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L’économie se mondialise de plus en plus et la France suit de moins en moins le mouvement
©REUTERS/Ralph Orlowski

L'Édito de Jean-Marc Sylvestre

Le cabinet McKinsey vient de livrer un bilan de la mondialisation de l’économie après cinq ans de crise. Contrairement à ce que beaucoup de politiques pensent et préconisent, la mondialisation a progressé de plus en plus vite mais la France a beaucoup moins profité que les autres économies.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Selon McKinsey, le commerce international et notamment l’échange de marchandises, de services, de flux financiers et de données informatiques à l’échelle de la planète ont progressé de 10% en moyenne et par an depuis dix ans avec une tendance à l’accélération. Un commerce mondial en hausse continue alors que la croissance économique moyenne mondiale a tourné autour de 2-3% par an. Cette mondialisation accélérée ne se limite plus aux trois grandes régions du monde, l’Amérique, l’Europe et l’Asie… Cette mondialisation ne se résume plus aux schémas d’origine assez simples qui voyaient des flux de pétrole ou de gaz venir faire tourner les usines et les voitures occidentales, et des flux de produits manufacturés venir de Chine pour remplir le caddie de la ménagère occidentale. La nouvelle mondialisation a trois caractéristiques :

Premièrement, la mondialisation depuis 5 ans englobe la planète toute entière. Non seulement les grands pays, mais aussi tous les pays émergents et ceux qui sont en développement en Asie, Amérique du Sud et en Afrique. Les pays en développements représentent désormais près de 40% des échanges mondiaux. Le commerce Sud-Sud, et Sud-Nord est aujourd’hui aussi important que le commerce Est-Ouest.

Deuxièmement, les pays émergents et en développement n’exportent pas seulement des matières premières, de l’énergie et des fabrications à faible cout de main d’œuvre, mais intègrent aussi beaucoup de valeur ajoutée qui va concurrencer la valeur ajoutée occidentale sur les marchés locaux. Alors qu’il y a dix ans, les constructeurs automobiles qui vendaient sur le marché chinois étaient seuls ou presque. Aujourd’hui, ils se retrouvent en concurrence avec des constructeurs chinois et doivent le plus souvent fabriquer sur place en alliance avec les producteurs locaux. Cette mondialisation est donc beaucoup plus sophistiquée qu'avant. Le grand bénéficiaire de cette mondialisation d’après crise est l’Allemagne dont le modèle est fondé sur l’exportation grâce à une compétitivité industrielle qui s’exerce aussi bien sur les coûts que hors-coûts.

Troisièmement, une des composantes les plus importante de cette mondialisation est imputable à l’importance du numérique. Logiciels, applications numériques, banques de données, transfert de datas, connectivité, etc., etc. Tous les pays sont concernés – pays développés comme pays émergents – et tous sont également capables de contribuer à la création de valeur via le numérique.

A noter que cette composante numérique permet à l’économie française de limiter son recul dans la hiérarchie des pays de commerce mondial. Mais c’est bien le seul secteur avec l’industrie du luxe, c’est-à-dire une petite poignée de grandes entreprises (LVMH, Channel ou Hermès)

Les résultats de cette étude Mc Kinsey sont intéressants à deux niveaux :

D’abord, ils contredisent tout ce que veulent nous enseigner les adeptes de la décroissance et  de la démondialisation ou du protectionnisme.

Ensuite, ils mettent les responsables politiques devant des responsabilités énormes qu’ils n’assument pas.  La mondialisation avance quoi qu’il arrive et mieux vaut s’y préparer et s’y adapter plutôt que de faire croire qu'on pourrait l’aménager .

Le problème est purement politique dans la mesure où les opinions publiques sont dans leur majorité paniquées par la mondialisation. Ils n’osent pas imaginer l’impact que cette mondialisation aura sur la vie quotidienne. Ils la craignent.

Ils la craignent, parce que la mondialisation a réduit le rôle des États et fragiliser leurs outils d’intervention. L’État n’est plus protecteur, de moins en moins État-providence, il n’est plus pilote de l’économie, il ne peut plus porter le rêve de progrès et de solidarité comme autrefois. Les hommes politiques devraient expliquer tout cela plutôt que de raconter des histoires qu’ils ne pourront plus faire vivre à leurs électeurs.

L’Europe qui aurait pu offrir une alternative aux États et offrir une régulation à la mesure des enjeux mondiaux, a flouté son image et brouillé son message. L’Europe était porteuse d’un rêve collectif, les hommes politiques n’ont pas su faire vivre ce rêve. Ils l’ont le plus souvent utilisée dans le rôle de bouc émissaire. Du moins pour l’instant.

Enfin, la mondialisation des échanges a épuisé dans les pays développés le modèle économique fondée sur la demande. La demande intérieure est saturée, or les pays développés ont beaucoup fonctionné depuis 50 ans sur le rêve d’une société de consommation insatiable. La demande reste le moteur de la croissance dans les pays émergents. Elle n’est plus locomotive de la croissance dans le pays développés. Le principal moteur aujourd’hui devrait être l’investissement, l’offre de produits et de services nouveaux… En bref ce qui est moteur, c’est la création de valeur et l’intelligence. Le problème c’est que pour les acteurs du système, il est beaucoup plus difficile de mettre en œuvre une politique de l’offre que de satisfaire une demande qui serait solvabilisée comme jadis par une redistribution de revenus, une politique de crédits ouverte et une politique monétaire généreuse.

Quand on regarde en détail le fonctionnement de la plupart des pays développés qui participent à la mondialisation, on s’aperçoit qu’ils travaillent surtout la qualité de leur offre compétitive plus que leur demande. Tous les pays sauf la France où la majorité de son opinion réclament surtout une activation de la politique de la demande. Cela remplirait le frigo et les placards, mais cela ne ferait pas repartir l’emploi en France. Au contraire de la Chine où les usines pourraient tourner à plein régime. Mais ce n’est pas le sujet. 

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