Comment faire de la chute de l’immobilier une opportunité pour la France (tout en évitant le krach) ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Un homme consulte des offres devant une agence immobilière.
Un homme consulte des offres devant une agence immobilière.
©PASCAL PAVANI / AFP

Lueur d'espoir

Malheureusement, tout indique plutôt que nous continuerons à entretenir un problème aux multiples conséquences économiques et sociales.

Don Diego De La Vega

Don Diego De La Vega

Don Diego De La Vega est universitaire, spécialiste de l'Union européenne et des questions économiques. Il écrit sous pseudonyme car il ne peut engager l’institution pour laquelle il travaille.

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Atlantico : Suite aux hausses des taux successives décidées par la BCE, les prix de l’immobilier ont commencé à baisser. S’agit-il d’une bonne ou d’une mauvaise nouvelle ? Cette baisse des prix va-t-elle aggraver les problèmes de logement en France ou les alléger ? 

Don Diego de la Vega : Ce qui a baissé, ce sont les transactions immobilières. Elles sont en très net recul. Côté prix, il y a peu de baisses pour l’instant à part en province sur les biens de qualité moyenne. On ne constate pas de grandes baisses de prix comme c’est le cas en Suède où les taux sont variables, mais aussi en Allemagne où là les taux sont fixes. Dans ces deux pays, on a constaté des baisses de prix importantes.En France, très peu. La situation doit changer en 2024-2025. Ajoutons que les économistes ont prévu un Krach sur l’immobilier résidentiel français chaque année sur les 15 dernières années. Ils ont eu tort systématiquement mais avec la remontée des taux, le krach est inéluctable. 

La baisse des prix aurait dû arriver après la grande crise de 2008 de façon beaucoup plus forte. Le marché s’est repris systématiquement depuis 2010 pour deux raisons. La première, c’est qu’on ne construit pas. Dans tout un tas de secteurs, les biens sont tout simplement rares. La deuxième, c’est que les taux ont baissé dans les années 2010 ce qui a permis à un certain nombre de gens de penser qu’ils s’étaient re-solvabilisés. C’est la conjonction de ces deux facteurs, offre et demande, qui a maintenu une très belle tenue des prix de l’immobilier résidentiel en France. Prix qui était totalement disproportionné par rapport à la réalité économique de fond puisque la demande domestique est atone depuis 15 ans. Il n’y avait aucune raison pour que les prix de l’immobilier soient plus dynamiques que les prix en général ou les salaires. C’est pourtant ce qui s’est passé. 

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Cette baisse des prix, elle a évidemment des effets négatifs pour ceux qui ont acheté au plus haut. Mais globalement, c’est quand même plutôt favorable à l’économie. Avec des prix à 12 000 euros le m2 à Paris, vous ne pouvez plus avoir de primo-accédants. C’est une correction qui est donc plutôt la bienvenue et qui va aérer le marché.

De quoi le poids de l’immobilier dans l’économie française est-il le symptôme ?

La pierre, c’est un actif mort. Vous pouvez rendre cet actif un peu moins mort ou un peu plus vivant, si vous faîtes des travaux ou que vous construisez une piscine par exemple. 

La plupart des gens considèrent la pierre comme un actif magique qui ne baisse jamais. J’achète et je revends automatiquement 25 à 30% au-dessus du prix d’achat. 

Alors qu’à quelques exceptions près, il n’y a pas de création de valeur dans l’immobilier. C’est un secteur où l'emploi est très peu productif. Les gains de productivité dans le secteur de la construction sont nuls ou négatifs sur longue période aux Etats-Unis ou ailleurs. C’est un secteur qui n’est pas intéressant sur le plan technologique. Il n’est pas « Tradé » c’est-à-dire qu’il n’a pas de concurrence internationale. Au contraire, c’est uns secteur domestique, très rentier. La valeur principale de l’immobilier, c’est une valeur d’usage. Vous habitez quelque part, il vous faut un toit. C’est le principe de base. Or valeur d’usage, la valeur de l’immobilier est très limitée. Elle n’a pas de raison de monter plus que l’inflation d’autant plus qu’elle a été très basse ces dernières années dans nos pays. Ce qui s’est passé était donc une anomalie, une sorte de bulle. La hausse des taux va ramener la vérité sur les prix. 

Comment éviter un krach et quels pourraient potentiellement en être les effets économiques désastreux d’un krach immobilier ? Sait-on définir ce qui serait un niveau sain des prix de l’immobilier en France ?

C’est très difficile à dire et c’est très subjectif. Je dirais qu’une baisse de prix de 15 à 20% dans un premier temps serait raisonnable pour suivre les suédois et les allemands. Et aussi pour suivre une certaine logique. Si Krach il y a, pourquoi chercher à l’éviter ? Il va remettre les compteurs à zéro et punir un certain nombre d’acteurs qui ont un peu trop joué avec le feu. L’immobilier résidentiel français est en bout de course après 25 ans de hausse. 

Alors même que la France consacre des milliards d’euros chaque année à sa politique du logement, les tensions tout comme le nombre de mal-logés n’ont jamais été aussi élevés ? Comment expliquer ce trou noir français ?

La politique du logement coûte très cher. Le Président de la cour des comptes lui-même a noté qu’il y avait un petit problème dans l’efficacité de la dépense logement en France. En prime, la dépense logement est une dépense improductive. Elle est mal ciblée, pas stratégisée. C’est une catastrophe. 

En général, la dépense logement est assez électoraliste et mal calibrée. Il faudrait remettre un peu de liberté, un peu de logique de marché et un peu de rationnement par les prix plutôt que de rationnement par les quantités dans le logement en France. Le marché aurait pu virevolter au fil de l’eau. Ils ont préféré tuer le crédit pour empêcher les classes moyennes de devenir propriétaire après avoir tout fait pour que les classes moyennes deviennent propriétaires. Ce sont eux qui vont être les premières victimes de ces baisses de prix. Cela a été un revirement de politique très soudain. Ils sont passés du « tout crédit » à « on va tuer le marché du crédit ». Comme l’immobilier est assis sur le crédit, c’est un revirement un peu violent. Ceci étant dit, il n’y a pas de capital productif qui va disparaître.

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