Les Anglais sont-ils en train de penser à sortir de l’Europe ? <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Europe
Les Anglais sont-ils en train de penser à sortir de l’Europe ?
©

Fuite en avant

Certains membres du parti travailliste considèrent qu'il appartient au peuple de se prononcer sur le maintien dans l'Union européenne, et non aux élites de décider pour lui. Cependant, conservateurs, travaillistes et libéraux-démocrates sont conscients de l'importance de l'UE en terme de marché économique.

Sophie Loussouarn

Sophie Loussouarn

Sophie Loussouarn est spécialiste de l’histoire politique et économique du Royaume-Uni et proche du monde politique anglo-saxon.

Voir la bio »

Atlantico : Ed Balls, membre du Cabinet de l’opposition britannique, a affirmé mercredi qu’un gouvernement travailliste devrait organiser un référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne. Des rumeurs ont fait état que David Cameron devrait faire une proposition similaire. Comment expliquer le sérieux de ces dernières déclarations ? Y a t-il une véritable volonté d’en découdre avec l’UE ?

Sophie Loussouarn : David Cameron est favorable aux eurobonds et hostile à une taxe sur les transactions financières. Son Vice-Premier ministre, Nick Clegg a quant à lui récemment condamné la position allemande et estime que non seulement les dirigeants européens n'ont pas rétabli la croissance mais également que les mesures adoptées ont manqué à la fois de stratégie et d'ampleur. Sur ce point, il se démarque des conservateurs. 
Il est probable que le parti UKIP - UK Independance Party - remporte un nombre important de sièges lors des élections européennes qui se tiendront en 2014, ce qui obligerait alors les partis conservateurs et travaillistes à inclure un référendum sur l'appartenance du Royaume-Uni à l'Union européenne dans leur manifeste pour les élections législatives de 2015. Je pense que le le parti peut "gagner" les élections, non pas en nombre de siège absolu, mais en arrivant dans une position favorable qui lui permettrait de remporter un nombre important de sièges. 
Outre le UKIP, je ne pense pas que les personnalités politiques britanniques aient vraiment envie d’en découdre avec l’Union européenne parce que les conservateurs, travaillistes et libéraux-démocrates considèrent l'UE comme un marché incontournable. Ils sont d'ailleurs très attachés au sein de la Grèce dans la zone euro et à celui du Royaume-Uni dans l'UE, car cette dernière représente un marché énorme pour l'économie britannique qui se porte bien plus mal qu'on ne le pensait. Mais parallèlement, la crise de la zone euro impacte en retour considérablement sur l'économie britannique. C'est sans doute pour cette raison que Cameron se déclare favorable aux eurobonds. Mais son pays n'est pas membres de la zone euro. Il y est donc favorable, mais pour les autres...

Comment expliquer qu’un travailliste comme Ed Balls souhaite un tel référendum ?

Ed Balls estime qu'il appartient au peuple britannique, et non aux élites, de se prononcer sur le maintien dans l'UE  Il souhaiterait aussi que la BCE joue un rôle plus interventionniste, accepte une inflation plus élevée et pratique une politique de création monétaire à travers la banque européenne d'investissement.
Il ne faut pas oublier que Ed Balls était candidat à la tête du parti travailliste contre Ed Miliband en septembre 2010. Se sont donc deux anciens rivaux. Pour sa part, Miliband est hostile a l'organisation d'un tel référendum du fait de son attachement à l'UE alors que son ancien concurrent travailliste a une position plus réservée et proche de celle de Peter Mandelson, ancien ministre de Tony Blair, qui estime que le Royaume Uni doit renouveler son vœu d'appartenir à l'UE. Ed Balls estime que la politique menée par l'UE ne fonctionne pas et que le couple franco-allemand ne peut plus continuer à adopter des décisions seul sans avoir à convaincre leurs partenaires européens.  Les Britanniques ont le sentiment d'être lésés dans ces décisions.
La pression est récemment montée dans les rangs du Parti conservateur afin d'organiser un référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l'Union européenne. En octobre 2011, 68 députés, soit 20% des députants siégeant au Parlement, ont signé un manifeste, le "manifeste du peuple", demandant l'organisation d'un tel vote. Mais il s’agit probablement d’une manière d'anticiper la montée nationaliste et le succès que pourrait obtenir l'UKIP dont la stratégie se focalise sur trois sujets majeurs : l'économie, l'immigration et l'Europe. Cela lui a permis de gagner des sièges aux élections européennes du fait d'un système au scrutin proportionnel qui favorise les petits partis.

Comment se positionne la population britannique ? Soutient-elle Cameron ? Veut-elle véritablement un référendum ?

Pour l'instant, la priorité des Britanniques reste l'économie et l'emploi. Nous avons assisté à une légère baisse du chômage le mois dernier et l'inflation est plutôt en baisse par rapport à 2008 ou 2010. Le Royaume-Uni souffre aujourd'hui du coût des matières premières qui a été gonflé par une dévaluation compétitive de la livre afin de favoriser les exportations britanniques.
A Berlin, Nick Clegg a tenu un discours condamnant la position allemande en estimant que la réunion qui s'est tenue entre Merkel et Hollande n'a en rien permis de rétablir la confiance et que les mesures adoptées sont encore trop fragmentaires. C'est une manière de montrer sa différence par rapport à David Cameron avec qui il forme une coalition au pouvoir, même si elle tiendra jusqu'à 2015. Les deux hommes s'entendent bien.
Propos recueillis par Olivier Harmant

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !