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Reconduction de la grève : pourquoi il faut distinguer l’opposition de la CGT à la loi Travail des motivations bien différentes de SUD et FO
©Reuters

Prétexte

Alors qu'un accord sur l'organisation du travail entre la direction de la SNCF et les syndicats devaient être trouvé ce mardi, SUD et FO ont reconduit la grève tandis que la CGT s'en remet au vote des assemblées générales des cheminots. Si ce mouvement de grève est en partie lié à une opposition à la loi Travail, les organisations syndicales semblent utiliser le retrait de la loi El Khomri comme un prétexte pour obtenir des avantages.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Atlantico :  Au regard des différents conflits, et de leur résolution (ou non), que nous apprend cette reconduction de grève sur les motivations réelles des grévistes, notamment en ce qui concerne le retrait de la loi El Khomri ?

Eric Verhaeghe : Dans le cas de la SNCF, la loi El-Khomri ne peut constituer qu'un prétexte à la grève, puisque l'essentiel de la loi ne s'appliquera pas à l'entreprise de transport. D'ailleurs la convention collective du rail ne prévoit pas que la SNCF puisse signer des accords moins favorables que les accords de branche. Donc, l'article 2 de la loi ne constitue pas une menace pour les cheminots. 

A quel point peut on estimer que la loi El Khomri sert les organisations syndicales comme un argument pour obtenir certains avantages ? Y'a-t-il des mouvements dont l'existence découle directement d'une opposition à la loi El Khomri ?

La vraie raison de la grève est donc ailleurs. Son explication essentielle tient à la cascade d'accords nécessaires à la préparation de l'ouverture du rail à la concurrence d'ici à 2020. Une très improbable branche du rail, dont la SNCF est le colosse et le cyclope, a négocié une convention collective nouvelle, qui s'ajoute à ce qui avait été négocié pour le fret depuis 2007. En plus de cette convention collective de branche, la SNCF doit ajouter des accords d'entreprise, notamment sur l'organisation du travail. Voilà, pour les syndicats, deux bonnes occasions de faire monter les enchères. Une première occasion a consisté à faire monter les enchères sur la négociation de branche. La suivante sur la négociation d'entreprise. C'est précisément à cette phase que nous assistons.

Le plus curieux tient au calendrier. La direction de la SNCF a décidé d'ouvrir l'accord d'entreprise à la signature juste au début de l'Euro. Politiquement, il ne pouvait y avoir de choix plus malheureux que de faire coïncider un événement sportif national avec la conclusion d'une négociation aussi sensible. Guillaume Pépy ne pouvait ignorer qu'il tenterait le diable. Sans surprise, donc, les cheminots les plus durs, ceux de la CGT, utilisent le levier de l'événement national pour faire pression sur le gouvernement en prenant le pays et son image en otage. On peut s'en indigner, mais c'était si prévisible. 

Quelles sont les "avancées"(ou avantages) ayant été obtenues par les syndicats grâce au "point d'ancrage" El Khomri ? 

Dans la pratique, on ne peut évidemment analyser la situation autrement que comme un couac ou une manifestation supplémentaire d'amateurisme de l'équipe au pouvoir. L'ensemble s'est organisé autour d'une machine infernale, avec une obligation d'organiser les négociations d'entreprise dans la foulée des négociations de branche. Cette obligation était fixée par l'accord de branche initial. Depuis le début, c'est-à-dire depuis 2007, le patronat du rail prend d'ailleurs ce sujet à l'envers. Il a multiplié les concessions très favorables aux salariés dans le fret avant de négocier sur l'ensemble de la branche, puis a fixé un calendrier de négociation qui est royal pour la pression syndicale. 

Sur le fond, on ne peut ici mettre en cause la seule rigidité de la CGT. La responsabilité patronale est forte dans la stratégie de négociation qui était trop tentante pour les syndicats contestataires.

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