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« Méga-usines », une opportunité pour la France de se réindustrialiser
©AFP

Réelle opportunité

Clément Perrin

Clément Perrin

Clément Perrin est directeur adjoint du Millénaire. 

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Guillaume Gau

Guillaume Gau tient le site Chroniques occidentales et est contributeur au think-tank Le Millénaire.

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La France fait face à de nombreux échecs ces dernières années

La France peine à accueillir des projets industriels supérieur à 500 M€ porté par des capitaux majoritairement étrangers et faisant l’objet d’une compétition entre pays. A titre d’exemple, Tesla a implanté sa gigafactory européenne et ses 12 000 emplois près de Berlin (jusqu’à 13 Md€ d’investissement). Quant à la fabrication de semi-conducteurs, Intel investira 17 Md€ pour construire sa prochaine usine européenne dans l’Est de l’Allemagne. TSMC aurait également choisi l’Allemagne pour implanter sa future megafab européenne de semi-conducteurs. 

Si la France est depuis plusieurs années le pays qui reçoit le plus grand nombre d’investissements industriels étrangers en Europe, les projets français sont moins créateurs d’emplois et sont plus souvent des extensions de site que chez nos voisins comme le montre le Baromètre EY de l’attractivité 2022. Les projets d’implantations industrielles qui ne sont pas des extensions de sites existants, dit « greenfields », représentent plus des trois quarts des projets en Allemagne ou au Royaume-Uni. Malheureusement, leur part est de moins d’un tiers en France. Même si les mesures d’attractivité prises ces dernières années (baisse de l’IS, CICE, réforme du marché du travail) ont favorisé les investissements étrangers en France, de nombreux freins persistent tels des délais d’implantation plus longs que chez nos voisins ou une imposition encore trop lourde.

L’année 2023, année pivot avec cinq « méga-usines » à l’étude en Europe

L’année 2023 est l’opportunité d’une séance de rattrapage industrielle unique avec cinq entreprises étrangères qui ont pour projet d’investir au moins 1 Md€ dans la création d’une usine en Europe. La France semblerait être bien placée pour accueillir deux de ces grands investissements industriels même si rien n’est fait à ce jour. Le premier est porté par Moderna qui souhaiterait investir 1 Md€ pour construire une usine de vaccins dans l’Union Européenne mais l’entreprise réclame un engagement sur le long terme de la part de l’Etat à acheter la production de l’usine. Le second est un projet de Prologium, fabricant taiwanais de batteries solides, qui souhaite construire une usine à 4,5 Md€ en Europe avec plus de 5 000 emplois potentiels. Mais Prologium a également un projet d’usine aux Etats-Unis et l’Inflation Reduction Act pourrait pousser l’industriel à prioriser la future usine américaine. Une réponse européenne est plus que jamais nécessaire sous forme d’assouplissement du contrôle des aides d’Etat et de fléchage des fonds du plan de relance européen vers les industries à zéro émission. 

Le secteur automobile sera également porteur de grandes implantations industrielles en 2023. En effet, deux constructeurs asiatiques de voitures électriques souhaitent implanter une usine en Europe. Le premier est le vietnamien Vinfast, constructeur de SUV électriques premium, qui hésiterait entre l’Allemagne, l’Italie et la France pour sa première usine européenne. Le second est le constructeur chinois BYD, qui s’apprête à devenir le premier constructeur mondial de voitures électriques, et qui a récemment annoncé vouloir construire deux usines en Europe. Pour la France, accueillir une usine d’assemblage comme elle a su le faire en 2001 avec Toyota Valenciennes serait l’occasion redynamiser la production automobile française et de réduire un déficit commercial automobile qui a atteint 20 Md€ en 2022. Enfin, le géant sud-coréen Samsung electronics souhaiterait construire une megafab de puces électroniques en Europe. 

Faire de la France la terre d’accueil européenne des méga-usines

Pour maximiser les chances d’accueillir ces grands investissements industriels en France, l’action publique peut être décisive à plusieurs niveaux. Si la France a raté les usines Tesla et Intel, c’est en partie parce qu’elle n’a pas été capable de proposer des terrains de grande taille rapidement constructibles. Ces délais administratifs nous coûtent des milliards d’investissements et des milliers d’emplois. La loi « industrie verte » qui sera dévoilée au printemps doit comporter des dispositions en ce sens, en s’inspirant du rapport Guillot « Simplifier et accélérer les implantations d'activités économiques en France ». Ensuite, la France détient un atout précieux pour attirer les grands sites industriels : son parc de réacteur nucléaire. Il permet de fournir une électricité décarbonée et à faible coût de production (60 €/MWh). Indépendamment de la réforme du marché européen de l’électricité et dans l’objectif d’améliorer nos chances d’accueillir de grands investissements industriels, le gouvernement pourrait proposer des contrats de gré-à-gré de 10 ans ou plus à des industriels qui hésitent à implanter une « méga-usine » en France. 

Pour combler son déficit commercial massif et conserver une taille critique industrielle, la France doit devenir la terre d’accueil européenne des méga-usines afin de se positionner sur les industries qui feront la souveraineté de demain et la prospérité des années 2030 et 2040. Les 5 projets mentionnés, dont la sélection du lieu d’implantation devrait être effectuée en 2023, sont représentatifs des industries clés des futures décennies : vaccins ARN, véhicules électriques ou semi-conducteurs. Ils représentent 25 Md€ d’investissements et 12 000 créations d’emplois. Le prochain sommet Choose France, prévu en mai, sera l’occasion d’un premier bilan d’étape.

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