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Petit rappel sur le sens chrétiens de la fête de Noël à ceux qui ne voient plus que les cadeaux
©PHILIPPE LOPEZ / AFP

Fondamentaux

Partage, charité, recueillement... Noël est bien plus qu'une simple fête où l'on s'offre des cadeaux.

Bertrand Vergely

Bertrand Vergely

Bertrand Vergely est philosophe et théologien.

Il est l'auteur de plusieurs livres dont La Mort interdite (J.-C. Lattès, 2001) ou Une vie pour se mettre au monde (Carnet Nord, 2010), La tentation de l'Homme-Dieu (Le Passeur Editeur, 2015).

 

 

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Atlantico : Noël est une fête chrétienne, qui marque la naissance de Jésus une nuit à Bethléem. Quel est le sens originel à donner à ce moment important de la vie chrétienne ?

Bertrand Vergely : Dans la vision que les hommes ont de la réalité, il y a trois perceptions possibles de celle-ci. 
     La première, la plus courante consiste à penser que la réalité se limite à la vie matérielle et humaine. Il s’agit là de la vision matérialiste, humaniste et athée qui aujourd’hui prévaut dans notre monde. 
     La seconde vision consiste à penser qu’il existe un principe supérieur d’existence au-delà du monde matériel et humain. Il s’agit là de la vision monothéiste qui peut prendre diverses formes On la trouve dans l’idéalisme et le réalisme des Anciens en Grèce. Elle est présente dans le judaïsme et dans l’islam.  On la trouve dans la vision moderne d’un Dieu horloger commee chez Voltaire, ou bien dans le Grand Tout organisateur des néo-gnostiques du new age. Dans tous les cas, bien que ce principe premier puisse prendre des formes très diverses, on a affaire à la même idée : un principe organisateur premier supra-mondain et supra-humain. 
     Enfin, il y a une troisième vision possible qui est la vision proprement chrétienne laquelle consiste dans l’idée que non seulement il existe un principe organisateur source de toute chose mais que ce principe ou Dieu s’est fait homme. Ce qui est une révolution. 
     Les êtres humains aspirent à une forme de perfection. C’est un fait universel traversant toutes les cultures depuis leur origine. Quand on vit dans la perfection, la vie est sauvée. Elle vaut la peine d’exister. Il vaut la peine qu’on existe. Il est vital de se perfectionner. Un problème se pose cependant : comment se perfectionner ? 
     Quand on a affaire à une approche courante, on est condamné à l’idéalisme. Au héros, au surhomme et au trans-humain pour les démarches matérialistes, humanistes et trans-humanistes. Ou à la religion idéale pour les démarches monothéistes. Avec l’idée que Dieu se fait homme tout change. 
     Nul besoin d’idéal, d’idéalisme, de héros, de surhomme, de trans-humain, de religion idéale, le salut se trouvant au fonde de la matière et de l’homme. Le salut, la perfection sont présents dans le monde comme dans l’homme de toute éternité. C’est la nouvelle inouïe que vient apporter la naissance du Christ. D’où l’idée totalement subversive comme quoi il n’y a pas à sauver le monde ainsi que l’homme. Ils sont sauvés. 
     Bien sûr, pour nous qui vivons dans de grandes difficultés, cette idée apparaît comme surréaliste. Et pourtant, c’est là l’idée la plus sage et la plus juste qui soit. Regardons nous. qu’est-ce qui crée le chaos dans lequel nous vivons ? Le fait de vivre dans la peur et de désirer nous sauver par nos propres moyens. Qu’est-ce qui nous sauve ? Le fait de laisser agir le salut qui est à de toute éternité. 
     Les structures de tout ce qui existe comme de l’humanité sont parfaites à un point qu’on ne peut pas imaginer. Le Christ est venu le confirmer. La vie humaine qui est fragile et mortelle n’est pas un obstacle pour la vie divine. Au contraire. 
     Un jour quand nous vivrons un Noël de la connaissance et de l’économie nous découvrions les structures parfaites de l’existence. Nous cesserons de nous agiter comme nous le faisons et nous ferons miracle sur miracle. Seule notre incrédulité et notre ignorance nous empêchent d’accéder aux structures divines de notre être comme de toute chose. 

Noël véhicule un certain nombre de valeurs chrétiennes, dont le partage, la charité, c'est aussi un moment de recueillement. D'où vient l'idée de faire des "cadeaux" et que signifiait, à l'origine, ce geste ? N a-t-il pas été un peu galvaudé aujourd'hui ?

Le christianisme est fondé sur la vérité, cette vérité résidant dans la structure divino-humaine de l’humanité. Ceci veut dire que l’homme est un être autant lié au visible qu’à l’invisible, à l’humain qu’au du divin. Quand on aborde l’existence il importe de toujours respecter ce principe d’équilibre. Si il y a partage sur le plan visible il doit y avoir partage sur le plan invisible. S’il y a nourriture ou don sur le plan visible il doit y avoir nourriture et don sur le plan invisible. On devrait toujours respecter cet équilibre divino-humain. Il s’avère qu’on ne respecte pas. D’où la crise morale endémique que connaissent nos sociétés, le divin étant sans cesse sacrifié sur l’autel de la matière et de l’humain. 
     Nous vivons actuellement en pleine régression. Et, pour tout dire, nous marchons sur la tête. Quand on ne vit pas les structures divines de la matière comme de l’homme,  ne connaissant pas la perfection, on vit dans le manque et la frustration. Vivant dans le manque et dans la frustration on se rassure avec un déluge de nourriture et de cadeaux. La vraie nourriture se trouve dans la connaissance. Quand on ne se nourrit pas de connaissance, on se venge sur la nourriture et sur l’alcool. Quant aux cadeaux, réactivant le rite du don et du contre-don leur but est d’apaiser la violence. Comme nous ne vivons pas les structures parfaites de notre humanité, nous sommes menacés par la violence. Comme nous sommes menacés par la violence, nous anticipons celle-ci par des rituels de don et de contre don. Dans les sociétés humaines, des plus primitives aux plus modernes, le gaspillage sert à défouler la violence collective. C’est ce à quoi nous assistons. Noël pourrait être une fête de la lumière.  Noël devrait être une fête de la lumière. Notre monde qui a perdu ses racines divines et christiques et qui s’en félicite a transformé cette fête extraordinaire en un moment de ripailles sur fond de tribalisme social et familial. La fête de la lumière qu’est Noël est devenue une fête sans lumière. Il suffit d’écouter les medias en ces temps de Noël. L’homme important devrait être le Christ. C’est le chef cuisinier d’un grand restaurant ou le marchand de jouets video. Cet accent mis sur la matière est révélateur. On ne donnerait pas autant d’importance à la matière si inconsciemment on n’était pas gêné. On est inconsciemment gêné. Il y a quelque chose de faux dans ce déluge de matière. C’est dommage, c’est triste de passer Noël avec de la gêne dans le cœur. 

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