Ça n’en a pas l’air mais la baisse des salaires réels au Royaume-Uni est en fait la preuve de la solidité des chiffres de l'emploi britannique<!-- --> | Atlantico.fr
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Outre Manche les salaires ont baissé à des niveaux inédits depuis le début des années 2000, conséquence logique d'un mouvement massif d'embauches dans le pays.
Outre Manche les salaires ont baissé à des niveaux inédits depuis le début des années 2000, conséquence logique d'un mouvement massif d'embauches dans le pays.
©Reuters

Contre-intuitif mais vrai

Outre-Manche, les salaires ont baissé à des niveaux inédits depuis le début des années 2000, conséquence logique d'un mouvement massif d'embauches dans le pays.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Le 19 novembre, l’office national de statistiques du Royaume-Uni publiait son étude annuelle des revenus de l’année 2014. Et à première vue, les nouvelles ne sont pas bonnes. D’une part, le revenu médian a baissé en termes réels de 1.6% par rapport à 2013, c’est-à-dire la plus forte baisse depuis 2011. Et d’autre part, les salaires ajustés de l’inflation ont continué de baisser depuis 2008, pour atteindre des niveaux inédits depuis le début des années 2000.

La conclusion la plus naturelle à tirer d’une telle publication serait de considérer que la croissance du Royaume-Uni n’est pas réelle. A quoi bon avoir de la croissance si les revenus de la population baissent ?

Revenu hebdomadaire médian à prix courants et réels (2014).

En effet, même si le graphique ci-dessus démontre que les revenus courants, c’est-à-dire non ajustés de l’inflation, continuent de progresser, le salaire réel, lui, affiche bel et bien un recul. Il convient alors d’aller chercher les causes d’un tel phénomène puisque la croissance britannique est attendue à 3.2% pour 2014, c’est-à-dire la plus forte croissance des pays du G7. La contradiction semble totale.

En premier lieu, il est nécessaire de définir la notion de salaire médian. 50% des employés ont un salaire supérieur et les 50% restants ont un salaire inférieur. Ainsi, cette photographie du marché de l’emploi britannique nous renseigne sur le niveau de revenus mais également sur la composition du marché de l’emploi. Et c’est là que la principale divergence apparaît.

En effet, au cours de la dernière année, l’économie britannique a cassé un nouveau record en termes de personnes employées, un record aujourd’hui fixé à 30.79 millions de personnes. Une hausse impressionnante de 694 000 emplois créés depuis l’automne 2013, et de 132 000 au cours du dernier trimestre. Sur la même période d’une année, les chiffres du chômage se sont dégonflés quant à eux de 594 000 personnes. Ici, aucune ambiguïté n’est possible, l’économie britannique a bien crée de l’emploi, et ce de façon massive.

Puis, en second lieu et en se retournant du côté du salaire médian, cette franche embellie du marché de l’emploi n’est pas sans incidence. Car si le salaire médian a baissé depuis 2013, il ne faut pas oublier de considérer que le panel d’employés "médians" de 2013 n’est plus le même en 2014. Ils sont 694 000 de plus. En tout état de cause, si ces nouvelles personnes intégrées dans le marché de l’emploi sont, soit des jeunes, soit des employés non qualifiés, c’est-à-dire des personnes ayant un bas salaire, l’effet général sera alors de faire "baisser" la moyenne, ou la médiane, des salaires existants.

Reste à vérifier et à mesurer cette situation. Pour cela, il suffit de prendre en compte l’évolution du salaire des personnes en poste depuis au moins un an, c’est-à-dire en ne tenant pas compte, entre autres, des personnes nouvellement employées. Et là, le constat est étonnant :

Revenu hebdomadaire médian des employés : (1. Ensemble (bleu foncé) et 2. Ceux en poste depuis au moins un an (bleu clair) et inflation (en pointillés) (2014).

Encore une fois, le constat global est une stagnation des revenus de l’ensemble des employés qui provoque une baisse du salaire réel (pouvoir d’achat) en raison d’une inflation plus élevée. Par contre, les revenus des personnes en poste depuis au moins une année progressent de 4.1%, contre une inflation à 1.8%. Ce qui permet de vérifier l’évolution du salaire réel (ou plus globalement du pouvoir d’achat) des personnes ayant un poste fixe :

Evolution du salaire réel des personnes en poste depuis un an

Alors que l’évolution des revenus des personnes en poste s’est bien écroulée depuis l’entrée en crise, arrivant même à une situation de baisse en 2011, la reprise a été réelle depuis lors. En 2014, ces salaires progressent sur des bases plus "saines" de 2.3% en annuel.

Ainsi, la baisse réelle du salaire médian britannique n’est pas en soi une mauvaise nouvelle. C’est la cause de cette baisse qu’il est nécessaire de rechercher afin d’évaluer la nature de la situation. Et Le phénomène à l’œuvre est que la croissance en cours permet une baisse significative du taux de chômage et l’intégration progressive des moins qualifiés au sein de l’économie. En les intégrant dans le marché de l’emploi, la moyenne et la médiane baissent logiquement. Ainsi, si le salaire médian chute de 1.6% en termes réels, le nombre de salaires versés augmente de 2.31%. Et le salaire médian progressera pour tout le monde une fois que le plein emploi sera atteint. Une situation qui est  proche d’être atteinte aujourd’hui.

Car à l’inverse, si le taux de chômage britannique ne baissait pas et que les salaires des employés affichaient une hausse, cela traduirait une économie incapable d’intégrer les personnes les moins qualifiées et une croissance qui ne serait partagée que par quelques-uns.

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