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Borgia : sexe et ultra violence
en odeur de sainteté sur Canal+
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Série TV

C'est la dernière série télé de Canal. Tous les lundi, Borgia narre les aventures du pape Alexandre VI et de ses enfants. Au programme : décapitations, mutilations, fornications et excommunications.

Laurence Lasserre

Laurence Lasserre

Laurence Lasserre est spécialiste de la communication publique et des medias.

 
 
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Commençons par le Pape. Catalan d'origine, l'impétrant se fait élire par un cénacle d'Italiens à coup de poulets au cul truffé de lettres de promesses contenant diverses propositions d'archevêchés, servis en douce aux cardinaux enfermés et affamés. L'accord final se conclura au cours d'un entretien spécialement organisé dans les latrines de la Chapelle Sixtine, un lieu d'aisances consacré dont le confort a beaucoup évolué depuis la rénovation de Saint-Pierre de Rome. Tout cela est historique, et l'épisode de l'élection papale reste le sommet politique d'une série dans laquelle les alliances et retournements d'alliances ultérieurs sont plus complexes et incompréhensibles que les conditions d'abonnement à votre fournisseur d'accès internet, et que l'on renonce progressivement à comprendre pour se laisser porter par une succession de scènes au montage aussi saccadé qu'une course de haies.

Le pape, qui aime autant se faire baiser la chaussure que trousser allègrement sa dulcinée, est doté d'une progéniture qui, à notre époque, aurait justifié une intervention des services sociaux : son fils aîné, Juan, est un abruti congénital infoutu de commander la Garde Suisse. Sa fille, Lucrèce, d'une bêtise insondable, semble toujours avoir vu la Vierge, bien qu'elle s'efforce en vain de se faire culbuter par son propre époux. Le ponpon revient à Cesare, fou dangereux parfaitement pervers et allumé, dont on a du mal à imaginer qu'il put servir de modèle au Prince de Machiavel, et encore moins au ténébreux héros d'Assassin's Creed.

On l'a compris, l'intérêt de la série ne doit rien à ses personnages. Ce qui fait son charme indéniable, c'est la vitesse à laquelle les scènes de sexe et de violence s'enchainent et se succèdent, à un rythme dont le minutage soigneusement étudié semble sorti d'un programme informatique de fidélisation. Passe que le pape fornique et paillarde sans cesse, voire qu'il engendre une fille à quelques mètres du trône de saint Pierre. Passe que le fils, Cesare, soit brutalement sodomisé par le même rejeton de bonne famille auquel il a coupé un doigt quelques épisodes auparavant, lequel se venge légitimement de cet affront selon le principe de la riposte graduée. Ou bien, que la paire de testicules d'un capitaine français, qui avait imprudemment et brièvement honoré de ses ardeurs la maîtresse du pape, atterrisse sur la table de nuit du Saint Père. Lequel, devant l'audace du geste et de peur que la même mésaventure ne lui arrive, pardonne l'offense à sa douce. Passe que le très délicat Juan dépucèle à coup de majeur trempé dans la vinasse une demoiselle de compagnie, laquelle se jette aussitôt par la fenêtre avec son honneur perdu. Tout cela, c'est de la gnognotte.

Le triplé gagnant, me semble-t-il, est l'incomparable dialogue entre Juan, poète à ses heures, et sa propre sœur, à laquelle il ordonne de lui pratiquer une fellation, afin qu'elle ne perde pas la main, si je puis dire, en l'absence de leur très saint père. Si le porno est doublement crypté sur Canal, rassurez vous, vos enfants peuvent quand même avoir les meilleurs moments de Borgia en audio s'ils ne sont pas encore couchés. Sinon, il y a toujours la possibilité de mettre en VO ou de baisser le son.

J'accorderai la deuxième place de ce palmarès aux scènes gratuites mais néanmoins remarquables mettant en piste bourreaux et condamnés en place publique, avec une mention spéciale du jury pour l'exécution de deux pauvres bougres coupés en deux à l'aide d'une scie, dans le sens de la hauteur, mais en commençant par l'entrejambe, donc attachés à l'envers. Oui je sais, cela fait mal, ne serait-ce que de l'imaginer.

Enfin, la palme d'or revient incontestablement à la scène du bébé abandonné en haut d'une colline par Cesare, persuadé de se laver ainsi de ses innombrables péchés et de favoriser l'élection papale de son père dont il croit encore qu'il est son oncle. Scène insoutenable que cet enfant hurlant à pleins poumons laissé au bord du vide, et dont le poids sur la conscience vous plombe une semaine entière. On ne connaitra son véritable sort que lors d'un épisode ultérieur, où l'on apprendra que le bébé a été sauvé, subtilisé et définitivement éloigné des pensées et actions maléfiques de son géniteur. Afin de réparer cette ignominie et de calmer les esprits de spectateurs indignés mais néanmoins fidèles à leur rendez-vous du lundi en prime time, une autre scène permettra plus tard de voir ressusciter un nouveau-né, miracle accompli par une nonne illuminée qui excelle dans ce genre d'opérations magiques.

Voilà. Les Borgia, donc, après cette période bénie de la Toussaint, on peut difficilement faire mieux, bien que l'on puisse difficilement faire pire.

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