Censure partielle de la loi Travail par le Conseil constitutionnel : tout comme le contenu de la loi, une décision qui aurait pu aller plus loin<!-- --> | Atlantico.fr
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Le Conseil Constitutionnel a jugé que cette liberté était excessive et que le législateur se devait de fixer le mode de calcul de l'indemnité. On notera que cette disposition est à double tranchant.
Le Conseil Constitutionnel a jugé que cette liberté était excessive et que le législateur se devait de fixer le mode de calcul de l'indemnité. On notera que cette disposition est à double tranchant.
©Wikimedia Commons

Un tout petit pas en avant

Le Conseil Constitutionnel a déçu sans véritablement surprendre dans sa décision relative à la loi Travail, tombée ce 4 août 2016. En vérité, et compte tenu des motifs de saisine avancés par les parlementaires, on attendait peu de cette décision. Et on avait bien raison : elle ne bouleversera pas durablement l'état du droit du travail.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Le recours au 49-3 validé

Les parlementaires de gauche avaient invoqué l'illégalité du recours au 49-3 dans le débat parlementaire. Selon eux, le gouvernement aurait décidé, à chaque étape, d'y recourir après un Conseil des Ministres. Le Conseil Constitutionnel ne partage pas cette opinion, et considère qu'une seule délibération en Conseil des Ministres suffit pour engager plusieurs fois le 49-3 sur le même texte. 

Le sujet n'intéresse guère que les spécialistes. Mais la question méritait d'être posée pour préciser les conditions constitutionnelles d'engagement du 49-3.

Les mises à disposition de locaux syndicaux dans le collimateur

Le Conseil Constitutionnel censure par ailleurs certaines dispositions de l'article 27 sur la mise à disposition de locaux syndicaux par les collectivités locales. Le sujet est technique mais mérite d'être signalé car le Conseil Constitutionnel a entendu protéger le contribuable contre d'éventuels excès commis par ces collectivités au bénéfice des organisations syndicales. 

En effet, la loi a prévu une indemnité pour les organisations syndicales privées de locaux par les collectivités. Cette indemnité est due si la collectivité ne propose pas de locaux de substitution. De fait, cette mécanique peut constituer une véritable tentation de financement, en l'état de la rédaction du texte. Le montant de l'indemnité est en effet tout à fait libre. 

Le Conseil Constitutionnel a jugé que cette liberté était excessive et que le législateur se devait de fixer le mode de calcul de l'indemnité. On notera que cette disposition est à double tranchant. Elle protège les organisations syndicales contre une indemnisation trop faible. Mais elle les empêche aussi de bénéficier d'une indemnité trop importante qui constituerait une source déguisée de financement. 

Le retour des franchises

Les sénateurs avaient interrogé le Conseil Constitutionnel sur la conformité des dispositions de la loi Travail touchant au réseau des franchises. Selon nos informations, le gouvernement avait subi, sur ce point qui concerne plusieurs centaines de milliers de salariés, l'influence de conseillers extérieurs qui avaient soufflé l'idée de réglementer les franchises. Ce point avait suscité une polémique en son temps, puisque cette loi qui se voulait favorable à une déréglementation partielle du travail  introduisait, pour les franchises, de nouvelles contraintes. 

Dans la pratique, le Conseil Constitutionnel a débouté les mauvaises influences du gouvernement en considérant que la loi ne pouvait faire peser sur le seul franchiseur, sans intervention des franchisés, le coût de mise en place d'une structure de dialogue avec les salariés. 

La complémentaire santé également visée

Le Conseil Constitutionnel a soulevé d'office l'article 62 qui permet à l'employeur de financer au-delà du 31 décembre 2016 un contrat individuel de complémentaire santé pour un salarié. Ce point relativement mineur interdit donc à une entreprise de financer le contrat santé de l'employeur salarié. 

Rien sur les TPE - PME

On notera que le Conseil Constitutionnel n'a pas soufflé mot des dispositions qui permettent aux grandes entreprises de déroger à la loi lorsque les très petites entreprises ne leu peuvent pas. Il faudra donc soulever un contentieux pour remettre en cause ces dispositions. 

Rien sur l'opacité des branches

Autre déception: le Conseil Constitutionnel n'a pas soulevé d'office le manque de transparence des branches professionnelles dans les négociation collectives. Ce point ne manquera pourtant pas de poser problème dès lors que les branches auront la faculté de fixer les dérogations possibles à la loi dans le cadre de la branche. 

Ces questions devront faire l'objet d'un contentieux futur pour être tranchées. 

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