La magie des règles du français face aux fautes d’orthographe<!-- --> | Atlantico.fr
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Dominique Mataillet publie « On n'a pas fini d'en parler ! - Dictionnaire savoureux des subtilités, ambiguïtés et incongruités de la langue française » aux éditions Favre.
Dominique Mataillet publie « On n'a pas fini d'en parler ! - Dictionnaire savoureux des subtilités, ambiguïtés et incongruités de la langue française » aux éditions Favre.
©ERIC FEFERBERG / AFP

Bonnes feuilles

Dominique Mataillet publie « On n'a pas fini d'en parler ! - Dictionnaire savoureux des subtilités, ambiguïtés et incongruités de la langue française » aux éditions Favre. Sens caché des expressions populaires, étymologies étonnantes, figures de style, jeux de mots, fautes courantes à éviter... Au fil des pages de cet ouvrage aussi documenté qu'amusant à lire, la langue française n'en finit pas de livrer ses secrets. Extrait 2/2.

Dominique  Mataillet

Dominique Mataillet

Dominique Mataillet a fait carrière dans l'édition et le journalisme. Après une vingtaine d'années à la rédaction en chef de Jeune Afrique, il collabore aujourd'hui à plusieurs magazines dont France-Amérique. D'une fonction à une autre, il a toujours eu pour mission – et pour passion – de veiller au bon usage du français.

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«Que celui qui n’a jamais fauté jette la première pierre.» Qu’il nous soit permis d’appliquer cette célèbre parole de Jésus-Christ – même si notre propos n’a rien à voir avec l’adultère et l’hypocrisie – à l’utilisation du français! À tout moment, en effet, chacun de nous prend des libertés avec les règles de la langue.

Qui, par exemple, ne se fend-il pas de temps à autre d’un « je m’en rappelle », construction évidemment fautive – on parle de solécisme – puisque le verbe « rappeler » est suivi d’un complément d’objet direct ? Pour contourner le problème, mieux vaut dire « je m’en souviens ».

Tout aussi courante est l’utilisation à l’intransitif de «pallier ». En aucun cas, on ne pallie à quelque chose. On pallie tout court. La faute s’explique par le croisement avec le synonyme « remédier » qui, lui se construit avec un complément indirect.

«Nous avons convenu de nous voir ce soir. » Ici, l’utilisation de l’auxiliaire « avoir » est erronée. On  la  réserve aux cas où convenir signifie correspondre aux besoins, aux goûts ou aux aptitudes de quelqu’un. «Cette maison m’a convenu», par exemple. Mais quand convenir a pour signification arrêter d’un commun accord, ce verbe se construit avec « être ». Ainsi dira-t-on: «Nous sommes convenus de nous revoir. »

Apporter et amener sont souvent confondus. Le premier, pourtant, ne peut avoir pour complément qu’un mot désignant quelque chose d’inanimé. On apporte des fleurs, un paquet et, au figuré, on apporte un conseil ou de l’aide. Amener, en revanche, est suivi d’un complément désignant un être vivant. On amène un enfant, des amis, son chien. Petite nuance toutefois. Amener peut aussi être utilisé dans le sens d’acheminer une chose à une personne : des marchandises amenées par bateau, le gaz amené par des conduites…

La distinction entre amener et emmener est encore plus subtile. Pour faire simple, disons qu’emmener met l’accent sur le lieu que l’on quitte ou sur celui que l’on rejoint plus que sur la personne prise en charge.

On commet couramment une faute de temps avec « après que », qui n’est jamais suivi du subjonctif. On ne dira pas « après qu’il ait fait », mais « après qu’il a fait ». Si « avant que » commande le subjonctif (« avant qu’il ne vienne »), c’est parce qu’il contient une idée d’éventualité, alors que « après que » induit la notion d’une action déjà accomplie (« après qu’il est venu»).

Il n’est pas rare que nous disions le contraire de ce que nous entendons dire. Pratiquée pour laisser passer la lumière, une « coupe claire » consiste à abattre un grand nombre d’arbres. Elle est donc plus drastique qu’une « coupe sombre », au terme de laquelle le sous-bois demeure dans l’obscurité puisque l’on n’aura coupé que quelques arbres.

Issue du lexique de l’armement, l’expression « faire long feu» signifie qu’une affaire a traîné en longueur pour, finalement, échouer. Or, dans le langage de tous les jours, on dit qu’« elle n’a pas fait long feu». L’opposé, donc. Il en va de même pour « tirer les marrons du feu». Ce n’est pas se sortir avec profit d’une situation délicate, mais, au contraire, comme le chat dans la fable de La Fontaine, se donner de la peine pour le bénéfice d’un autre. Être le dindon de la farce, en somme.

Pour employer à bon escient la locution « solution de continuité », il faut se souvenir de l’étymologie de solution: « séparation des parties », «destruction», «désagrégation». Une solution de continuité est donc une rupture, une interruption de ce qui doit être continu. Dans le langage courant, elle a pris le sens contraire…

Même chose avec l’«œil du cyclone». Un cyclone est une perturbation atmosphérique qui s’établit autour d’une basse pression, et qui se déplace en tournoyant sur elle-même: ainsi la zone située en son centre, «l’œil du cyclone», est-elle épargnée par la tempête.

«Vous n’êtes pas sans ignorer » : à trop vouloir faire de l’effet, on tombe dans ce genre d’énoncé filandreux. Comme en algèbre, deux négations juxtaposées valent une affirmation. Il faut donc dire « vous n’êtes pas sans savoir ». Ou, pour être simple, ce qui est toujours préférable, « vous n’ignorez pas que » ou, mieux, « comme vous savez ».

Au nombre des stupidités, on relèvera « s’avérer faux », puisque « avéré » signifie «donner comme vrai ». C’est ce qu’on appelle un oxymore. On dira « ce n’est pas avéré » ou, tout simplement, « ce n’est pas vrai », « c’est faux ».

« Jouir d’une mauvaise santé » est du même acabit. Issu du latin gaudere (« se réjouir »), jouir n’implique que des choses positives, agréables. On peut être en mauvaise santé, souffrir d’une santé médiocre ou encore être affecté par une maladie. Rien de jouissif dans cela…

Autre catégorie de fautes, les confusions entre locutions adverbiales. Parmi les plus courantes, « loin s’en faut », résultat du croisement entre « tant s’en faut » et « loin de là ». Dans le même ordre d’idées, on entend souvent «quant à faire » en lieu et place de « tant qu’à faire ».

Sans que l’on puisse les considérer comme de graves erreurs de langage, certaines formulations ont le don de hérisser les puristes de la langue française. C’est le cas de «par contre » utilisé au lieu de « en revanche » ou de «basé sur » à la place d’« établi sur » ou « fondé sur ». Idem pour « au plan» quand il faudrait dire « sur le plan». Tout aussi irritante est l’expression «ceci dit» au lieu de «cela dit». En bon français, «ceci» désigne la chose la plus proche ou ce qui va suivre. «Cela», de son côté, renvoie à quelque chose d’éloigné ou qui précède. Sans parler des locutions à la mode comme « au final », à laquelle, sachant que ce terme ressortit au vocabulaire de la musique, on préférera «finalement », « en définitive », « en fin de compte, ou « conséquent » qui en est venu à supplanter important, alors que, comme le rappelle Le Robert, cet adjectif signifie «qui agit ou raisonne avec esprit de suite ». Ne dit-on pas d’un homme que, dans ses actions, il est conséquent avec ses principes ?

Que n’entend-on des phrases telles que « je suis sur Marseille » ? Comme si on survolait la métropole phocéenne ! On peut être à Marseille, du côté de Marseille, mais, sauf si l’on est dans un aéronef, pas au-dessus.

Habiter «dans le sud de Paris » et habiter « au sud de Paris », ce n’est pas la même chose. Dans le premier cas, vous résidez dans un des arrondissements de la rive gauche de la capitale française. Dans le second cas, votre domicile se situe hors de Paris, probablement dans une ville de la banlieue Sud.

Toujours dans le registre du mauvais usage des prépositions, on rappellera la confusion, classique, entre « au» et « chez ». La première sert à désigner un endroit (« aller à l’hôpital »), la seconde s’utilise obligatoirement pour les personnes. On ne va pas « au docteur », mais « chez le docteur ». Et, tout aussi classique, la tournure fautive « en vélo » au lieu de « à vélo ». Parce qu’on entre dans le véhicule, on doit dire « en voiture » ou « en train». Mais, comme dans le cas du cheval ou de la motocyclette, on ne s’engouffre pas dans le vélo. On l’enfourche.

On ne saurait évoquer un tel sujet, le mauvais usage du français, sans rappeler quelques pléonasmes qui meublent les conversations quotidiennes, tels « en une heure de temps », « prévoir à l’avance », « reporter à plus tard », « marcher à pied », « s’approcher près de », « double alternative »… Il suffit de réfléchir quelques secondes pour comprendre à quel point de telles redondances sont ridicules.

A lire aussi : Les subtilités de la langue française se marient à ravir avec la gastronomie et la cuisine

Extrait du livre de Dominique Mataillet, « On n'a pas fini d'en parler ! - Dictionnaire savoureux des subtilités, ambiguïtés et incongruités de la langue française », publié aux éditions Favre

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