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HPV : le vrai/faux de ce qu’il faut savoir sur le papillomavirus
©JOE RAEDLE / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Vademecum

Un certain nombre d'idées reçues persistent concernant le papillomavirus. Nos clefs pour mieux comprendre - et mieux se protéger - contre ce virus.

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet est médecin des hôpitaux au CHU (Hôpitaux universitaires) de Strasbourg, chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg et conférencier.

 

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Atlantico : Une enquête réalisée par le Jo's Cervical Cancer Trust le mois dernier révèle qu'un certain nombre d'idées reçues persistes concernant le VPH. En effet, près de la moitié des femmes interrogées pensaient que leur partenaire les aurait trompées si elles avaient contracté le virus.

Ce virus s'attrape-t-il exclusivement lors des rapports sexuels ?

Stéphane Gayet : Le virus des papillomes humains (VPH) ou en anglais human papilloma virus (HPV) est couramment appelé papillomavirus. Un papillome (mot dérivé du mot papille signifiant : petite saillie ou protubérance physiologique ; le suffixe "ome" signifie une tumeur). Les papillomes sont des tumeurs bénignes de la peau ou des muqueuses orificielles, ayant un aspect mamelonné et développées à partir de l'épithélium (le tissu de revêtement) et du tissu conjonctif sous-jacent (le tissu de soutien et nourricier contenant des micro vaisseaux sanguins).

Il est mieux de parler des VPH, tant il existe de types différents

Le virus VPH est un virus dont le génome est à ADN (le génome des virus est, soit à ARN, soit à ADN, contrairement aux êtres vivants dont le génome est toujours à ADN). C'est un virus qui est résistant sur le plan physique et chimique. Il faut souligner le fait qu'il existe, au sein des virus à ADN, le virus de l'hépatite B ou VHB (cancer du foie) et le virus d'Epstein-Barr ou VEB (lymphome malin de Burkitt) qui peuvent provoquer des cancers.

Il est préférable de parler des VPH au pluriel, car il en existe de nombreux types différents. Certains types, dont on parle peu, sont à l'origine des tumeurs cutanées bénignes que sont les verrues communes des mains, les verrues plantaires ainsi que les verrues dites planes (juvéniles). Ces VPH cutanés se transmettent d'un individu à l'autre, mais lors d'un contact cutané rapproché et appuyé, et grâce à un microtraumatisme (c'est dire qu'un simple contact ne suffit pas). Ce sont plutôt les VPH responsables de lésions génitales qui nous intéressent ici, car ce sont eux qui sont inquiétants. Leur transmission s'effectue presque exclusivement lors d'un rapport sexuel et quel que soit sont type (génital, anal, buccal). Cependant, il existe une seule exception, c'est la transmission de la mère au nouveau-né et par voie respiratoire, lors de l'accouchement (quand la mère est bien sûr infectée au niveau génital).

Attention aux godemichés ("sex-toys") : ces virus sont résistants

Par ailleurs, étant donné que les VPH sont résistants sur le plan physique et chimique, il est théoriquement possible de se contaminer à partir d'un objet, d'une surface ou d'un matériel quelconque ayant été souillé par le virus. C'est ainsi que les godemichés (très connus sous leur appellation anglaise "sex-toys") constituent des vecteurs efficaces de virus VPH, dans la mesure où ils sont utilisés par des personnes successives sans nettoyage ni désinfection. Contrairement à d'autres virus sexuels beaucoup plus fragiles (VIH notamment), il ne suffit pas d'essuyer simplement un godemiché et de le conserver au sec pour être débarrassé des virus restés à sa surface. De surcroît, les sécrétions sexuelles en séchant constituent une protection efficace pour les virus résiduels qui sont ainsi protégés de la dessiccation.

Ce qu'il faut retenir de cette partie

Les virus VPH génitaux se transmettent d'une personne à l'autre essentiellement de façon sexuelle directe, lors d'un rapport génital, anal ou buccal. Mais, étant donné leur résistance particulière sur le plan physique et chimique, une transmission génitale ou même buccale de façon indirecte est possible, par l'intermédiaire d'un objet contaminé ; elle reste assez rare.

Le VPH est-il automatiquement synonyme de cancer ?

Les VPH ou papillomavirus sont des virus qui peuvent provoquer des tumeurs. C'est même l'une de leurs caractéristiques essentielles. Nous avons vu que les verrues cutanées étaient des tumeurs bénignes de la peau ; elles finissent par guérir, seules ou grâce à un traitement.

Avec les VPH génitaux, il y a trois possibilités évolutives

Maintenant, lorsqu'une personne est contaminée par un VPH de type génital, trois évolutions sont possibles. La première possibilité est l'absence de pathologie. Cela signifie que le sujet contaminé s'infecte bel et bien, mais que cette infection ne le rend pas malade ; il n'a de ce fait ni symptôme (un symptôme est ce que l'on ressent) ni signe (c'est une manifestation qui peut être constatée) : il s'agit donc d'une infection latente, comme dans le cas de l'infection par le virus de l'herpès (autre virus à ADN) entre deux poussées. Dans ce cas, le sujet n'est donc pas malade sur le plan de son état de santé subjectif et objectif, mais il est néanmoins contagieux (il est qualifié de sujet porteur sain, mais excréteur de virus). C'est en réalité et de loin le cas le plus fréquent, d'où la grande facilité avec laquelle les VPH génitaux peuvent circuler dans les populations de personnes ayant une activité sexuelle.

La deuxième possibilité est le développement d'une verrue génitale : c'est le ou plutôt les condylomes génitaux dits acuminés (tumeurs bénignes, parfois volumineuses et saignant facilement). Le mot condyle désigne une extrémité ayant un relief marqué et particulier ; le suffixe "ome" signifie tumeur. L'adjectif acuminé signifie "en forme de pointe". Ces lésions caractéristiques que sont les condylomes acuminés sont également appelées d'une façon commune des crêtes de coq. Ces tumeurs bénignes sont directement liées à l'infection par le virus VPH et elles sont bien sûr très contagieuses, beaucoup plus qu'une muqueuse qui n'est qu'à l'état de portage sain du virus. Les condylomes acuminés peuvent se développer sur une muqueuse génitale chez l'homme comme chez la femme, sur la muqueuse anale et rectale ainsi que sur la muqueuse pharyngée (arrière-gorge). Ces formations finissent elles aussi par guérir, seules ou grâce à un traitement, comme les verrues cutanées.

La troisième possibilité est le développement lent et insidieux d'un cancer de la muqueuse qui est infectée. La transformation cancéreuse d'une muqueuse infectée par un virus VPH est à la fois très lente – elle nécessite plusieurs années – et liée à certains types de VPH particulièrement agressifs et cancérogènes. Il faut donc bien avoir conscience du fait que la formation d'un cancer génital liée à un virus VPH s'effectue en général longtemps après la contamination initiale.

Ce qu'il faut retenir de cette partie

Une infection par un virus VPH génital n'est pas du tout synonyme de cancer en formation. Ce n'est qu'une possibilité évolutive et c'est de loin la plus rare. Car le plus souvent, cette contamination évolue vers un état de portage sain dans lequel le sujet n'est pas malade à proprement parler, mais il est contagieux pour ses partenaires.

Quels sont les signes qui indiquent que l'on a contracté le virus ?

Dans le cas le plus fréquent où l'on n'a ni symptôme ni signe, rien ne permet de constater la présence du virus qui est pourtant là, mais de façon latente. Car il n'y a pas encore à ce jour de test sanguin commercialisé permettant de diagnostiquer l'infection. Par ailleurs, un simple prélèvement génital par frottis ne permet pas – du moins lors d'un examen de laboratoire de routine – de rechercher le virus, si la muqueuse semble sur le plan macroscopique et sur le plan microscopique normale (il faut préciser que l'on ne sait pas cultiver le virus VPH sur des milieux cellulaires, à la différence de beaucoup d'autres virus humains). Un frottis muqueux se déroule de la façon suivante : à l'aide d'une très fine tige stérile dont l'extrémité est striée, on frotte la muqueuse à analyser de façon à récupérer des cellules en quantité suffisante. C'est un peu sensible, mais non douloureux.

En revanche, lorsque l'on constate à l'examen microscopique d'un frottis du col de l'utérus que des cellules ont un aspect anormal (cellules dites atypiques) pouvant faire évoquer un état précancéreux tout débutant, on recherche la présence de virus VPH dans ces cellules. Si cette présence est positive, on précise s'il s'agit d'un VPH à haut risque de cancer ou au contraire à très faible risque de cancer. Il va sans dire que dans le premier cas, un traitement s'impose. Dans le second, il s'agit d'une surveillance très régulière.

Bien entendu, mais cela paraît évident, la constatation de condylomes acuminés, tant chez la femme que chez l'homme, atteste l'infection par un virus VPH (les condylomes acuminés doivent être analysés au microscope optique).

Ce qu'il faut retenir de cette partie

Il n'est pas possible de diagnostiquer une infection par un virus VPH par un prélèvement de sang, car il n'existe pas (encore) de sérodiagnostic. On ne pratique pas non plus en routine de frottis muqueux chez les hommes sans symptôme ni signe, à la recherche du virus. Ainsi, les seules circonstances permettant de diagnostiquer une infection à VPH sont la survenue de condylomes acuminés (muqueuse génitale de la femme, gland de la verge, muqueuse de l'anus ou du rectum, muqueuse pharyngée) ou la surveillance systématique et régulière du col utérin chez la femme de 25 à 65 ans. Chez cette dernière, la constatation de l'existence de cellules dites atypiques conduit à rechercher leur infection par un VPH. Or, c'est chez la femme que l'infection peut être et de loin la plus grave. Cette surveillance est donc capitale.

Existe-t-il des vaccins afin de prévenir le VPH ?

Il existe actuellement trois vaccins disponibles (en réalité, il s'agit d'un vaccin proposé avec trois déclinaisons différentes : monovalent, bivalent et quadrivalent). Ces vaccins comportent les souches les plus cancérigènes de virus VPH. Il faut bien noter que ces vaccins sont de type inactivé : ils ne contiennent que des fragments de virus et sont de ce fait dépourvus de tout pouvoir infectieux (ce ne sont pas des vaccins atténués comme celui de la rougeole).

La vaccination est recommandée chez toutes les jeunes filles âgées de 11 à 14 ans. Elle est d’autant plus efficace qu'elles n’ont pas encore été exposées au risque d’infection. Dans le cadre du rattrapage vaccinal, la vaccination est recommandée entre 15 et 19 ans révolus.

Attention : la vaccination contre les infections à VPH ne se substitue pas au dépistage des lésions précancéreuses et cancéreuses du col de l’utérus par le frottis cervical. Les femmes vaccinées doivent être surveillées par frottis cervical comme celles qui ne le sont pas.

La vaccination systématique des garçons préadolescents n'est pas recommandée, du moins en France, alors qu'elle est pratiquée dans d'autres pays. Pourtant, il semblerait logique de les vacciner, étant donné qu'ils sont les disséminateurs du virus VPH génital (c'est un peu le contraire de ce qui se passe avec le gonocoque : les femmes disséminent la bactérie et ce sont surtout les hommes qui en sont malades).

En revanche, chez les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), la vaccination est recommandée jusqu’à l’âge de 26 ans, eu égard au risque de formation de lésions cancéreuses de l'anus. Par ailleurs, s'agissant des sujets immunodéprimés, elle est recommandée chez les garçons comme les filles aux mêmes âges que dans la population générale, avec un rattrapage jusqu'à l'âge de 19 ans révolus. Et chez les enfants des deux sexes, candidats à une transplantation d'organe solide, la vaccination peut être initiée dès l'âge de 9 ans.

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