Allergies : nos maisons plus polluées que le périph’<!-- --> | Atlantico.fr
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En France, la fréquence de l’asthme est de 10 à 12 % chez les treize-quatorze ans
En France, la fréquence de l’asthme est de 10 à 12 % chez les treize-quatorze ans
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Bonnes feuilles

Classées quatrième maladie chronique mondiale par l’OMS, les allergies ne cessent d’augmenter. Cet essai en examine les différents types (pollens, acariens, poils d’animaux, alimentation, pollution…) et en analyse les origines. Mais, il expose également la façon dont on peut les combattre. Extraits de "Le livre noir des allergies" d'Isabelle Bossé, Pierrick Hordé et Guy Hugnet aux éditions l'Archipel 2/2

Pierrick  Hordé

Pierrick Hordé

Pierrick Hordé est allergologue 

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Guy  Hugnet

Guy Hugnet

Guy Hugnet, journaliste indépendant spécialisé dans les enquêtes scientifiques, collabore au Point et à Sciences et Avenir.

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Isabelle  Bossé

Isabelle Bossé

Isabelle Bossé est présidente de l’ANAICE, syndicat des allergologues exclusifs français, qui se bat pour la reconnaissance de l’allergologie.

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Amusez-vous à faire le test. Posez cette question à vos proches ou à vos collègues de bureau : « Que craignez-vous le plus ? La pollution extérieure ou la pollution intérieure ? L’air du dehors ou celui de votre appartement, de votre maison ou de votre bureau ? » À coup sûr, l’écrasante majorité répondra sans hésiter : « La pollution extérieure. » Certains ajouteront : « C’est une horreur, toutes ces saletés qu’on respire. » D’autres ne comprendront même pas que vous leur posiez cette question.

Et pourtant, les faits sont là, têtus, implacables, incontestables même, la pollution domestique, celle de nos habitations, est nettement plus élevée que la pollution extérieure. Cinq à sept fois supérieure, selon les estimations. C’est une donnée reconnue par les scientifiques, les médecins et les pouvoirs publics, mais à laquelle la majorité d’entre nous restent pour l’instant encore peu sensibles. Alors que les cocktails de polluants que nous respirons au-dehors ainsi qu’à l’intérieur de nos chaumières – sans en être conscients bien souvent – peuvent être à l’origine de nombreux troubles respiratoires. Comme souvent, les enfants sont les premiers « impactés ». Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en France, la fréquence de l’asthme est de 10 à 12 % chez les treize-quatorze ans. Un signal d’alerte très fort.

Les enfants d'abord

Irritation des yeux, de la peau, congestion nasale, maux de tête, asthme, les allergologues voient de plus en plus fréquemment des jeunes qui présentent des symptômes allergiques. La faute à qui, ou à quoi ? Les parents désemparés invoquent pêle-mêle les particules fines du diesel, le dioxyde d’azote, les pollens, etc. Ce n’est pas faux. D’autant que certains bambins des grandes métropoles ont été longuement baladés dans des poussettes à hauteur de pots d’échappement. Ces mêmes gaz qui s’infiltrent dans les appartements, les bureaux, à l’intérieur des classes…

En 2012, Isabella Annesi-Maesano, directrice de recherche à l’Inserm, a publié une étude sur la qualité de l’air menée dans cent huit écoles primaires, réparties sur six villes françaises. Son enquête a révélé qu’environ 30 % des enfants suivis – ils étaient 6 590 au total – étaient exposés à des niveaux de polluants atmosphériques supérieurs aux valeurs recommandés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Avec, pour conséquence directe, une augmentation de l’asthme et des rhinites chez les enfants scolarisés, les plus à risques étant évidemment les enfants déjà allergiques.

Une analyse plus fi ne des polluants en cause a montré sans surprise l’implication du dioxyde d’azote (N02) mais a surtout révélé la présence d’autres toxiques, redoutables, intérieurs ceux-là. Leur nom de famille – les aldéhydes – résonne comme celui d’une aimable peuplade grecque antique, à qui on confierait sa progéniture les yeux fermés. Et, pourtant, il faut s’en méfier comme de la peste. Le plus connu d’entre eux, le formaldéhyde – retenez bien ce nom, au premier abord il paraît imprononçable, mais avec un peu d’entraînement et en décomposant les cinq syllabes for-mal-dé-hy-de, on y parvient assez facilement –, est un gaz irritant et allergisant, y compris à faibles concentrations. C’est l’ennemi intérieur, un tueur silencieux qui s’infiltre absolument partout dans votre maison, votre appartement, votre bureau ou votre voiture.

Excusez du peu, on trouve du formaldéhyde dans les bois agglomérés, les colles synthétiques, les peintures, la fumée des cigarettes, des bougies, de l’encens, des cheminées, le parquet stratifi é, la laine de roche et de verre, mais aussi les vernis, les mousses isolantes, les détergents, désinfectants, lingettes, insecticides, parfums d’intérieur, sprays assainissants, etc. D’abord considéré comme cancérigène possible pour l’homme, il a été ensuite classé comme « cancérigène certain » par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC).

Et, pour (ne pas) arranger les choses, le formaldéhyde appartient à l’immense famille des composés organiques volatils (COV), un ensemble de substances chimiques extrêmement variées qui, comme leur nom l’indique, possèdent en commun la propriété d’être volatiles. Et donc se répandent facilement dans l’atmosphère ambiante, celle des appartements notamment. C’est ainsi que les COV émis par les produits que nous utilisons au quotidien – matériaux, meubles, travaux de décoration, de bricolage, etc. – nous font respirer un air intérieur plus pollué que l’air extérieur.

Les bambins aussi

Personne n’est épargné par ce tourbillon noir, surtout pas les tout-petits. En 2009, l’Association Santé Environnement France a testé la qualité de l’air intérieur de neuf crèches françaises. Trois molécules étiquetées comme hautement préoccupantes – les phtalates, le benzène

et le formaldéhyde – ont été analysées par un laboratoire scientifique. Résultat : les deux tiers des crèches présentaient des taux de benzène supérieurs au seuil de référence et la totalité affi chait des taux de formaldéhyde supérieurs aux recommandations européennes sur la qualité de l’air. Quatre d’entre elles dépassaient même la valeur toxique de référence (10 μg/m3 pendant un an). Seule bonne nouvelle : les taux de phtalates inhalés étaient rassurants.

Ces investigations et d’autres ont fini par interpeller les pouvoirs publics. En l’espace de quelques années, la qualité de l’air intérieur est devenue une préoccupation au plan national et européen. Isabella Annesi-Maesano pilote actuellement plusieurs études de dimension internationale destinées à mesurer l’impact de la qualité de l’air à diff érents stades de la vie : enfance, petite enfance et même chez des foetus.

Extraits de "Le livre noir des allergies" d'Isabelle Bossé, Pierrick Hordé et Guy Hugnet aux éditions l'Archipel, 2015.

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