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Fermetures de réacteurs : transition énergétique ou campagne anti-nucléaire ?
©Reuters

Les travaux de M. Hulot

Nicolas Hulot a annoncé qu’il faudra fermer « peut-être jusqu’à 17 » réacteurs nucléaires afin d'enclencher  la transition énergétique à l'horizon 2025. Alors que le Ministre de la Transition écologique prône un changement volontariste de société, cette transition ne sera pas sans conséquences sur la France.

Hervé Machenaud

Hervé Machenaud

Hervé Machenaud, X Ponts et IEP Paris, a mené toute sa carrière professionnelle au cœur des questions industrielles liées à l’énergie, tant en France qu’à l’étranger. Il réside actuellement en Chine où il a participé durant plus de trente ans au développement du programme énergétique.

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Atlantico : Alors que la France tient aujourd'hui la première position en ce qui concerne le nucléaire civil, quel pourrait être l'impact du plan Climat sur l'économie française?  Quels seraient les risques pour es entreprises françaises de l'énergie?

Hervé Machenaud : Le plan climat, quel est son objectif, SI c’est la réduction de production de CO2, quels sont les moyens qu’on utilise? Aujourd’hui, la production d'électricité en France se fait quasiment sans émission de CO2. C’est une des plus basses production de C02 par kilowatt-heure du monde. La transition climat, quel est son objectif? Si c’est arrêter le nucléaire, ce n’est plus un objectif climatique, mais un objectif anti-nucléaire. Ce que l’on peut comprendre ; le nucléaire présente pour un certain nombre de gens un risque qui paraît insupportable. Mais, dans ces cas-là, il faut réfléchir à la réalité. Dans nos pays, l’éolien et le solaire, ne contribuant pas à la demande de pointe, ne permettent pas de répondre aux besoins de la production d’électricité de façon stable et continue. L’Allemagne est un exemple parfait qui,  depuis qu’elle a arrêté quelques unes de ses centrales nucléaires, produit plus de C02 qu’avant alors qu’elle a mis en service l’équivalent du parc nucléaire français rien qu’en éolien. Mais celui-ci ne contribuant pas à la pointe, les allemands sont obligés de conserver en permanence leurs centrales à charbon. Elle produit ainsi 20 fois plus de C02 que la France, bien qu’elle ait des parcs éoliens et solaires les plus grands d’Europe. Il y a une sorte d’incompréhension sur le fait que l’éolien et le solaire détruisent de la valeur. C’est-à-dire que, comme il faut la totalité des moyens de production - le nucléaire et l’hydraulique en France - pour le jour de la pointe, on est obligés de les maintenir. La première question est donc par quoi va-t-on remplacer le nucléaire? Certainement pas par de l’éolien et du solaire. En janvier, au moment de la plus grande demande d’énergie, il n’y avait aucun vent, et pratiquement pas de soleil. Si on arrête le nucléaire, il sera nécessairement remplacé par le nucléaire ou le charbon. C’est la première évidence incontournable. L’Australie vient d’en faire la preuve. Ils sont arrivés, un moment, à 50% d’énergie éolienne, et ont eut en un mois et demi cinq blackout. Ils sont en train de construire des cycles combinés à gaz à toute vitesse pour essayer de résoudre le problème pourtant prévisible. Donc pourquoi arrêter le nucléaire? Si on en veut pas, il faut savoir qu’on va le remplacer par le charbon et le gaz. En France, l’industrie nucléaire est une des plus performantes du monde. Mais aujourd’hui, on est dans une situation où le processus de progrès ne se fait plus. IL y a donc une perte de dynamisme. Comment voulez-vous que des jeunes de 20-25 ans aillent travailler dans un secteur qui est montré du doigt par les politiques et la population? Il représente entre 200.000 et 400.000 selon si on compte les emplois indirects ou non. C’est encore un des grands secteur industriel qu’a la France, et qui va évidemment disparaître d’aller dans le sens d’un arrêt progressive. Mais encore une fois, réduire le nucléaire à 50%, alors que la France produit l’électricité la plus économique d’Europe et la plus propre, c’est le retour du charbon et du gaz.

Comment cette transition énergétique peut-elle modifier l'équilibre du marché de l'énergie européen, et les relations entre la France et ses voisins?

L’Allemagne a doublé sa capacité de production en ajoutant de l’éolien et du solaire. A consommation constante, elle produit deux foi plus de moyens de consommation qu’auparavant. Elle produit plus de CO2 d’années en années. Aujourd’hui, le Danemark qui prétend couvrir sa production à 75% par des énergies renouvelables, consomme en hiver l’électricité allemande. Aujourd’hui, la France est exportatrice car elle a les moyens de productions les moins chers d’Europe parce que c’est du nucléaire construit il y a longtemps dans des conditions industrielles extrêmement efficaces. Si on arrête le nucléaire, soit on importera de l’électricité allemande, fabriquée par du charbon, soit on construira des cycles combinés à gaz et on importera d’Algérie, du Moyen-Orient ou de Russie.

Pourquoi changement de position de la France dans la géopolitique énergétique pas forcément bénéfique vis-à-vis, par exemple, des pays de l'OPEP? Comment la dépendance énergétique française va-t-elle évoluer?

Les terres rares correspondent effectivement à un besoin fondamental, essentiellement pour les panneaux solaires. Mais ce n’est pas tant la question des terres rares. Aujourd’hui, l’éolien est fabriqué par l’Allemagne et les Etats-Unis. Il n’y a pas d’industrie française pour l’éolien comme pour le solaire. Mais de toute façon, l’éolien et le solaire ne serviront à rien, puisque ces derniers n’arriveront pas à combler la demande en pointe. Nous sommes en train de fermer les centrales à charbon en France. Quand on s’apercevra de la gravité en France, on commencera à construire des centrales à gaz. Mais à ce moment-là, le poid sur la balance commerciale et la dépendance géopolitique deviendra considérable. Aujourd’hui, l’électricité en France est produite sans dépense. Quand il faudra importer du gaz, on dépendra des pays qui voudront bien nous en vendre. Il n’y a qu’en France qu’il est interdit de l’exploiter.



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