Les clés pour comprendre la tempête sur le franc suisse et ce que cela nous apprend sur la fragilité de l’euro<!-- --> | Atlantico.fr
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La Banque nationale suisse a décidé d’en finir avec sa politique de relance.
La Banque nationale suisse a décidé d’en finir avec sa politique de relance.
©Reuters

Petit-suisse-ide économique

Alors que le niveau du franc suisse était resté parfaitement stable par rapport à l’euro depuis septembre 2011, la Banque nationale suisse a décidé d’en finir avec sa politique de relance. Les conséquences furent immédiates avec une hausse de 15% de la valeur du franc et une cascade de révisions à la baisse pour la croissance du pays.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Au mois de septembre 2011, alors que l’économie suisse subissait les méfaits du délitement progressif de la zone euro, et voyait sa monnaie, le franc suisse, progresser à un rythme insoutenable pour le pays, la Banque nationale suisse avait alors choisi de se battre. En établissant un cours plafond de 1.20 franc suisse pour un euro, et en indiquant que la banque centrale helvétique créerait autant de monnaie que cela est nécessaire pour que cette limite ne soit pas franchie, la BNS (Banque Nationale Suisse) bloquait toute spéculation. De facto, cette décision faisait de la BNS une planche à billets.

Les résultats ont été au rendez-vous. Depuis cette date, la limite n’aura jamais été franchie, et l’économie suisse a pu continuer de prospérer. En décembre 2014, le chômage atteint 3.4% de la population active, une performance enviable au regard de la configuration économique mondiale. Puis, ce jeudi 15 janvier, l’autorité monétaire suisse a pris la décision d’en finir avec ce lien qui l’unissait à la zone euro. Cette décision, qui fut une surprise totale pour les marchés financiers, peine pourtant à trouver de solides justifications.

Mais c’est la forte baisse de l’euro par rapport au dollar, entraînant le franc suisse dans sa chute, et la probable mise en place d’un assouplissement quantitatif par la Banque centrale européenne le 22 janvier prochain, qui ont eu raison de cet arrimage contre nature. La Banque nationale suisse a préféré abandonner le cavalier euro en cours de route, lui préférant un ralentissement économique immédiat à un risque de surchauffe pour les mois à venir, risque pourtant largement improbable.

En effet, si la BNS, réputée pour son rigorisme budgétaire, avait l’air de s’encanailler en liant son destin à la celui de la Banque centrale européenne, elle a désormais choisi de retrouver son indépendance. Cette décision, aussi incroyable que cela puisse paraître, trouve son origine dans une crainte que la BCE puisse aller trop loin.

Dans la seconde qui a suivi l’annonce, les marchés financiers se sont précipités sur la proie. Le franc suisse s’envola pour finir par s’établir à un niveau de quasi parité avec la monnaie unique, le vendredi 16 janvier. Soit une progression de plus de 15% en une seule journée. A l’inverse, le SMI, indice regroupant les plus grandes valeurs suisses décrochait d’environ 15% en deux jours.

Dès le matin du 16 janvier ; le géant bancaire suisse UBS accusait le coup en révisant ses prévisions de croissance fortement à la baisse pour le pays. Alors que la croissance 2015 était anticipée à un niveau de 1.8%, la révision réduit ce chiffre à un niveau de 0.5%. La pilule est aussi difficile à avaler pour l’année 2016 puisque la banque abaisse sa prévision de 1.7% à 1.1%. A titre ce comparaison, l’économie suisse avait pu progresser entre 1.9 et 2% au titre de l’année 2014. Le constat est amer. Concernant le niveau de chômage, la situation est identique, et les prévisions sont ici révisées à la hausse. Alors que la banque attendait un taux de chômage de 3.1% pour le pays à la fin 2015, UBS s’attend désormais à un niveau de 3.8%.

Ces révisions ont deux causes principales. La première, et la plus importante, est qu’en lâchant son taux de change de 1.20 CHF pour un euro, la Banque nationale suisse procède à une contraction de sa politique monétaire qui se traduit par une immédiate restriction de demande intérieure. Cette politique monétaire "souple" avait notamment eu pour effet de faire grossir le bilan de la BNS dans des proportions importantes, celui représentant aujourd’hui près de 85% du PIB du pays. La seconde est que la forte hausse du franc suisse ne pourra rester sans effet sur le niveau des exportations du pays. Une telle hausse, aussi vive et aussi forte, aura des effets sur les importateurs de produits suisses.

Suite à cette décision, l'euro a pu librement continuer sa chute  pour en arriver à un niveau inédit depuis plus de 10 années : 1.14 USD. L’anticipation de plus en plus forte d’une intervention de la BCE lors de sa prochaine réunion continue de produire ses effets. Mais la Suisse ne devrait pas gagner au change, elle vient de choisir la stagnation économique, et ce, de façon totalement délibérée.

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