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"Avant la terreur" : le portrait d’une époque, entre nihilisme et bouffonnerie. Une grande réussite …
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De : Vincent Macaigne, très librement inspiré de Richard III de William Shakespeare Durée : 3h Mise en scène : Vincent Macaigne Avec : Sharif Andoura, Max Baissette de Malglaive, Candice Bouchet, Thibault Lacroix, Clara Lama Schmit, Pauline Lorillard Pascal Rénéric, Sofia Teillet, et en alternance Camille Amétis, Clémentine Boucher-Cornu et Mia Hercun

Charles-Édouard Aubry pour Culture-Tops

Charles-Édouard Aubry pour Culture-Tops

Charles-Édouard Aubry est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).
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THÈME

La pièce de William Shakespeare met en scène l’ascension et la chute brutale du tyran.

La transposition qu’en fait Vincent Macaigne s’éloigne des faits pour s’intéresser aux personnages, aux luttes de pouvoirs qui les opposent et aux déchirements qui fait exploser la famille du Roi, mais aussi à la vie politique française et, plus globalement, l’état de notre société et l’héritage que nous laissons à nos enfants.

Il est donc difficile de résumer une pièce qui agrège des passages de Shakespeare mais aussi d’autres auteurs et de lui-même. Il ne faut surtout pas chercher dans la pièce du dramaturge anglais un fil conducteur mais accepter de se perdre dans les méandres historico-politico-philosophiques que Macaigne nous propose.

POINTS FORTS

Ses admirateurs, surtout s’ils ont vu son précédent spectacle – Je suis un pays, en 2017 – ne seront donc pas surpris de découvrir Avant la terreur, qu’il qualifie lui-même d’ « hyper brut ». La mécanique scénique monumentale et extrêmement ambitieuse se déploie dans la boue, l’eau, le faux sang, la merde et toutes sortes de liquides dévastateurs. Le spectateur est tout d’abord convié à rejoindre la scène pour partager, au milieu des acteurs, le début du spectacle. C’est le prélude à une immersion qui fait du public un élément à part entière du spectacle.

Pour Vincent Macaigne, « le monde est bloqué de partout (…) et annoncé comme une forme d’apocalypse ». La fureur est partout dans Avant la terreur : les acteurs crient et s’apostrophent plus qu’ils ne se parlent dans un climat de violence permanente, comme reflet de notre époque. Certes de beaux moments mélancoliques et désespérés parsèment cette vision glaçante et cauchemardesque, mais c’est surtout l’apocalypse qui nous guette à chaque instant.

Richard III n’est qu’un prétexte pour l’auteur d’exprimer sa vision de la société, de donner à voir l’état du monde. Bêtise, cruauté, folie, assassinats, dévastation tout semble n’être que drame en séries. Les repères temporels sont brouillés, les personnages sont les jouets d’un jeu de massacre : tout espoir semble perdu comme le montrent ces images d’accidents projetées en fond. Tout cela nous est jeté en pleine face et nous atteint comme un uppercut.

Vincent Macaire exige beaucoup de ses comédiens et comédiennes. Physiquement et psychologiquement. Ils répondent avec une énergie incroyable, un jeu d’une justesse parfaite ; ils font don de leur corps et de leur voix au texte et aux indications du metteur en scène. On donnera la palme à Pascal Rénéric, qui campe un Richard III, tour à tour machiavélique et perdu, puissant et idiot.

QUELQUES RÉSERVES

Évidemment, ce théâtre là risque de décontenancer, voire de choquer les partisans d’un théâtre plus classique, où la violence n’explose pas à chaque instant.

Et ceux qui ont vu Je suis un pays pourront, à juste titre, se plaindre d’une certaine redite dans la mise en scène.

ENCORE UN MOT...

Macaigne pile et face.
Pile au cinéma, acteur figure de proue du renouveau du cinéma français, en jouant des personnages plutôt complexés, dépressifs et mal à l’aise.
Face au théâtre, metteur en scène de spectacles totalement débridés, violents, qui déboulonnent le théâtre classique et font exploser les conventions.

UNE PHRASE

« Georges, ton nom est la seule chose que l’avenir peut te promettre, et peut-être bien que dans une centaine d’années, après tous ces actes sanglants, qui te semblent héroïques, ton nom sera écrit sur le panneau indicateur d’une quelconque rue anglaise et ta vie, tes aventures, ton sang, tes amours, ta haine, tout ça, serviront aux citoyens d’un nouveau monde comme repère géographique et ce n’est pas donné à tout le monde de devenir un point géographique ». Lady Anne

L'AUTEUR

Vincent Macaigne est né en 1978, d’un père français et d’une mère iranienne. Il découvre le théâtre au lycée puis il entre au Conservatoire national d’art dramatique de Paris en 1999.

Il monte plusieurs spectacles et accède à la notoriété en 2009 avec la création de d’Idiot, inspiré de l’Idiot de Dostoïevski. En 2011 à Avignon, il et en scène une adaptation de Hamlet. En 2017, il crée Je ne suis pas un pays à la Colline.

Parallèlement, Vincent Macaigne mène une carrière cinématographique et enchaîne les rôles au cinéma et à la télévision, dans des films comme Médecin de nuitChronique d’une liaison passagère, Bonnard, Pierre et Marthe, ou encore la série TV Irma Vep.

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