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Réformer le marché du travail pour nous attirer les bonnes grâces allemandes : ce qu’on peut vraiment attendre du pari central du début du quinquennat Macron
©Tobias SCHWARZ AFP

Une idée derrière la tête ?

La préparation de la Loi Travail par La République en Marche semble avoir pour objectif de négocier une évolution de la politique européenne avec l'Allemagne. Conscient de la difficulté de négocier avant les échéances électroales allemandes, Emmanuel Macron compterait sur la mise en place de la loi travail en France pour obtenir un assouplissement de la politique européenne.

Gilles Saint-Paul

Gilles Saint-Paul

Gilles Saint-Paul est économiste et professeur à l'université Toulouse I.

Il est l'auteur du rapport du Conseil d'analyse économique (CAE) intitulé Immigration, qualifications et marché du travail sur l'impact économique de l'immigration en 2009.

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Atlantico : Qu'est-ce que la France pourrait obtenir de l'Allemagne dans la perspective d'un assouplissement de la politique européenne ? 

Gilles Saint-Paul : La France pourrait obtenir de l’Allemagne une continuation du modus vivendi qui prévalait déjà sous Hollande, c’est-à-dire un assouplissement temporaire des règles de discipline budgétaire en échange de réformes structurelles. En revanche, je ne crois pas que les Allemands soient prêts à aller plus loin en matière d’assouplissement monétaire. Leurs retraités et épargnants voient d’un mauvais œil la dépréciation qu’a connue l’Euro et ne comprennent pas pourquoi, en le laissant se déprécier encore, ils devraient endurer des pertes supplémentaires de pouvoir d’achat et le risque d’un retour de l’inflation. De même, ils mettront leur veto à toute forme de mutualisation des dettes (eurobonds, etc), d’autant que cela serait mal accueilli par les marchés. Enfin, il est peu probable qu’ils acceptent de relancer leur économie par des mesures keynésiennes, afin de résorber les déséquilibres commerciaux au sein de l’Europe, étant donné leur faible taux de chômage et leurs bonnes performances en matière de croissance.

Est-ce qu'il n'y a pas une forme d'illusion sur la volonté de changement réel de la part de Berlin ? Les changements espérés par Paris ont ils sérieusement une chance d'être acceptés ? 

Le pouvoir de marchandage de Paris sur les déficits est plus élevé qu’on le croit. Berlin et Bruxelles craignent qu’une hausse des taux et/ou des spreads ne réaniment la crise de la dette souveraine. Imposer à la France une procédure de déficit excessif, c’est attirer l’attention sur la mauvaise santé latente de nos finances publiques et risquer que les spreads s’envolent, avec la possibilité de contagion à d’autres pays de la zone Euro. Les autorités européennes seront donc tenter de fermer les yeux sur les déficits français en se contentant, comme contrepartie, de l’alibi des réformes structurelles.

Quelles seraient les conséquences dans les deux cas ? Si Berlin refuse "d'obtempérer" aux demandes françaises, Paris aura-t-il encore des marges de négociations ? Et si Berlin fait un pas en avant, que pourrait espérer l'économie française ? 

Si une procédure de déficit excessif est engagée, les taux monteront et la France peut rapidement se retrouver dans une situation où elle devra s’imposer une nouvelle cure d’austérité afin de contenir la hausse de sa dette et d’éviter qu’elle ne dégénère en crise. Si Berlin et Bruxelles nous laissent faire des déficits, le scénario le plus favorable serait celui où les dépenses publiques seraient utilisées pour compenser les perdants et adoucir la période de transition après des réformes structurelles réellement ambitieuses. Mais de la part d’un gouvernement résolument ancré au centre, je n’y crois guère. Et compte tenu du niveau de la dette publique, même en l’absence de contraintes imposées de l’extérieur, la marge de manœuvre reste faible.

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