Allergies : ces ingrédients que Chanel et Paic citron ont en commun<!-- --> | Atlantico.fr
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Les allergies sont classées quatrième maladie chronique mondiale par l’OMS.
Les allergies sont classées quatrième maladie chronique mondiale par l’OMS.
©Jo Yong hak / Reuters

Bonnes feuilles

Classées quatrième maladie chronique mondiale par l’OMS, les allergies ne cessent d’augmenter. Cet essai en examine les différents types (pollens, acariens, poils d’animaux, alimentation, pollution…) et en analyse les origines. Mais, il expose également la façon dont on peut les combattre. Extraits de "Le livre noir des allergies" d'Isabelle Bossé, Pierrick Hordé et Guy Hugnet aux éditions l'Archipel 1/2

Pierrick  Hordé

Pierrick Hordé

Pierrick Hordé est allergologue 

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Guy  Hugnet

Guy Hugnet

Guy Hugnet, journaliste indépendant spécialisé dans les enquêtes scientifiques, collabore au Point et à Sciences et Avenir.

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Isabelle  Bossé

Isabelle Bossé

Isabelle Bossé est présidente de l’ANAICE, syndicat des allergologues exclusifs français, qui se bat pour la reconnaissance de l’allergologie.

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Parabènes, MIT, parabènes… le docteur Martine Vigan, dermato-allergologue à Besançon, observe ce ballet avec curiosité. « Les cosmétiques sont les symboles du luxe, de la beauté, ils nous font rêver, c’est pourquoi on les paie souvent très cher. Pourtant, et la plupart des gens l’ignorent, on trouve dans les produits des grandes marques, Chanel et autres, les mêmes ingrédients que dans ceux dits “bas de gamme”, le Paic citron, les lessives, lingettes, la peinture ou les liquides de refroidissement.» De fait, de la MIT ou apparentés, il y en a partout autour de nous, mais nous ne le savons pas. On l’inhale, elle nous pique la peau sans qu’on s’en rende compte. L’eczéma, bien souvent, ce n’est pas très grave. Ça se soigne facilement, en général. On n’en meurt pas. 

Martine Vigan nous met cependant en garde : « Des plaques rouges et des démangeaisons peuvent apparaître jusqu’à soixante-douze heures après que la peau est entrée en contact avec la MIT. Parfois, de fines particules qui subsistent dans l’air après l’utilisation d’un produit suffisent à déclencher une réaction allergique. Elles peuvent apparaître subitement, même si on utilise déjà le produit depuis longtemps. » Et l’allergologue de rappeler que « quand on est allergique à la MIT, c’est pour la vie ». Dans son numéro de septembre 2013, la revue 60 millions de consommateurs dressait la liste d’une centaine de molécules qu’il est préférable d’éviter pour notre santé. La MIT et les autres membres de sa famille y figurent en bonne place.

À proscrire également : le triclosan, présent dans les crèmes à raser, déodorants, dentifrices, savons… ; le phénoxyéthanol, dans les lingettes pour enfants, ainsi que vingt-six parfums allergisants – linalol, géraniol, citronellol, limonène, citral, etc. – que l’on trouve dans les cosmétiques, lessives, produits d’entretien, détergents, désodorisants et même certains médicaments. À noter que, depuis 2004, à la suite d’une loi française d’orientation de santé publique adoptée aujourd’hui par le Règlement cosmétique européen, les consommateurs ont la possibilité de déclarer à l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) les effets indésirables observés avec les cosmétiques.

De leur côté, professionnels de santé et industriels sont, eux, dans l’obligation de signaler à l’ANSM ou à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) les effets graves imputables aux mêmes cosmétiques. Lorsque l’Agence enregistre un signal fort, elle avertit l’Europe. Côté professionnel, le réseau Revidal, réseau de vigilance en dermato-allergologie, collecte, en plus de l’ANSM et des fabricants, les effets indésirables liés à des allergènes entraînant des allergies cutanées, notamment dans les cosmétiques. Ce qui permet, quand une substance ou un produit fini – une crème de jour, par exemple – est signalé(e) plusieurs fois, de mettre en place une vigilance particulière sur ce produit et de découvrir des « néoallergènes » jusqu’alors ignorés.

Le fait que les mêmes toxiques alimentent une longue chaîne de produits de consommation courante – cosmétiques, lingettes, lessives, etc. – peut être la source de problèmes de santé importants. Le risque étant l’effet cocktail. Greenpeace souligne que plus de deux cents substances chimiques synthétiques sont retrouvées dans notre corps lors d’analyses pour la plupart mises sur le marché à une époque de réglementation européenne permissive. Or, très peu de données scientifiques existent sur les effets à long terme de ces polluants et leurs possibles interactions les unes avec les autres.

Être exposé au quotidien à des substances potentiellement toxiques, c’est l’une des craintes qui pousse de nombreux consommateurs dans les bras du bio et autres produits naturels, « hypoallergéniques », sans oublier les désormais incontournables huiles essentielles. Selon une étude du cabinet Kline, le marché mondial des cosmétiques à base de produits naturels sera en croissance d’environ 10 % par an jusqu’en 2016, contre 4 à 5 % pour le marché dans son ensemble.

Les géants de la cosmétique – L’Oréal, Beiersdorf, Unilever, Procter & Gamble, etc. – ont senti le vent tourner. Le fruit étant mûr, ils se sont mis au « bio » ou aux produits dits « naturels ». Les unes après les autres, les petites enseignes pionnières sur le secteur ont été avalées. Un grand classique, mais, conséquence de ce greenwashing ambiant, le mot naturel s’est beaucoup… dénaturé, et le consommateur a fini par y perdre son latin.

« Ce qui constituait une avant-garde écologiste, à la recherche d’alternatives aux cosmétiques conventionnels, constitue maintenant un courant social de grande ampleur », estime Elfriede Dambacher, PDG de la maison d’édition Naturkosmetik, à Dortmund. « Ces consommateurs ont de nouvelles valeurs et recherchent des produits capables de les mettre en œuvre, qui soient sans danger, sains et sans risque pour l’environnement. » Soit ! Mais les cosmétiques bio ou naturels sontils vraiment sans danger ? Et d’abord, quelle différence entre cosmétiques conventionnels et bio ? Examinons les points essentiels. Pour le premier, des ingrédients synthétiques, environ 1 % de principe actif, ainsi que des additifs issus de la pétrochimie en pagaille, dont les fameux parabènes, MIT, triclosan… Pour le second, des produits naturels, jusqu’à 35 % de principes actifs, des conservateurs naturels…

Le match semble donc plié d’avance. Soulignons néanmoins que, si la liste des conservateurs autorisés dans les cosmétiques bio est limitée, certains conservateurs chimiques – comme le sodium benzoate ou le potassium sorbate – restent autorisés. Beaucoup de marques les emploient. Sont également utilisés, en cosmétique bio, des acides, comme l’acide benzoïque, l’acide salicylique, l’acide sorbique ou formique, l’alcool benzylique – qui a l’inconvénient d’être asséchant –, des huiles essentielles bactéricides et fongicides, qui ne sont pas considérées comme des conservateurs mais qui permettent de conserver les crèmes – des extraits de plantes –, comme le lichen ou la barbe de Jupiter.

Et c’est là que le bât risque de blesser. Car les labels bio garantissent l’origine de certains ingrédients mais pas l’innocuité du produit. Or, ils contiennent des plantes et huiles essentielles au potentiel allergisant. Une étude menée en Italie a montré 11 % de réactions d’intolérance à l’utilisation de produits à base de plantes – 139 réactions, parmi 1 274 utilisateurs italiens. Ainsi, les huiles de menthe, de lavande, de néroli peuvent être sensibilisantes, de même que le henné, y compris le « naturel ».

Extraits de "Le livre noir des allergies" d'Isabelle Bossé, Pierrick Hordé et Guy Hugnet aux éditions l'Archipel, 2015

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