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5 leçons essentielles des tendances 2014 de la papesse de l’internet
©Reuters

Où en est le Web ?

A l’occasion de la Code Conference organisée par Kara Swisher et Walt Mossberg, Mary Meeker, associée chez Kleiner Perkins, ex analyste Tech chez Morgan Stanley et prêtresse incontournable du digital depuis plus de 20 ans a présenté ses grandes tendances Internet 2014.

David Fayon

David Fayon

David Fayon est responsable de projets innovation au sein d'un grand Groupe, consultant et mentor pour des possibles licornes en fécondation, membre de plusieurs think tank comme La Fabrique du Futur, Renaissance Numérique, PlayFrance.Digital. Il est l'auteur de Géopolitique d'Internet : Qui gouverne le monde ? (Economica, 2013), Made in Silicon Valley – Du numérique en Amérique (Pearson, 2017) et co-auteur de Web 2.0 15 ans déjà et après ? (Kawa, 2020). Il a publié avec Michaël Tartar La Transformation digitale pour tous ! (Pearson, 2022) et Pro en réseaux sociaux avec Christine Balagué (Vuibert, 2022). 

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Atlantico : Mary Meeker, présentée comme la papesse du web depuis qu'elle a publié son premier rapport pour Morgan Stanley en 1995, a présenté mercredi 28 mai son analyse des tendances du web 2014 (voir ici). Parmi les 164 slides qu'elle a présentées, quelles grandes tendances vous semblent les plus déterminantes ?

David Fayon : Tout d’abord, le rapport de Mary Meeker est intéressant, bien documenté avec des statistiques utiles. Toutefois il n’apporte rien de révolutionnaire et surtout ne fait que de poursuivre les tendances observées sans prévoir les ruptures à venir qui se matérialisent par des signaux faibles en 2014. A cet égard, repartir du dernier Hype Cycle de Gartner est un bon point de départ.

Les points à retenir sont que la croissance des internautes se fait désormais plus lentement et que celle-ci est portée par les pays en développement au premier rang desquels l’Inde, le Nigéria, l’Indonésie, le Mexique et les Philippines.

D’autre part, la publicité sur mobiles et tablettes est le nouvel eldorabo en tant que sources de revenus pour les acteurs du web avec notamment la géolocalisation, la contextualisation. Notons que le RTB (Real Time Bidding, enchère en temps réel) est peu développé. Parmi les chiffres évoqués, l’ARPU (revenu moyen par abonné) est six fois supérieur pour Google que pour Facebook. Et l’ARPU de Facebook est le double de celui de Twitter.

Le succès des interfaces ergonomiques, sobres et intuitives ainsi que le commerce local sont pointés même si le rapport est très centré sur le marché américain. Sont ainsi mentionnés Uber pour les taxis, Waze racheté par Google pour la circulation routière, Airbnb et Yelp. Assez peu de développement est fait sur l’Asie. L’Europe reste pour sa part le grand oublié de cette analyse.

Peu de choses sont dites quant aux prévisions de croissance externe des GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) notamment la poursuite de l’élargissement de leur cœur de métier et leur diversification.

Les usages des outils de messagerie 2.0 comme WhatsApp ou Snapchat ou encore Viber et leurs évolutions sont analysés. Le nombre de photos téléchargées et partagées montrent la poursuite de la croissance de WhatsApp et de Snapchat, majoritaires depuis 2013 et la stagnation pour cet aspect de Facebook.

Il est à déplorer l’absence d’analyse de la stratégie de Microsoft sur le Web.

En terme de capitalisation boursière, le tableau page 138 est intéressant avec derrière les GAFA, le Chinois Tencent, et en 8e, Baidu. LinkedIn et Twitter sont respectivement 15e et 16e. Peu est dit sur le futur géant chinois du e-commerce Alibaba dont l’introduction en bourse a beaucoup fait parler de lui.

Je pense que l’accent n’est pas assez porté sur l’Internet des objets, l’impression 3D et les données (voir ici) avec à côté du big data les enjeux de l’open data.

Quelles évolutions d'Internet ces tendances dessinent-elles ?

Même si les relais de croissance se situent dans les pays en voie de développement, les Etats-Unis ont encore une belle carte à jouer notamment dans la croissance des usages, que ce soit l’évolution du shopping avec Amazon Fresch, la monnaie virtuelle (Bitcoin) ou encore les progressions des smartphones et des tablettes qui tirent la croissance du Web en attendant l’émergence de l’Internet des objets.

En effet, ce qui est peu dit est le passage à la troisième phase du Web, après le Web 1.0 qui était un web où l’information était descendante et concernait surtout les PC, le Web 2.0 a apporté le collaboratif avec en son cœur les réseaux sociaux et ce, de façon concomitante avec l’explosion des mobiles. Le Web 3.0 sera la conjonction de l’Internet des objets et de la sémantisation du Web.

La rencontre entre la télé et le Web est évoquée. Concrètement, nous avons des initiatives comme Kwarter de Carlos Diaz, qui permet la social TV avec des événements comme la future coupe du monde de foot de façon interactive et sociale. Cette gamification du web va s’amplifier notamment auprès des générations Y et Z qui outre leur attrait pour les réseaux sociaux éphémères constituent une cible captive.

Un grand absent du rapport concerne la vie privée (privacy) avec les questions liées à l’exploitation des données à des fins publicitaires notamment avec la profusion de capteurs liée à l’Internet des objets. Et le big data même si ces domaines d’application porteurs sont cités (santé, énergie, finances publiques).

La grande question est de savoir si les GAFA vont poursuivre leur emprise sur le Web ou si des nouveaux entrants pourront contester leur suprématie. Pour l’heure, Amazon, qui fait moins parler de lui que Google, Apple ou Facebook avec des marges faibles, est en train de devenir le supermarché planétaire. Les menaces pour les GAFA pourraient venir de l’Asie avec Baidu pour Google qui est celui des 4 qui a la plus grande longueur davantage avec en outre sa diversification à outrance, Samsung Electronics pour Apple qui innove moins depuis le décès de Steve Jobs, Alibaba pour Amazon et Tencent pour Facebook.

Et au-delà des entreprises du Web, force est de constater que toute organisation se numérise pour son développement ou même sa survie. En 2015, la question de la maturité numérique des organisations et de la mesure du degré de celle-ci va se poser avec acuité. Ne perdons pas de vue que la croissance des entreprises est tirée par le numérique et les nouveaux usages, produits et services qui en découlent.

Propos recueillis par Arnaud Boisteau

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