Psychologie du « pimple porn » : ce qui se passe vraiment dans le cerveau des accros aux vidéos d’éclatage de boutons<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Santé
Un homme se fait retirer un point noir
Un homme se fait retirer un point noir
©TANG CHHIN SOTHY / AFP

Du pus, du pus, du pus

Les vidéos de personnes qui éclatent leurs boutons sont très populaires sur Internet. Fascination ou dégoût, personne ne reste indifférent. Mais que se passe-t-il vraiment dans le cerveau des personnes accros à ces vidéos ?

Anne-Dorothée Taïeb Chapelon

Anne-Dorothée Taïeb Chapelon

Anne-Dorothée Taïeb Chapelon est psychologue clinicienne et docteur en psychopathologie clinique. Elle s'est toujours intéressée au rapport psyché-soma, qui dépendent l'un de l’autre. Spécialisée en psychosomatique, elle prend en charge des patients ayant des maladies de peau (eczéma, psoriasis, pelade, acné). 

Voir la bio »

Atlantico : Très populaires sur Internet, les vidéos de personnes qui éclatent leurs boutons ou points noirs fascinent toujours plus d’internautes. Une dermatologue britannique, Sandra Lee, alias Dr Pimple Popper, en a fait sa spécialité et est suivie par près de 7,5 millions de personnes. Comment expliquer que ces vidéos soient si polaires ? 

Anne-Dorothée Taïeb Chapelon : Le rapport à la peau et le fait de la toucher est un des premiers sens pour tout humain. Cette action sert à découvrir son corps et les sensations induites permettent à l’individu de se découvrir au sens large. À la puberté, sans parler d’une énorme prise de poids ou d’une acné impressionnante, on perd notre corps d’enfant. Certaines personnes mettent des années voire toute une vie avant de s’en remettre. 

L’acné est également associée à une période ou les changements hormonaux sont les plus brutaux, chez les filles comme chez les garçons. Tout ce qui est « dedans », ce qui est caché, se voit. Faire sortir le pus sert à effacer, à contrôler son image. Cette tentative de contrôle, même si elle est caduque, risque petit à petit de se ritualiser chez certains individus, ce qui peut parfois occasionner des cicatrices plus sévères ou des troubles graves, comme le repli sur soi et la peur de tout contact extérieur. 

Le fait d’extraire le pus peut également être associé à l’activité sexuelle, et bien évidemment l’éjaculation. Cela peut être, chez les garçons, associé à une sorte de concours, à savoir qui pourra faire le plus long jet. 

De plus, ce rapport à l’image de soi, primordial chez les adolescents, est exacerbé par les réseaux sociaux et les vidéos. Après toute tension, comme la sortie du jet du pus, quelque chose se passe dans le cerveau. Cela peut servir à stimuler ou exciter l’autre, ce qui peut également constituer un jeu plus ou moins pervers.

Le nombre de vues est donc lié aux facteurs d’excitation et de dégoût. Ces deux sentiments sont intimement liés. De plus, les individus peuvent se cacher pour regarder ces vidéos, et les visionner en toute intimité.  

Existe-t-il des profils types d’internautes ? Comment expliquer que certaines personnes, au contraire, trouvent cela dégoûtant ? 

Je pense que les garçons peuvent être plus facilement attirés par ces vidéos, du moins ouvertement. Les filles ont tendance à se cacher et à ressentir un sentiment de honte plus facilement. 

Les personnes dégoûtées par ces vidéos sont des individus qui les ont regardées. Parfois, il peut y avoir un attrait pour cette forme de dégoût. Ces deux sentiments, qui peuvent paraître opposés, vont souvent de pair. C’est aussi le cas pour les pulsions de vie ou de mort, le bien et le mal … Ce qui nous excite peut nous faire peur, nous stimuler, nous dégoûter. Les vidéos « trash », l’interdit, le secret ont toujours attiré. 

Un attrait pour de telles vidéos peut-il être le signe d’un certain mal-être ? 

Tout dépend. Certaines personnes attirées par ces vidéos peuvent parfois ne pas être très équilibrées. Dans certains cas, le fait de regarder ces images de manière chronique peut témoigner d’un mal-être, avec des pensées morbides et une tendance à l'enfermement. 

Pourtant, il n’est pas forcément nécessaire de s’inquiéter si votre enfant regarde de telles vidéos. Cela dépend notamment de son âge. Comme pour les vidéos à caractère pornographique, il est normal que les adolescents s'y intéressent mais le risque dépend de l'âge. Il est donc primordial de les accompagner et leur expliquer les choses plutôt que de leur faire comprendre qu’ils font quelque chose de mal. Certains individus s’expriment par le corps plus facilement que par les mots. Il faut donc étudier ces signes, sans émettre de jugement. 

Pour retrouver le site de Anne-Dorothée Taïeb Chapelon, Psyderma, cliquez ICI

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !