Boom Pécresse dans les sondages : la droite retrouvée. Trop fort, trop vite ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Valérie Pécresse après sa victoire lors de la primaire LR à Paris, le 4 décembre 2021.
Valérie Pécresse après sa victoire lors de la primaire LR à Paris, le 4 décembre 2021.
©ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP

Véritable dynamique ?

Donnée gagnante au second tour de l'élection présidentielle face à Emmanuel Macron dans un sondage Elabe pour L’Express et BFMTV, Valérie Pécresse bénéficie t-elle d'une véritable dynamique ou s'agit-il plutôt d'un effet ballon de baudruche ?

Joseph-Macé Scaron

Joseph Macé-Scaron

Joseph Macé-Scaron est consultant et écrivain. Ancien directeur de la rédaction du Figaro magazine et de Marianne, il est, notamment, l'auteur de La surprise du chef (2021) et Eloge du libéralisme (2020), aux éditions de L'Observatoire. 

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Atlantico : Dans un sondage Elabe pour L’Express et BFMTV, Valérie Pécresse, tout juste investie par Les Républicains à l’issue de leur congrès, est donnée gagnante au second tour de l’élection présidentielle face à Emmanuel Macron. Alors qu’elle était donnée aux alentours de 10% avant son élection, ce sondage est-il la preuve d’une véritable dynamique pour la candidate des Républicains ? Quels en sont les ressorts ?

Joseph Macé-Scaron : Le sondage d’Elabe n’est pas le seul à enregistrer une dynamique en faveur de la candidate des Républicains. Un peu auparavant, celui effectué par l’Ifop pour Le Figaro, lui donnait une progression spectaculaire de sept points pour atteindre les 17% . Toujours selon ce sondage, elle obtiendrait même 48% au second tour face à Emmanuel Macron. Ce qui montrerait déjà que rien n’est joué pour la présidentielle. Mais la nouveauté du sondage Elabe est bien que pour la première fois, le président sortant est donné battu. 

Bien sûr, plusieurs hirondelles sondagières ne font pas nécessairement un printemps électoral. Bien sûr, les sondages ne donnent qu’un tableau de l’état de l’opinion à un instant T. Ces précautions d’usage étant prises, il apparaît donc que Valérie Pécresse enregistre une dynamique en sa faveur. Cette dynamique, elle a su la créer par sa rigueur et la sincérité de son engagement mais elle hérite aussi de la dynamique initiée par les Républicains dans leur ensemble. En effet, leur processus de désignation a été un succès et ce, jusqu’au vote électronique. Les caciques du PS se mordent les doigts, aujourd’hui, d’avoir eu un débat escamoté et un mode de désignation tronqué. Les débats entre les candidats LR ont pu paraître à juste titre répétitifs mais ils ont aussi mis en perspective des lignes de force. Pour la première fois, on a pu mesurer que les Républicains ne proposaient pas seulement l’alternance mais une alternative. 

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Ajoutons, bien évidemment, l’attrait de la nouveauté : Valérie Pécresse a bénéficié d’une certaine indifférence des éditorialistes à son égard. Ces derniers ne l’ont pas calculé (ce qui a été, au début, le cas d’Éric Ciotti). Des journalistes confirmés affirmaient même à la veille du premier tour qu’elle arriverait quatrième. De même ils ont joué à s’effrayer en imaginant la victoire au final du député des Alpes-Maritimes ou son ralliement immédiat à Eric Zemmour. Valérie Pécresse a été préservée du traditionnel panurgisme médiatique du « et-si-c’était-lui ? » qui passait en revue tous les candidats possibles et c’est assez farce. 

Cette montée fulgurante, d’abord dans le sondage IFOP puis dans celui d’Elabe pourrait-elle être contre productive pour la candidate ? Courre-t-elle le risque de monter trop vite, trop fort et que sa candidature s’essouffle avant la ligne d’arrivée ?

Dès la parution de ces sondages, la candidate a fait passer le message à ses soutiens qu’il fallait être prudents et se garder de tout triomphalisme. Elle a, de toute manière, comme directeur de campagne Patrick Stéfanini qui, mieux que personne, sait prendre la mesure des aléas qui surviennent dans une campagne électorale. Maintenant, je suis frappé, en effet, par l’idée que ces sondages pourraient être « contreproductifs ». Beaucoup de candidats à la présidentielle seraient heureux d’obtenir dans les enquêtes récentes des résultats aussi « contreproductifs ». 

Que montre ces sondages au fond ? Ils montrent que rien n’est joué pour la présidentielle comme je ne cesse de le dire et de l’écrire depuis bientôt quatre ans. Non, les Français ne sont pas condamnés à un face à face stérile entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen ce que l’ensemble des médias nous rabâchait en permanence comme s’il s’agissait là d’une absolue évidence. Valérie Pécresse va monter, descendre puis remonter mais il y a un élément majeur qu’il sera difficile d’effacer après ces deux sondages auprès des opposants à Emmanuel Macron : c’est le fait que, désormais , il est clair qu’elle incarne le vote utile.

Quelle peut et doit être sa stratégie pour capitaliser sur sa dynamique et ne pas la laisser retomber une fois l’effet de nouveauté estompé ?

Sa stratégie doit se déployer dans trois domaines bien différents. D’abord, elle doit se faire mieux connaître. L’image lisse ou bon élève ne correspond pas du tout à ce qu’elle est véritablement. La présidentielle suppose que l’on explique son histoire, ses passions, ses goûts. Et ce d’autant plus qu’Emmanuel Macron apparaît, lui, comme un être neutre et même désincarné.

Ensuite elle doit continuer de monter son appétence à traiter des sujets régaliens. C’est ce qu’elle a fait durant ces quatre débats. Elle se sent parfaitement à l’aise sur ces sujets en raison de son expérience de ministre mais aussi de présidente de région. A la différence de Marine Le Pen ou d’Éric Zemmour, elle connaît le terrain. Elle a, d’ailleurs, fait ce choix non seulement de le connaître mais de le vivre en installant le conseil régional en Seine-Saint-Denis. Quand elle parle de sécurité ou des ennemis de la République ou de l’islamogauchisme, elle sait de quoi elle parle.

Enfin, ancien ministre du Budget, elle possède sur le bout des doigts ce qui a été pendant des années le meilleur atout de la droite : la connaissance de la réalité économique du pays et des solutions à apporter pour remédier à son déclin industriel du pays. Sur ce terrain, elle ne court guère le risque d’être concurrencée par Marine Le Pen ou Eric Zemmour qui préfèrent douillettement se cantonner à un discours purement idéologique. Quant à ceux qui ont rejoints Emmanuel Macron comme Bruno Le Maire, excellent romancier, ils risquent en permanence à force de grand écart, la déchirure musculaire.

A quoi doit prendre garde la candidate de LR s’il elle veut maintenir cette dynamique et pouvoir effectivement atteindre le second tour, et le remporter, en avril prochain ?

Elle n’aura pas grand mal à garder à l’esprit d’incarner toujours une droite de conviction et de fermeté. La tentative d’en faire un Macron au féminin ne prend pas. Valérie Pécresse a souvent cette expression que ses concurrents n’ont pas eu : « je n’ai pas la main qui tremble ». Lors de sa dernière intervention où elle a pris en exemple la figure de Jeanne d’Arc et  s’est présentée comme une chef de guerre. C’est tout à fait dans son tempérament. Faut-il rappeler que pendant très longtemps être une femme dans les instances du RPR n’était guère une sinécure ?

Pour autant, cette conviction et cette fermeté doivent se conjuguer avec l’empathie. Elle ne peut pas comme François Fillon promettre du sang et des larmes. La pandémie est passée par là et les Français considèrent, à juste titre, qu’ils ont beaucoup soufferts. D’ailleurs, comme présidente de région, elle s’est illustrée plus que d’autres dans le souci de protéger ses concitoyens et d’améliorer leur quotidien. L’atout féminin joue ici dans le meilleur sens du terme. Son élection marquerait une rupture dans la pratique du pouvoir. Aussi sa candidature est ce que le politologue Dominique Reynié appelle « une promesse autoréalisatrice ».

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