Ozempic : le traitement médical emblématique de la révolution anti-obésité<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Santé
L’Ozempic, un traitement médical, a été utilisé massivement contre l’obésité notamment aux Etats-Unis.
L’Ozempic, un traitement médical, a été utilisé massivement contre l’obésité notamment aux Etats-Unis.
©JOEL SAGET / AFP

Miracle ou miroir aux alouettes ?

L’Ozempic, un traitement médical, a été massivement utilisé contre l’obésité notamment aux Etats-Unis. Mais ce médicament constitue-t-il l'alpha et l'omega de la lutte contre l'obésité ?

Réginald  Allouche

Réginald Allouche

Réginald Allouche est médecin et ingénieur. Il assure une consultation principalement axée sur la nutrition et la prévention du diabète de type II. Réginald Allouche a notamment publié en 2022 La nouvelle méthode anti-diabète chez Flammarion et La Méthode hépato-détox aux éditions Albin Michel.

Voir la bio »

Atlantico : L’Ozempic, un traitement médical, a été utilisé massivement contre l’obésité notamment aux Etats-Unis. En quoi consiste ce traitement ? A-t-il été détourné de son utilisation initiale ? Etait-ce à la base un antidiabétique ?

Réginald Allouche : Au départ, l’Ozempic était destiné aux diabétiques car il a trois caractéristiques. Il agit sur la sécrétion d’insuline qu’il améliore pour les diabétiques de type II, qui sont les plus nombreux. Ce médicament permet, pour ceux qui ont encore de l’insuline, un pancréas plus réactif, d’améliorer leur sécrétion d’insuline. Cela permet de mieux équilibrer le diabète. L’Ozempic (le sémaglutide) fait partie d’une catégorie de médicaments qui s’appelle les agonistes GLP-1. Ces agonistes sont sécrétés naturellement au niveau de l’intestin et du pancréas lorsque votre glycémie augmente. Cela permet de mimer ce qu’il se passe dans le tube digestif.

L’Ozempic agit aussi au niveau cérébral sur le circuit de récompense, le noyau accumbens qui va sécréter de la dopamine lorsque l’on est content et que l’on mange. Il va là aussi servir de régulateur permettant d’avoir un système de récompense qui est beaucoup moins exigeant.

L’Ozempic régule aussi la vidange gastrique. L’estomac se vide moins vite. Cela donne l’impression d’être rassasié plus tôt et la faim est moins importante.

Ce médicament permet probablement de réduire le phénomène de foie gras. Ce traitement a une action sur la  stéatose hépatique.

Aujourd’hui, 80 % des obèses sont diabétiques. Ce traitement peut donc aider un grand nombre de patients qui souhaitent perdre du poids ou qui sont diabétiques.

Mais l’Ozempic a un inconvénient. Entre 30 et 40 % des gens qui le prennent vont avoir des effets indésirables comme de la diarrhée, des constipations, des crampes intestinales. Au bout d’un an, 30 à 40 % des patients ne le supportent plus. Comme tous les médicaments qui sont efficaces, il a des effets indésirables. Il ne faut donc pas commencer par des grosses doses tout de suite. Il faut faire des paliers.

Est-ce que l’Ozempic est un traitement réellement miracle ou un miroir aux alouettes ? Quels sont les bénéfices / risques pour les patients ? L’Ozempic s’inscrit-il dans la tradition des précédents traitements contre l’obésité ?

Dès que l’on parle d’obésité, nous avons en tête tous les médicaments miraculeux qui ont été vendus ainsi et qui ont des effets indésirables. L’Ozempic est un vrai plus dans le traitement du diabète. La référence pour un diabète est l’hémoglobine glyquée. Cela correspond à un pourcentage qui vous permet de savoir dans les trois derniers mois quelle a été la valeur moyenne des glycémies. L’hémoglobine glyquée normale est inférieure à 5,7 %. Entre 5,7 % et 6,4 % c’est le pré-diabète. Au-dessus de 6,4 % il s’agit du diabète de type II installé. L’Ozempic est un vrai traitement efficace. Il n’a rien de miraculeux.

Aux Etats-Unis, l’autorisation de mise sur le marché a été donnée d’emblée pour le diabète et pour l’obésité. L’Ozempic va vous faire perdre en moyenne 5 à 10 % de votre poids. Mais si vous l’avez arrêté et que vous n’avez pris aucune des mesures diététiques et d’exercice physique, vous reprendrez votre poids ipso facto.    

Selon le New York Times, le succès de l’Ozempic et des traitements contre l’obésité sont tels qu’ils représentent une vraie aubaine et des sommes importantes à l’économie du Danemark. Faut-il s’en inquiéter ? Qu’est-ce que cela nous dit sur les habitudes de consommation des patients et sur l’industrie pharmaceutique ?

L’industrie pharmaceutique a pour mission de vendre des produits sûrs et efficaces. Novo Nordisk est assis sur un tas d’or après avoir développé ce produit.

Economiquement, il y a dans le monde 795 millions de diabétiques. Le diabète est un vrai drame. Cette épidémie est hors de contrôle. Dans beaucoup de pays, près d’un adulte sur deux est en pré-diabète. Et la prévention est quasi-inexistante. Les Etats devraient faire beaucoup plus de prévention. 70 % des pré-diabétiques deviendront diabétiques dans les dix ans. Les personnes qui sont entre 5,7 % et 6,4 %, s’ils font 150 minutes d’exercice par semaine et s’ils perdent 5 à 10 % de leur poids, diminuent par 2 les risques d’avoir un diabète.

Il n’est pas possible de jeter l’opprobre sur les laboratoires pharmaceutiques. Les agonistes du GLP-1 sont une véritable aubaine pour les diabétiques.

Le diabète est la première cause de cécité, d’amputation non traumatique, d’impuissance, de neuropathie… Les agonistes du GLP-1 sont une véritable avancée.

Un autre laboratoire, américain, s’apprête à sortir un autre médicament, le Mounjaro, supérieur à l’Ozempic. Les patients perdent en moyenne 15 à 20 % de leur poids avec ce traitement. Et il réduit la glycémie de manière plus parfaite. Ce n’est donc que le début de l’histoire de cette classe de médicaments.

Mais en arrêtant les traitements, il est possible de reprendre du poids et de voir la crainte du diabète revenir. Il est donc important de changer d’habitudes alimentaires, de pratiquer des exercices physiques régulièrement et de prendre les traitements.

D’après le New York Times, l’Ozempic est très consommé dans les quartiers les plus riches et qui ont le moins de problèmes de santé à New York. La prise d’Ozempic ne souligne-t-elle pas une dérive de certains patients en bonne santé et qui souhaiteraient être toujours plus maigres ?

L’Ozempic en France est vendu à 80 euros par mois. Aux Etats-Unis, cela coûte 800 dollars. Les plus riches peuvent se le payer Outre-Atlantique ou les titulaires d’une assurance privée. Cette demande des patients s’inscrit dans un phénomène de diktat de la minceur.

Mais le vrai problème est qu’aucune régulation n’existe pour la quantité de sucre que nous mettons dans les bonbons de nos enfants. Les médicaments sont réglementés...pas le sucre.    

Le Daily Mail évoque le fait que l’Ozempic permettrait de réduire la dépendance à l’alcool, au tabac et même aux jeux. Est-ce crédible et possible ? Cela veut-il dire que ce traitement a un impact sur le plan neurologique ?

Cela concerne des publications récentes. A partir du moment où vous jouez sur le circuit de récompense, vous allez réguler cette pratique et tout ce qui vous donne des récompenses comme l’alcool, la cigarette, le sucre, la drogue. Les parties qui concernent l’appétit, le plaisir et la satiété dans notre cerveau sont extrêmement frustres et concernent très peu de neurones. Lorsqu’un médicament agit sur cette partie du cerveau, il peut alors travailler sur des systèmes de récompense annexes comme le tabac ou l’alcool. Il faut encore travailler ce sujet.

Y a-t-il une forte demande pour l’Ozempic en France ? Connaissons-nous la même frénésie de consommation que dans les pays anglo-saxons ?

Il y a une vraie demande pour l’Ozempic en France. La CNAM a vérifié les ordonnances. Il y a un vrai suivi des pharmaciens car le produit est remboursé dans son indication.

En France, l’Ozempic n’a pas l’indication pour le traitement de l’obésité. Il n’a d’indication, selon l’ANSM, que pour le traitement du diabète de type II en l’association avec la Metformine, qui est le médicament de référence. Il n’est donc pas possible d’utiliser l’Ozempic n’importe comment en France. Novo a sorti deux médicaments en France. Le Saxenda que l’on s’injecte tous les jours. Un autre est en cours d’autorisation, le Wegovy. Cela concerne la même molécule, le Sémaglutide.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !