Google et Facebook sont gratuits. Mais parce que tout le reste du web les sponsorise de facto<!-- --> | Atlantico.fr
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Les pratiques de Google et Facebook en termes de revenus publicitaires ont des conséquences sur l'équilibre économique sur Internet.
Les pratiques de Google et Facebook en termes de revenus publicitaires ont des conséquences sur l'équilibre économique sur Internet.
©DENIS CHARLET / AFP

Revenus publicitaires

Alors que Facebook et Google communiquent sur leur gratuité, leurs pratiques en termes de revenus publicitaires ont des conséquences majeures sur Internet et sur la hausse des tarifs de nombreux services.

Anthony Poncier

Anthony Poncier

Anthony Poncier est Docteur en Histoire, membre du collectif Réenchanter Internet et expert en transformation digitale et en stratégies collaboratives. En cette qualité, il accompagne les entreprises dans la conception de leurs stratégies médias sociaux, ainsi que dans la création de leurs réseaux internes.

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Atlantico : Google et Facebook communiquent énormément sur la façon dont leurs principaux services sont gratuits. Mais en revanche, ils ne soulignent pas le fait que leur rôle consiste à rendre presque tout ce que nous consommons en ligne plus cher par leurs méthodes et leur politique en termes de publicité en ligne et de monétisation. Alors qu'Internet a favorisé et contribué à la gratuité, de plus en plus de services sont payants, le dernier exemple en date concerne Twitter, qui a annoncé la semaine dernière qu'il  prévoyait une offre payante, baptisée «Super Follows». Comment en est-on arrivé là ? Quels sont les mécanismes déployés et les techniques utilisées par Facebook et Google pour générer autant de revenus publicitaires au détriment des acteurs "traditionnels" ? 

Anthony Poncier : Nous sommes dans cette situation depuis le début. Le Web 2.0 reproduit une forme de servage, il y a les seigneurs qui ont leur terre, Google, Facebook et Cie et dessus les cerfs produisant des contenus (nous). Le seigneur récupère l’ensemble du profit liés à ces contenus comme dans le cadre d’un servage. Nous sommes de retour au Moyen-Age.

Une étude a montré récemment qu’il y a moins de 15 % d’influenceurs qui vivent des médias sociaux. La plupart des influenceurs ont moins de 1.000 euros par an et majoritairement, la production de contenu se fait gratuitement. Du fait de la publicité ciblée, le service utilise nos données pour pouvoir faire de l’argent. Les données ont une valeur énorme, on pourrait les comparer au pétrole. La question primordiale est alors de savoir si ces entreprises ont le droit d’utiliser comme cela mes données alors qu’elles m’appartiennent. En Europe, l’encadrement a commencé avec le RGPD ou le Digital Act.

Au départ les acteurs traditionnels étaient heureux de trouver ces services. Cela leur a donné une certaines visibilité, mais comme toute chose cela commencé à devenir problématique quand l’on a commencé à avoir un monopole. Lorsque l’on regarde les hôteliers, au début ils étaient très heureux de trouver Booking, mais aujourd’hui lorsque l’on n'est pas sur cette plateforme ou autre il y a un problème. La majorité des clients vont passer par là pour trouver un hôtel. Si l’on n’est pas dessus, c’est compliqué. Les conditions qui étaient assez souples au début ont aujourd’hui changé, les clients se retrouvent pieds et poings liés avec ce quasi monopole.

Lorsque l’on voit Google qui se retrouve obligé de payer une taxe en France, elle la bascule sur les annonceurs. Nous sommes dans une situation monopolistique qui a des impacts économiques.

Alors que la puissance en ligne et les revenus publicitaires qui en découlent continuent de se concentrer essentiellement sur Facebook et Google, faut-il s'attendre à voir une généralisation d'offres payantes et de monétisation à outrance sur Internet ? À terme, cela va-t-il nuire à l’expérience des internautes ?

C’est ce qui est en train d’arriver. Lorsque l’on voit les « super followers » sur Twitter on peut se poser des questions. Jack Dorsey va jusqu’au bout de sa logique car via son autre entreprise Square, spécialisée en paiement, il a racheté Tidal. Il a l’idée de créer un nouveau modèle pour les artistes avec des micro-paiements. Twitter cherche de nouveaux modèles pour améliorer sa rentabilité, mais sans doute qu’une majorité de personnes ne paieront pas pour ça.

Il y a alors la question de savoir s’il est mieux d’avoir un abonnement ou des systèmes de micro paiement pour accéder à des nouvelles ou autres. Si l’on regarde la presse, on peut regarder le début des articles du Monde, mais on doit payer pour lire l’article entier.

À terme, certains vont se demander pourquoi avant tout était « gratuit ». Beaucoup pensaient que leur contenu était extraordinaire, qu’il avait une valeur sur le marché, mais dès que cela va devenir payant il n’y aura plus personne. En France, peu de médias proposent un accès payant comme Mediapart car le marché est très restreint.

Depuis le début du Web, il y a d’un côté ceux qui sont sur la liberté, de l’autre ceux qui sont sur le business avec une monétisation plus ou moins efficace.

Est-il possible de parvenir à sortir du modèle dominant de Facebook et Google dans le domaine de la publicité ?

Il y a de plus en plus d’offres qui existent donc dans l’absolu oui. Le problème étant qu’un groupe comme Facebook devient un gate-keeper, une porte d’entrée. Il faut être capable d’avoir des offres alternatives où les internautes peuvent aller voir ailleurs. La question de la position dominante se pose.

À chaque fois qu’un acteur commence à prendre de l’importance comme Instagram, WhatsApp - Facebook les rachète. Facebook a son propre business model et le duplique. Tant que l’on ne peut pas avoir une concurrence forte, il n’y aura pas de modèle émergent qui pourra arriver sur le marché. Clubhouse propose un nouveau modèle de financement, il y a Tik Tok qui est sur un modèle complétement différent par rapport au partage des contenus.

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