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Paralysie en vue à la Maison Blanche : qui aurait intérêt à un Donald Trump cantonné à ses tweets ?
©Reuters

Gouvernement profond

Difficultés à abroger l'Obamacare, difficultés concernant la construction du mur à la frontière mexicaine, chaos apparent à la Maison Blanche... Les six premiers mois de Donald Trump peuvent laisser penser à une absence de présidence.

François Durpaire

François Durpaire

François Durpaire est historien et écrivain, spécialisé dans les questions relatives à la diversité culturelle aux Etats-Unis et en France. Il est également maître de conférences à l'université de Cergy-Pontoise.

Il est président du mouvement pluricitoyen : "Nous sommes la France" et s'occupe du blog Durpaire.com

Il est également l'auteur de Nous sommes tous la France : essai sur la nouvelle identité française (Editions Philippe Rey, 2012) et de Les Etats-Unis pour les nuls aux côtés de Thomas Snégaroff (First, 2012)

 


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Atlantico : Depuis l'investiture de Donald Trump il y a six mois, le nouveau Président peine à diriger le pays selon ses souhaits, de l'Obamacare aux difficultés annoncées pour la construction du mur à la frontière mexicaine, un processus législatif totalement bloqué, des postes d'administration non pourvus etc...Dans le cas ou cette Présidence ce poursuivait ainsi, laissant penser justement à une absence de Présidence, quels en seraient les principaux bénéficiaires, aussi bien en termes d'institutions que de personnes (Le congrès, les Etats, les lobbys, une personnalité politique...) ?

François Durpaire :   Il faut nuancer le tableau qui est fait du début du mandat de Donald Trump. Bien sûr il ne faut pas en faire un tableau idyllique mais le processus n'est pas bloqué définitivement. La chambre des représentants a voté le budget pour le mur à hauteur d'1,6 milliards. En revanche ça patine sur la question du budget ce qui peut laisser augurer un possible blocage de l'état fédéral pour la rentrée.

Ensuite,  tous les présidents ont des difficultés à faire avancer les choses dans le domaine législatif. Par exemple les menaces de "shutdown" on les a connu sous presque tous les présidents. Quand on regarde le nombre de lois que les présidents ont fait passer au congrès on peut relever que Bush junior n'en a fait passer que 48%. Reagan n'en a fait passer que 40%... Il faut donc prendre de la distance par rapport à ce début de mandat qu'il ne faut pas juger définitivement comme étant quelque chose d'inconnu dans l'Histoire du pays.

La particularité de ce début de mandat c'est que Trump dispose de la majorité au Sénat et à la chambre des représentants. Les difficultés sont étonnantes du fait qu'il a la majorité pour lui dans les deux cas. On aurait pu penser effectivement à une avancée plus grande.  L'échec de la révocation d'Obamacare est très révélateur. Les sénateurs sont en train de changer leur priorité législative, de passer de la question de l'assurance santé à la question de la "Tax Reform (réforme des impôts), peut-être de manière stratégique en se disant qu'ils vont d'abord essayer d'avoir cette  première victoire pour ensuite revenir à la question d'Obamacare. Le sénateur républicain Roy Blunt a fait des déclarations en ce sens.  

On constate que dans les institutions américaines, le principe des vases communicants. Quand un pouvpoir a moins de poids, le pouvoir d'à côté prend plus de force. Le congrès est en train de prendre la main en matière de politique étrangère, on l'a bien vu lors des dernières semaines. Ensuite, à l'intérieur du pouvoir exécutif on peut envisager à terme un effacement du président au profit d'autres forces à l'intérieur de l'exécutif, peut-être les militaires (qui ont une place importante dans le gouvernement Trump). Vendredi dernier, avec la nomination de John Kelly qui est véritablement le "chief of staff", c'est-à-dire le patron de l'organisation des équipes de la Maison Blanche qui a demandé à ce que toutes les équipes soient au garde à vous. On peut se demander alors si Trump lui-même acceptera de laisser la place à celui qu'il appelle "my general" pour qui il a beaucoup d'admiration  au profit d'une plus grande efficacité de l'administration.

Et derrière les militaires, le poids des militaiores sur l'exécutif un effacement de TRump pourrait bénéficier aux lobys militaro-industriels...

Qu'est ce qu'une telle situation révèle de l'importance, de l'utilité finalement de l'Etat fédéral aux Etats Unis ? 

Encore une fois il est un peu tôt pour affirmer l'effacement d'une présidence américaine sous Donald Trump. Certes il y a des disfonctionnements mais depuis la nomination de Kelly on pourrait assister à une reprise en main de la Maison Blanche. John Kelly pourrait être le Leon Panetta de Trump.

C'est le même principe de vases communicants. Quand l'Etat fédéral est en retrait, les Etats fédérés ont plus de marge de manœuvre. Il y a cette tradition de conflit même parfois entre les Etats fédérés et l'Etat fédéral, on peut citer Obama avec le Texas pendant tous ses mandats et aujourd'hui la Californie sur plusieurs domaines, dont la question environnementale et sur les questions migratoires qui n'a pas hésité à montrer les muscles face à Donald Trump. Il y a donc des Etats dans l'Etat mais dans le cadre d'un pays fédéral comme les Etats-Unis, il n'y a rien de choquant à ce qu'ils officient en tant que contrepouvoir. La question du poids des Etats s'est toujours posée pour les Etats-Unis

Qui aurait le plus à perdre d'un tel effacement  ?

La période dans laquelle on vit est une période dans laquelle il y a des tensions fortes. La Corée du Nord a montré vendredi avec son missile intercontinental qu'elle était en mesure d'atteindre le territoire américain. Dans ce contexte une ^présidence capable de prendre des décisions est crucale aujourd'hui. Ce qui est le plus à perdre c'est la sécurité du monde car avoir une Maison Blanche en ordre de marche capable de prendre des décisions est indispensable.

On peut aussi craindre l'idée que Donald Trump, s'il se sent affaibli pourrait prendre des décisions visant à rétablir une impression de force alors que les décisions raisonnables sont celles que l'on prend dans la sérénité. Il faut que cette Maison Blanche trouve des modalités de fonctionnement qui puissent aboutir à des décisions fermes et surtout pas prises à l'emporte-pièce.

Beaucoup de gens aujourd'hui se posent la question de la réaction de Donald Trump si une crise de l'ordre de celle des missiles de Cuba ou du 11 septembre apparaissait sous sa présidence.

Il y a donc un double risque à une présidence effacée. D'abord au niveau extérieur avec les alliés des Etats-Unis qui pourraient en pâtir mais aussi d'un point de vue intérieur lorsque l'on aborde la question des capacités de défense, de protection en cas de crise. 

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