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RemoveDebris, le satellite qui permet de nettoyer les déchets en orbite
©Capture d'écran Surrey Space Center

Prouesse dans l'espace

Le satellite RemoveDebris a été installé à bord de la Station Spatiale Internationale. A l'aide d'un autre satellite, il va tenter de lutter contre les débris orbitaux.

Olivier Sanguy

Olivier Sanguy

Olivier Sanguy est spécialiste de l’astronautique et rédacteur en chef du site d’actualités spatiales de la Cité de l’espace à Toulouse.

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Atlantico : Le satellite RemoveDebris a été placé en orbite. Quelle est exactement sa mission et comment fonctionne-t-il ?

Olivier Sanguy : RemoveDebris est un petit satellite de 100 kg qui a été amené à bord de la Station Spatiale Internationale (ISS) avec le cargo automatique Dragon CRS-14 de la société SpaceX en avril de cette année. Toutefois, RemoveDebris est un engin européen, financé par l’Union Européenne et avec la participation de partenaires industriels comme Airbus Defence and Space, SSTL, ArianeGroup, etc. Il a ensuite été placé sur orbite le 20 juin. RemoveDebris a été conçu pour tester plusieurs solutions dites actives de lutte contre les débris spatiaux. Notons qu’en anglais, RemoveDebris veut dire enlever les débris ! Ce satellite va larguer un autre satellite bien plus petit au format CubeSat (cube de 10 cm de côté). Peu après, il enverra sur cette cible qui simule un débris spatial un filet afin de l’intercepter et ainsi essayer une première méthode de lutte contre les débris orbitaux. Cette expérience de capture avec un filet s’est d’ailleurs soldée par un succès le 19 septembre. Le fabricant de RemoveDebris, la société britannique SSTL, a confirmé cette réussite et même posté une vidéo qui montre le filet en action. RemoveDebris doit aussi prochainement tester d’autres stratégies visant à lutter contre les débris, notamment un harpon, un système de navigation d’approche des débris et enfin une large voile qui augmentera le freinage atmosphérique. Car même sur orbite, là où se trouve l’ISS à environ 400 km d’altitude, il subsiste un peu d’air. Très peu bien sûr, mais cela suffit à faire perdre très progressivement de l’altitude aux satellites. L’idée de cette voile est d’accélérer cette chute afin qu’un satellite finisse par se consumer dans notre atmosphère et ainsi éviter qu’il ne devienne un débris ou une source de débris.

La mission a sollicité des ressources humaines et économiques considérables, est-ce à dire que le nombre de débris en orbite terrestre a atteint un niveau inquiétant ? Où est-on sur ce point ? Quelle est la logique internationale, actuellement, en matière de débris spatiaux ?

En fait pas si considérables que ça. Le budget de cette mission est de 16 millions d’euros, ce qui est très modeste pour du spatial, et pris en charge par l’Union Européenne dans le cadre de son Seventh Framework Programme ou 7ème programme-cadre pour la recherche et le développement technologique. En revanche, plusieurs experts pointent le fait que le nombre de débris sur orbite est inquiétant et peut même poser des problèmes. Les plus gros débris, ceux de 10 cm et plus, ne sont pas forcément les plus dangereux car on les suit efficacement avec des radars au sol. Si nécessaire, on commande aux satellites des manœuvres d’évitement. L’ISS accomplit ainsi chaque année quelques manœuvres pour éviter une collision éventuelle. En ce qui concerne les plus petits, en-dessous de 1/10 mm, la logique est celle du blindage : les engins spatiaux sont conçus pour résister à un impact. Le risque principal vient donc des débris trop petits pour être repérés efficacement mais suffisamment grands pour causer des dégâts par exemple en perforant l’objet et an allant jusqu’à causer des pannes voire la destruction ! Ceci est la conséquence de vitesses d’impact potentiellement importantes (milliers à dizaines de milliers de km/h). On estime que si les débris de 10 cm sont au nombre de 17 000, les plus petits sont beaucoup plus nombreux, jusqu’à 100 millions pour ceux de 1 mm à 1 cm. Il faut comprendre qu’ils finissent par rentrer dans l’atmosphère, mais qu’en même temps ce processus est très lent. De plus, l’activité spatiale génère des débris. De plus, un satellite à lui seul peut hélas créer beaucoup de débris. La cause la plus spectaculaire est s’il rentre en collision avec un autre. Ce qui est déjà arrivé même si c’est fort heureusement très rare. Enfin, un satellite peut aussi créer des débris suite à certains dysfonctionnements comme l’explosion de ses batteries ou la rupture d’un réservoir. La logique internationale actuelle est donc celle des bonnes pratiques, à savoir suivre un ensemble de règles pour générer le moins possible de débris lorsqu’on lance un satellite, au cours de son fonctionnement et de prévoir que celui-ci brûle dans l’atmosphère en fin de vie ou qu’il soit placé sur une orbite cimetière. On notera que l’agence spatiale française CNES est à la pointe dans ce domaine.

Quel peut être l'impact de ce seul satellite sur la quantité de débris en orbite ? Faudra-t-il d'autres outils de ce type ? Des lancements prochains sont-ils déjà prévus ?

RemoveDebris n’est pas conçu dans l’optique d’enlever des débris, mais de tester les techniques qui permettront éventuellement à d’autres satellites de faire ce genre de travail. C’est pourquoi il va essayer différentes idées (le filet, le harpon, la voile) : scientifiques et ingénieurs décortiqueront alors les résultats pour déterminer ce qui est le plus efficace. Il y a d’autres projets, y compris certains portés par des sociétés privées qui espèrent bâtir un business model sur le service de nettoyage sur orbite. La viabilité de la démarche, à la fois sur le plan technique et économique, reste donc à prouver. RemoveDebris démontre toutefois, et c’est heureux, qu’on passe désormais à une phase de test. Pour la rentabilité, la solution pourrait être globale. Si le nombre de débris augmente au point de multiplier trop les pannes de satellites (par collision), alors il y aura un bénéfice à nettoyer l’orbite puisque la perte même partielle des capacités d’un satellite fait perdre de l’argent et parfois beaucoup ! On peut imaginer alors que tout le monde aura intérêt à nettoyer au moins partiellement l’orbite, ce qui pourrait se solder par un partage des frais pour y parvenir ?

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