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Chute des exportations et ralentissement de la croissance : pourquoi la BCE doit réagir rapidement pour soutenir une économie européenne en grand danger
©REUTERS/Ralph Orlowski

Alerte rouge

Suite à un été marqué par le ralentissement des pays émergents, les premiers signes d’un impact sur l’économie européenne commencent à apparaître : la demande extérieure, sur laquelle se base le modèle allemand, est fragilisée par les difficultés que traversent aujourd'hui ces mêmes pays émergents. Confrontées à une problématique identique, les banques centrales étrangères ont déjà choisi de réagir. Le 22 octobre prochain, la BCE sera attendue au tournant.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Le 22 octobre prochain, le conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne se réunira une nouvelle fois afin de décider de la suite à donner à la politique monétaire de la zone euro. Si ce type d’évènement semble souvent anecdotique ou insignifiant pour le grand public, il s’agit pourtant des seules réunions ayant un réel impact sur le niveau d’activité économique du continent. Et elles sont à ce titre, véritablement décisives. 

Si l’année 2015 s’annonce comme celle du début de la reprise pour le continent, largement en raison de la mise en place du plan de relance monétaire décidé par la même BCE en janvier dernier, le ciel économique européen tend à s’assombrir au cours de cet automne. En effet, après un été marqué par le ralentissement économique chinois, ou les récessions brésilienne et russe, la zone euro est aujourd’hui confrontée à un affaiblissement de la demande étrangère, menaçant dès lors le volume de son commerce extérieur.

Ainsi, et à l’occasion de la publication de son point de conjoncture de la zone euro, le 6 octobre dernier, l’INSEE titrait "La demande intérieure tire la reprise" en indiquant :  "À l’horizon de la prévision, la demande intérieure resterait vigoureuse principalement grâce au dynamisme de la consommation. La demande extérieure ralentirait légèrement au cours du second semestre 2015 compte tenu des difficultés rencontrées par les pays émergents, particulièrement la Chine". L’économie européenne est ainsi prise entre deux feux, entre une demande intérieure soutenue par un plan de relance monétaire, et une demande extérieure fragilisée par des pays émergents en difficulté.

Et, depuis quelques jours, ce risque tend à se préciser. Ce 8 octobre, la Banque de France publiait son point de conjoncture relatif à la croissance française en ce 3e trimestre 2015. Après avoir estimé cette croissance à 0.3% pour ce même trimestre, celle-ci s’affiche désormais à 0.2%. Bien que les activités de services apportent satisfaction, c’est du côté de l’activité manufacturière que la déception a lieu. 

De façon plus claire, c’est du côté de l’Allemagne, géant exportateur de la zone euro, que l’impact du ralentissement étranger se précise. L’institut de statistiques local, Destatis, publiait ainsi les dernières données du commerce extérieur allemand. Malgré une hausse sensible des échanges internationaux au cours de la dernière année, le mois d’août témoigne d’une chute brutale des exportations de 5.2% et de 3.1% pour les importations.

Commerce extérieur allemand. Source DESTATIS

Bien que le chiffre isolé de ce seul mois d’août ne puisse permettre de tirer une conclusion définitive, la révision à la baisse des prévisions de croissance allemande de la part des plus grands think tanks du pays, DIW, Ifo, IWH, et RWI, vient confirmer ce sentiment de prudence. En effet, alors que la croissance du pays était attendue à 2.1% pour cette année 2015, le chiffre vient d’être abaissé à 1.8%. Selon ces organismes, la forte exposition de l’économie allemande aux marchés extérieurs la rend plus vulnérable aux remous subis par les pays émergents, ce qui est à l’origine de cette révision baissière.

Une tendance qui est également confirmée par l’institut Markit, lors de la publication du dernier indicateur des directeurs d’achat (PMI) pour la zone euro. 

"L’économie de la zone euro continue de se redresser en septembre, les hausses soutenues de l’activité et des nouvelles affaires favorisant de nouvelles créations de postes au cours du mois. La croissance de l’activité ralentit toutefois, son taux fléchissant à un plus bas de 4 mois."

"L’essoufflement de la croissance observé au cours de la dernière période d’enquête fait en effet surgir le risque d’un nouveau ralentissement au quatrième trimestre, tendance qui à son tour, pourrait inciter la Banque centrale européenne à poursuivre et accélérer ses mesures d’assouplissement quantitatif."

Et c’est cette conclusion de l’institut Markit qui devrait inciter la Banque centrale européenne à revoir son positionnement actuel. En effet, lors de la dernière réunion du conseil des gouverneurs, en septembre dernier, une telle modification était jugée prématurée, dans l’attente d’éléments pouvant confirmer les risques qui pèsent sur l’économie de la zone euro.  A cette occasion, la BCE indiquait : "En tenant compte des vues exprimées par le Conseil des gouverneurs, le président a conclu qu'il restait prématuré de juger si les récents développements auraient un impact durable sur les perspectives à moyen terme pour la stabilité des prix".

Désormais, la BCE dispose d’éléments plus tangibles lui permettant de justifier un approfondissement de son action. Ceci afin de venir compenser l’affaiblissement de la demande extérieure par un soutien supplémentaire de la demande intérieure. C’est-à-dire par un élargissement de son plan d’assouplissement quantitatif mis en place en janvier dernier.  Mais la Banque centrale européenne dispose d’un autre argument pour justifier une telle action. En effet, alors que son objectif statutaire est d’atteindre une inflation proche mais inférieure à 2% sur le moyen terme, les dernières projections font état d’une inflation de 0.1% en 2015 et de 1.1% en 2016, ce qui lui laisse une marge d’action considérable.

Confrontées à la même problématique d’une demande étrangère en baisse, les banques centrales américaine et britannique ont choisi de réagir en changeant leur plan de relèvement des taux directeurs, ceci afin de continuer à soutenir leurs économies. Pour que la reprise européenne puisse prétendre rejoindre, un jour, les taux de croissance connus dans les pays anglo-saxon au cours des dernières années, et pour éviter de subir un nouveau ralentissement, la Banque centrale européenne n’aura d’autre choix que d’agir au cours de cette réunion du 22 octobre prochain. Sans cela, l’institution monétaire européenne pourra une nouvelle fois être tenue pour responsable de l’anémie économique du continent. Parce qu’encore une fois, elle ne pourra pas prétendre qu’elle n’avait pas été prévenue par une batterie d’indicateurs défavorables.

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