Pourquoi les classements des universités ne déterminent pas la réussite des étudiants<!-- --> | Atlantico.fr
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L’obtention d’un diplôme ne suffit pas toujours à enrayer les inégalités de revenus.
L’obtention d’un diplôme ne suffit pas toujours à enrayer les inégalités de revenus.
©Reuters

Self-made man

Le classement de Shanghai, publié le 17 août 2015, classe les meilleures universités du monde. Pour autant, ce n'est pas l'université ou l'école qui détermine la réussite d'un étudiant.

Boris Ménard

Boris Ménard

Boris Ménard est chargé d'études au Céreq (Centre d'études et de recherches sur les qualifications). Il est spécialiste de l'analyse des trajectoires scolaires et de l'insertion des sortants de l'enseignement supérieur, et membre du Groupe de Travail sur l'Enseignement Supérieur (GTES).

Ses dernières publications : Les jeunes diplômés de bac+5 s’estiment-ils compétents pour occuper leurs emplois? (C Calmand, J., Giret, J.-F., Lemistre, P. & Ménard, B., in Bref, Céreq, n°340, 4p., 2015) et Faire des études supérieures… Et après? (C Calmand, J., Ménard, B. & Mora, V. in Notes Emploi Formation, Céreq, n°52, 60p., 2015). 

 

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Atlantico : Une étude menée par la Réserve Fédérale de Boston démontre que les enfants pauvres qui ont suivi un cursus scolaire sans embûches ont, plus tard, un niveau de revenu équivalent à celui d’enfants issus de familles plus aisées mais n'ayant pas de diplôme secondaire. Comment expliquer l’ampleur d’un tel phénomène ? Quels sont les principaux moteurs "extra-scolaire" permettant d'en arriver à un tel résultat ? 

Boris Ménard : Cette étude montre qu’aux Etats-Unis l’obtention d’un diplôme ne suffit pas toujours à enrayer les inégalités de revenus et surtout, que les inégalités sociales se répercutent sur le marché du travail. En effet, les modalités de recrutement peuvent s’effectuer sur d’autres critères que celui du seul diplôme. C’est une des raisons pour lesquelles certains jeunes aisés et peu diplômés parviennent à atteindre des niveaux de rémunération similaires à leurs homologues plus diplômés, mais d’origine sociale plus modeste.

Ces différences d’opportunités professionnelles s’expliquent en partie par le rôle des réseaux personnels et professionnels des jeunes ou de leur famille. Pour reprendre l’exemple du Canada décrit dans l’article, 70% des enfants des 1% les plus riches sont embauchés au sein de l’entreprise familiale. On comprend donc que pour les jeunes les plus aisés, le diplôme ne soit pas toujours nécessaire pour s’insérer professionnellement.

Malgré une telle situation, les résultats scolaires permettent-ils encore une amélioration de la mobilité sociale en France ?

Oui !!! Les résultats scolaires sont LE facteur déterminant de la mobilité sociale, et d’autant plus pour les jeunes d’origine sociale modeste. L’obtention de diplôme est une condition nécessaire pour pouvoir s’élever socialement. Les résultats des enquêtes Génération en France montrent par exemple que plus le diplôme est élevé et plus le risque de chômage et de déclassement est faible. Néanmoins, cette condition n’est pas pour autant suffisante puisque même s’il décroît avec le niveau de diplôme, ce risque est présent à tous les niveaux.

Le classement de Shanghai, publié le 17 aout 2015, classe les meilleures universités du monde. Quel est l’impact du choix d’une Université ou d’une école sur la suite d’une carrière ? S’agit-il réellement d’un facteur essentiel ?

Tout d’abord, le classement de Shangai s’intéresse à la "performance" scientifique de l’établissement au niveau de la recherche. Pour les étudiants ne souhaitant pas faire carrière dans la recherche, il n’a que peu d’intérêt puisqu’il ne s’intéresse pas aux débouchés professionnels à l'issue du diplôme mais à la qualité de la production scientifique de l’établissement. Dans une de nos études, nous avons d’ailleurs montré qu'une fois neutralisés les effets du bassin d'emploi et des caractéristiques des diplômés, le choix de l’université n’avait pas d’influence sur les taux d’insertion à l’issue du diplôme. Par contre et notamment pour les établissement les plus prestigieux dont les grandes écoles, la réputation de l’établissement peut renforcer ou dévaluer la « valeur » du diplôme aux yeux des employeurs. Ce phénomène bien connu des économistes est un des objets de la théorie du signal.

Quelles sont les principales pistes à explorer afin de soutenir une plus grande mobilité sociale ?

Sur le marché du travail, il faut veiller à lutter contre les discriminations liées au genre, à l'origine nationale, au lieu d'habitation, etc.  pour ne pas freiner les velléités de carrière des jeunes les plus discriminés. D'une manière générale et dans le champ de l'éducation, il faudrait dépasser le principe d'égalité des chances qui n'a que peu réduit les inégalités d'accès à certains niveaux de diplôme ou à certains établissements. En effet, les jeunes d'origine plus modestes, même s'ils sont de plus en plus nombreux à entreprendre des études supérieures, restent sous-représentés et pour partie, cantonnés dans les filières ou les formations du supérieur les moins valorisées sur le marché du travail.

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