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Les professionnels de l’assurance-vie ou de l’immobilier parient sur un échec de la réforme des systèmes par répartition
©JOËL SAGET / AFP

Atlantico Business

Les professionnels de l’assurance-vie et des complémentaires ou même du placement immobilier se frottent les mains. Un échec de la réforme du système obligatoire ne ferait qu'accélérer l'adoption des produits d‘assurance retraite fondés sur la capitalisation ou l’immobilier.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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En s’opposant bec et ongles à la réforme du système de retraite, Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ne s’en rendent peut-être pas compte, mais ils vont accélérer la faillite du système actuel de prévoyance retraite. Par conséquent, ils vont, de fait, pousser les Français vers des régimes individuels et privés de retraite, ce qu’ils font déjà partiellement. 

Les professionnels de l’assurance, qu’ils gèrent des sociétés privées ou des mutuelles, se frottent discrètement les mains. Les spécialistes du placement immobilier également. Merci Monsieur Mélenchon, merci Mme le Pen. 

La réforme du système actuel de retraites s’est imposée progressivement pour une seule raison : le rééquilibrage du régime par répartition, compte tenu des évolutions structurelles pour le sauver. 

Nicolas Sarkozy avait le premier tiré le signal d’alarme.  François Fillon en avait fait l’axe prioritaire de sa campagne électorale. François Hollande avait botté en touche, compte tenu de la sensibilité de l’opinion à tout ce qui touche à la retraite. Ce fut une erreur. Emmanuel Macron avait lui aussi ouvert le dossier en réussissant à gommer certains régimes spécifiques, mais il avait reporté la réforme de fond, compte tenu d’une opinion publique déjà passablement inquiète par la Covid

Bref, la réforme des retraites s’est imposée, au même titre que le pouvoir d’achat, dans la campagne électorale, quand Emmanuel Macron lui-même avait fait du report de l’âge de départ à la retraite à 65 (ou 64 ans) une priorité de son deuxième mandat

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Pour l’extrême gauche de Jean-Luc Mélenchon ou pour l’extrême droite de Marine Le Pen c’était une aubaine. L’âge de départ en retraite est devenu un totem intouchable.

Aujourd’hui, le président de la République a visiblement choisi d’attendre que le gouvernement s’installe et que la majorité soit confirmée à l’Assemblée nationale pour ressortir le projet. 

Ce dont on ne se rend pas compte, c’est que la réforme du système actuel est absolument indispensable si on veut le sauver

Ce système fonctionne sur un principe très simple : les actifs travaillent, paient des cotisation retraites qui permettent de financer les pensions de ceux qui ne travaillent pas ou plus. C’est un pur produit des concepts mélangés de solidarité et de justice sociale. 

Dans cette équation, tout a été calculé pour qu’il puisse être équilibré et par conséquent, fonctionner. L’âge légal de départ à la retraite (62 ans), la durée de cotisations pour avoir une retraite à taux plein, le montant des cotisations payées conjointement par le salarié et par l’employeur, et enfin le montant des pensions versées. 

En revanche, certains paramètres, eux, ne dépendent pas des responsables de l’assurance retraite :  le nombre d’actifs qui cotisent dépend de l’activité économique et des risques du chômage, la durée de vie dépend de la science et des conditions de vie, mais ce que l’on sait, depuis l’époque où le système a été mis en place, l’espérance de vie a augmenté de presque 30 ans. Ça veut dire qu‘aujourd’hui, on entre dans le vie active plus tard qu‘autrefois parce que les études sont plus longues (et c’est bien), qu’il y a parfois moins d’actifs en activité parce qu‘il y a du chômage, et enfin qu’on reste en retraite beaucoup plus longtemps parce qu’on vit plus longtemps. 

Le résultat est simple. Les rentrées de cotisations sont insuffisantes pour couvrir les pensions ; d’autant moins que pour des raisons d’équité, il faut aussi revaloriser les pensions de retraites.  Cette année, le régime de retraite aura besoin de 30 milliards pour financer son équilibre et les pensions promises. Et l’année prochaine et l’année d’après. L’Etat devra faire la soudure. C’est évidement intenable parce qu’on ne peut pas demander aux contribuables de faire l’ajustement. Ça changerait d’ailleurs complètement la nature du système par répartition pour le transformer en régime de redistribution, ce qui serait très différent. 

Face à une telle équation, les responsables des caisses de retraites, s’ils veulent sauver ce régime par répartition ont quatre solutions. 

Première solution : ils peuvent demander un relèvement des cotisations retraites. Mais ni les chefs d’entreprises, ni les salariés accepteront actuellement de raboter les marges ou les pouvoirs d’achat.  Donc c’est a priori exclu. 

Deuxième solution : ils peuvent réduire les pensions de retraites mais politiquement, dans des sociétés occidentales où les retraités sont très nombreux, on voit mal quel politique osera mettre en place ce projet. C’est là encore impensable. 

Troisième solution, reculer l’âge légal de départ à la retraite et le porter à 65 ans comme dans la plupart des pays européens. 

Quatrième solution, on peut toujours panacher tous ces éléments mais on s’attaquera toujours à l’âge de départ à la retraite, devenu pour l’opposition un totem et comme tous les totems, celui-ci est intouchable. Y compris si on tient compte de toutes les particularités qui méritent d’être étudiées pour modifier à la marge les principes de fonctionnement. 

Le gouvernement d’Elisabeth Borne va donc au conflit et mieux vaut reporter le « possible » conflit à la rentrée de septembre en espérant un miracle. 

Mais ne rêvons pas, si on manque cette réforme, le système par répartition va s’asphyxier progressivement et s’éteindre. Si on veut continuer de verser des retraites à taux plein, le plus tôt possible, à des inactifs toujours plus nombreux, on ira dans le mur avec la faillite du système, obligeant les actifs à préparer leurs retraites individuellement.

Le miracle de la réforme serait de laisser les salariés s’organiser librement. Prévoir une retraire de base minimum et obligatoire certes, mais pour le reste, faire confiance aux outils de l’épargne individuelle. 

Ces outils d’épargne destinés à servir une retraite complémentaire existent. 

Les assurances complémentaires ou les assurances-vie ont des offres multiples. Les spécialistes du placement immobilier sont légion et peuvent offrir soit de l’immobilier en pierre, soit de l’immobilier papier à tous ceux qui cherchent à placer de l'argent en toute sécurité. Et la sécurité sera sans doute mieux garantie que la retraite par répartition en risque d’étouffement. 

A la limite, on peut aussi imaginer des plans de retraites par capitalisation qui permettent à ceux qui veulent placer leur épargne pour se ménager une retraite. Les boomers ne l’ont pas fait et ils en paient le prix aujourd’hui, avec des retraites en peau de chagrin. Les enfants de boomers connaissent bien la capitalisation, soit par leur entreprises (beaucoup commencent à en offrir), soit par les banques et les assurances. 

L’achat d’un bien immobilier permet aussi de se protéger. Sauf qu’il demande une mise de fond assez conséquente et une gestion locative qui demande du temps. 

Mais globalement, l’épargne des Français est abondante. Le total de l’épargne liquide et disponible place sur des livrets A, dans des comptes courants ou même sous les matelas avoisine les 300 milliards d’euros. C’est une façon de préparer sa retraite mais ça n’est sans doute pas la plus efficace. 

Les professionnels de l’assurance-vie et les spécialistes du placement immobilier ou de SCPI ont raison de se frotter les mains. 

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