Mitterrand, Sarkozy, ceux qui hurlent au scandale ont la mémoire courte<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
Mitterrand, Sarkozy, 
ceux qui hurlent au scandale 
ont la mémoire courte
©

Légion de déshonneur

Un récent article du Nouvel Obs évoque la Légion d'honneur généreusement offerte à différentes personnalités sous la présidence Sarkozy... en oubliant qu'une telle situation était malheureusement déjà de mise sous François Mitterrand.

Christian Millau

Christian Millau

Grand reporter, critique littéraire notamment pour le journal Service Littéraire, satiriste, Christian Millau est aussi écrivain.

Parmi ses parutions les plus récentes : Au galop des hussards (Grand prix de l'Académie française de la biographie et prix Joseph-Kessel), Bons baisers du goulag et aux éditions du Rocher,  Le Petit Roman du vin, Journal impoli (prix du livre incorrect 2011), Journal d'un mauvais Français (21 avril 2012) et Dictionnaire d'un peu tout et n'importe quoi (Rocher, 2013)

Voir la bio »

En amour, il y aurait, rapporte la rumeur publique, 32 positions. Je demande à voir, mais admettons. Pour le reste, qu’il s’agisse de cambriolage, de course cycliste, de politique, de jardinage, de mensonge ou de journalisme, il n’y a jamais que deux façons de faire. La bonne ou la mauvaise.

J’ai sous les yeux un article paru récemment dans le Nouvel Observateur. Il est intitulé « Légion d’honneur : le revers de la médaille ». Un papier sur les médailles, cela fait un peu vieille lune mais depuis le trafic des décorations, en 1897, par le gendre du président de la République, Jules Grévy, c’est réjouissant et ça marche à tous les coups. A classer donc dans la catégorie « bonne façon de faire du journalisme ».

Pour illustrer son propos, Olivier Toscer sort du placard à magouilles seize hommes et femmes qui se sont fait enrubanner par Jacques Chirac et surtout Nicolas Sarkozy dont, pourtant, le bruit des casseroles qu’ils avaient aux fesses auraient dû faire trembler les murs de la salle des fêtes de l’Elysée. Parmi les coquins et les coquines, Jacques Servier, l’inventeur du Médiator, Robert Bourgi, le porteur de valises de la Françafrique, Guy Wildenstein, le marchand d’art accusé de cravater les tableaux de ses clients, Nicolas Bazire qui aurait mis les doigts dans le pot de confiture de dattes de Karachi, Patrice de Maistre, le Mercure Paris – Genève, aux pieds ailés, de Liliane Bettencourt, Ali Bongo, le « Y a bon magot » du Gabon ou Isabelle Balkany, condamnée pour « prise illégale d’intérêt » neuf ans avant la remise de décoration.

Je ne dis pas que c’est l’Albert Londres de l’année, mais voilà quand même du bon journalisme.

L’embêtant est que son auteur a la mémoire si courte. Quand on lit : « En Sarkozie, les remises de décoration virent au déshonneur », un journaliste intellectuellement honnête ajouterait « comme hier en Mitterranderie ». S’il s’appelait Jean Daniel, Claude Imbert, Alain Duhamel, Jean François Kahn, Alexis Brezet, Jacques Julliard, Franz-Olivier Giesbert, Olivier Mazerolle, Christophe Barbier ou Jean-Marie Colombani, Eric Zemmour ou Jean-Michel Apathie, pour ne citer qu’eux, toutes orientations confondues, il n’effacerait pas le passé qui dérange d’un coup d’éponge.

Par respect envers ses lecteurs et envers lui–même, il sortirait de son chapeau au moins seize autres noms qui sentaient bon la rose. Comme ceux de la Bande des grandes oreilles de l'Élysée (150 personnalités écoutées clandestinement, de janvier 1983 à Mars 1986) incluant Gilles Ménage, Michel Delbarre, Louis Schweitzer, Christian Prouteau et Paul Barril, tous décorés par François Mitterrand. Il ajouterait à la liste Henri Emmanuelli, trésorier du PS condamné dans le scandale Urba à 18 mois de prison avec sursis et privation de ses droits civiques, les frères Chaumet, inculpés d’escroquerie, Yves Challier – l’affaire du Carrefour du développement – honoré de l’Ordre du Mérite, le malaisien Abdul Razak Baginda, accusé d’avoir commandité le meurtre de son ancienne maîtresse, le colonel de Lesquer, responsable du service Action dans l’affaire du Rainbow Warrior ou Pierre Bergé, passé de chevalier à officier de la Légion d’Honneur en 1985, alors qu’il était hors délai réglementaire, et décoré par Jack Lang (le distributeur automatique de médailles) en 1988 pour « services exceptionnels ». Allusion, sans doute, à sa participation active au naufrage de l’Opéra Bastille.

« La maladie la plus répandue en politique est l’amnésie » a dit André Frossard. Il avait complètement oublié que la sale maladie n’épargnait personne...

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !