le solaire et l'éolien. L'électricité verte ainsi obtenu peut être utilisée dans de l'eau et faire ainsi une électrolyse. L'énergie obtenue sous forme gazeuse peut être utilisée directement comme "carburant" pour de la mobilité (vélos, voitures, camions, bus, trains), ou reconvertie plus tard à nouveau en courant électrique. Il est à noter que l'hydrogène est de plus en plus cité comme étant une alternative pour le chauffage, la production d'électricité dans une maison, mais aussi pour d'autres usages comme les groupes électrogènes. Dans la mobilité, les chariots-élévateurs sont aussi des candidats pour cette forme d'énergie. La mobilité lourde (utilitaires, camions) sera le premier marché, l'automobile n'étant prévue en masse que bien plus tard (et dans un premier temps plutôt pour des SUV). Il ne faut pas oublier non plus le gaz, ou plus exactement le biogaz, qui peut être produit de manière vertueuse à à partir de déchets agricoles. On peut alors produire de l'énergie en circuit court, de la ferme à la pompe. Le biométhane rejette 20 % de CO2 en moins par rapport à l'essence (et bien moins si l'on prend en compte le bilan du puits à la roue). Pour l'anecdote, il y a en Californie un projet qui a pour nom Tri-Gen. Il s'agit d'une usine qui va produire de l'électricité et de l'hydrogène à partir du fumier. Le site, dont l’exploitation doit démarrer en 2020, produira approximativement 2,35 mégawatts d’électricité et 1,2 tonne d’hydrogène par jour. Soit, des quantités d’énergie suffisantes pour alimenter l’équivalent d’environ 2 350 foyers et assurer les besoins quotidiens de près de 1 500 véhicules. Sinon, il y a une solution qui permettrait de conserver le moteur thermique et l'infrastructure existante. Il s'agit des e-fuels, ou carburants synthétiques. Réalisés à partir de CO2 et de biomasse, ils peuvent être formulés de façon à réduire la pollution. Ce ne sont pas les solutions qui manquent. 

Au global, existe-t-il un défaut de prise en compte des cas locaux dans la transition vers une croissance plus respectueuse de l'environnement ?

Il y a aujourd'hui une pensée unique qui décrète que l'électrique est la seule solution. C'est une impasse. Il suffit de voir comment un acteur comme Renault, chantre de la mobilité électrique depuis plus de 10 ans, arrive aujourd'hui à proposer de l'hybride et de l'hydrogène dans sa gamme... tout en continuant à proposer des modèles thermiques. Plutôt que de dicter un choix technique, les gouvernements et l'Europe seraient bien plus inspirés de fixer des seuils et de laisser le soin aux industriels la liberté de proposer des solutions. Ces derniers réclament une neutralité technologique. Les choix de motorisations dépendent des usages et des types de véhicules. C'est pour cela qu'un petit véhicule pourrait être électrique pour la ville, mais plutôt hybride rechargeable pour des trajets périurbains alors que le gaz ou l'hydrogène seraient plus pertinents pour de la longue distance. A l'échelle du monde, il faut avoir conscience que bien des parties du globe ne voient pas du tout l'électrique comme une solution. Le Brésil mise par exemple sur l'éthanol, l'Inde sur le gaz

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