Conférence de presse : François Hollande joue son quinquennat<!-- --> | Atlantico.fr
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François Hollande donne une conférence de presse cet après-midi.
François Hollande donne une conférence de presse cet après-midi.
©Reuters

L'Édito de Jean-Marc Sylvestre

A quelques heures de la conférence de presse du président de la République, personne ne peut dire ce qu'il va se passer. L’enjeu est si important et la situation dans laquelle il s’est mis est tellement surréaliste, que tout peut arriver. Ce qui est sûr, c’est que le Président joue son quinquennat.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Passons rapidement sur la question de la vie privée. Va-t-il en parler ? Pour dire quoi ? Ça n’a pas d’importance mais tout le monde y pense. François Mitterrand avait fait le choix de maintenir une chape de plomb sur ses multiples vies privées au frais de la République. Tout le monde savait, personne ne parlait. Nicolas Sarkozy, lui, avait fait le choix inverse, "pas d’hypocrisie, pas de photo glauque au petit matin, avec Carla c’est du sérieux". C’était en janvier 2008. 

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Les donneurs de leçons peuvent toujours raconter que la vie privée doit rester privée, à partir du moment où la compagne du Président à un rôle officiel pour représenter la France, il parait normal que le Président dise précisément qui va remplir ce rôle. Ou alors, il choisit de vivre comme Angela Merkel dont le conjoint n’apparait jamais.

Difficile de passer sur cette question dans la mesure où, faute de clarification, avec une presse politique facilement hystérique, le contenu de la conférence risque d’être complètement occulté. Or, l’objet même de la conférence de presse n’est pas banal. Faut-il rappeler que dans une situation économique catastrophique, cette conférence doit définir la stratégie de la politique économique. Une stratégie qui doit imprimer un changement important. C’est du moins comme cela qu'il nous l’avait vendue le soir du 31 décembre.

Et dans ce climat, le président doit convaincre les chefs d’entreprises de sa sincérité , il doit convaincre l’opinion que cette fois il a trouvé la martingale, mais il doit aussi s’expliquer auprès de ses amis qui ne comprennent pas , se justifier d’un virage et démontrer que ça n’est pas contradictoire avec ses engagements de campagne , alors que tout le monde sait que c’est contradictoire.

Vis-à-vis des chefs d’entreprises, des marchés et des investisseurs étrangers, vis-à-vis aussi des salariés du privé, il doit définir le contenu et le calendrier de ce fameux pacte de responsabilité.
Le gouvernement baissera les charges mais, en contrepartie, les entreprises devront embaucher. Mais quelles charges ? Pour quelles conditions ? Qui conditionne quoi ? On baisse les charges si les patrons embauchent ou alors on baisse et on espère que les patrons embaucheront ?

Cette relation mécanique de cause à effet est irréaliste. Elle ne correspond pas au fonctionnement quotidien de l’entreprise. L’entreprise ne se développe que si son écosystème est favorable au développement. Mais là encore, passons. On attend surtout le financement de ce pacte. La cotisation famille, c’est 32 milliards. Si on la supprime ou la baisse, qui la financera ? Le contribuable via la CSG ou la TVA ? L’État par une économie de dépenses publiques ? Dans ces conditions, quid de la réforme fiscale.

Sur le plan économique, François Hollande aura donc trois dossiers à éplucher. Celui de la compétitivité des entreprises, celui de la baisse des dépenses publiques et celui de la fiscalité.
Le Président est attendu sur ces points parce que les dossiers marquent un tournant dans l’approche de la politique économique.

Jusqu’alors, François Hollande s’inscrivait dans le prolongement de sa campagne présidentielle. Il développait une équation très keynésienne avec un soutien de la demande de consommation, un traitement social du chômage (emplois aidés) et l’espérance que le cycle économique se retournerait et nous ramènerait de la croissance pour payer nos dettes. Cette stratégie est un échec. Le cycle économique s’est effectivement retourné mais il a évité la France. Donc François Hollande n’a aucun résultat à délivrer. Plus grave, l’endettement est tel qu'on allait se retrouver en situation de risque très rapidement.

Le président de la République a, très logiquement, changé son fusil d’épaule en prônant une politique de l’offre qui permette aux entreprises de faire de la croissance. Les chefs d’entreprise et la majorité de l’opinion publique attendent une politique de ce type qui, dans le climat actuel, revient au bon sens.

Le problème, c’est qu'une politique de l’offre, une politique ouverte et programmatique c’est, pour la gauche, une politique de droite. Donc c’est une politique qui sent mauvais. Les militants du PS, ceux du Front de Gauche et les écologistes peuvent difficilement accepter un tel changement. Ils ont voté pour une programme social et découvre que le Président a des liaisons clandestines avec le libéralisme. Il va donc devoir expliquer que tout cela est cohérent alors que ça ne l’est pas.

François Hollande se retrouve exactement dans la position de ses prédécesseurs à l’Élysée. Depuis Valery Giscard d’Estaing, ils ont tous été obligés de changer de politique par rapport aux programmes économiques. VGE n’avait pas mesuré l’impact des chocs pétroliers de 1974, au moment de son élection, il a dû s’adapter et faire appel à Raymond Barre.

François Mitterrand lui, demandera à Pierre Mauroy de négocier un virage à 180° pour éviter la banqueroute. Pierre Mauroy s’exécutera avec l’aide de Jacques Delors puis plus tard avec Pierre Bérégovoy. Jacques Chirac, lui sera contraint, par un Alain Juppé empêché de réformer, de dissoudre l’Assemblée Nationale. Nicolas Sarkozy enfin, sera obligé de prendre de plein fouet la crise mondiale.

En fait, si chaque président de la République change de politique, c’est qu’ils se font élire sur des promesses qu'ils ne peuvent pas tenir et sur des programmes qui ne sont pas financés. Ils achètent des voies à crédit et ne peuvent pas rembourser la dette ou délivrer le résultat. François Hollande joue donc, lui aussi, son mandat et compte tenu de la situation dans laquelle il s’est mis, tout peut arriver.

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