Quand l’éléphant prend l’eau et quand l’eau enchante la Lune : c’est l’actualité non poissonnière des montres un premier avril<!-- --> | Atlantico.fr
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Trois compteurs classiques pour un chronographe qui n’a pas pris de rides (Breitling)…
Trois compteurs classiques pour un chronographe qui n’a pas pris de rides (Breitling)…
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Atlantic-Tac

Mais aussi les 70 bougies d’une grande dame de l’horlogerie aéronautique, les échelles chromatiques d’une montre non-connectée qui se connecte au corps, les chiffres un peu dingues qui dansent pour les trente ans d’une icône et tout ce qui fait le sel de la vie des montres…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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HYT : Les eaux des heures…

Le nom de la marque en traduit les ambitions : HYT pour « Hydro-Mechanical Time » – soit en appeler à un fluide pour indiquer mécaniquement l’heure, ce qui était l’antique principe des horlogers à eau. Cette nouvelle marque indépendante avait fait un premier tour de piste dans les années 2010 avant de sombrer pendant la pandémie. Une nouvelle équipe a repris l’affaire en main pour la relancer, sur des nouvelles bases esthétiques et hydro-mécaniques. Le résultat est tout simplement éblouissant : la nouvelle Moon Runner a beau ressembler, au premier regard, à une montre « classique » [si tant est que ce mot ait un sens pour ce genre d’horlogerie conceptuelle], on comprend tout de suite qu’il s’y passe des choses étranges. Les heures sont affichées par la circulation d’un liquide dans un tube capillaire qui fait le tour du cadran. Les minutes sont indiquées par une aiguille qui fait le tour du cadran en soixante minutes (disque placé immédiatement sous les heures) : la lecture des heures et des minutes (ici, 10:10) est donc très intuitive et très logique. On découvre ensuite le mois et la date sur les anneaux centraux qui défilent sous un index blanc. Enfin, une lune tridimensionnelle, traitée dans un bleu cosmique qualité de « bleu supernova », nous dévoile ses différentes phases tout au long du mois lunaire grâce à un repère circulaire situé dans le prolongement d’une superbe arche de titane qui enjambe minutes, mois et date. Tous ces affichages se jouent sous un dôme de verre saphir dont l’épaisseur sait rester raisonnable (13,3 mm) en dépit des 48 mm de ce boîtier en titane. Il faut évidemment signaler le mouvement mécanique qui accorde la circulation du fluide des heures dans le tube capillaire (précision de l’ordre de deux à trois minutes par rapport à la course d’une aiguille classique) et les autres indications de la montre : c’est la première fois que ce mariage de l’hydraulique et du mécanique est réellement convaincant, l’expression de cette fluidité mécanisée était magnifiée par les codes esthétiques de cette Moon Runner à dominante bleue, qui est un des plus beaux nouveaux concepts horlogers de ce printemps. Après tout, peut-être faut-il de telles heures fluidiques à notre société « liquide »…

BREITLING : Sept décennies de réflexion…

Le grand anniversaire de ce printemps, ce sont les 70 ans de la Navitimer de Breitling, un chronographe lancée en 1952 pour que les pilotes disposent, au poignet, d’une règle à calcul circulaire pour résoudre différentes opérations comme le calcul de la consommation de l’avion, les temps de vol, la vitesse ascensionnelle et tous ces calculs qui sont aujourd’hui automatiques et si simples grâce à l’informatique qu’on a oublié qu’ils ont longtemps été effectués mentalement ou à l’aide d’instruments de type règle à calcul. La Navitimer (contraction de « navigation » et de « timer ») a été immédiatement adoptée par tous les pilotes civils et militaires de l’époque [elle le sera plus tard par les astronautes américains venus de l’US Air Force], jusqu’à devenir un des fétiches statutaires de la nouvelle ère des transports aériens. Sept décennies plus tard, l’« instrument de bord » s’est mué en symbole urbain du nouveau « sport chic ». Pour souffler ses 70 bougies, la Navitimer s’offre une nouvelle esthétique si proche de l’ancienne qu’on ne perçoit guère ce qui a changé, sinon dans les détails repérés par les initiés, comme une lunette tournante adoucie ou des « cornes » plus esthétiques et plus élégantes pour relier le boîtier (46 mm, 43 mm, 41 mm : vous avez le choix dans les tailles) aux bracelets (acier, alligator ou caoutchouc, vous avez encore le choix). Même largesse dans la couleur des cadrans, qui vont du noir à l’argenté, avec de jolis bleu, vert et brun. Remercions Breitling de n’avoir pas abusé de la situation en poussant trop haut les tarifs : autour des 8 000-9 000 euros selon les modèles, la nouvelle Navitimer sait tenir son rang face à ses concurrentes iconiques (Rolex Daytona, Zenith Chronomaster, Omega Speedmaster, entre autres). On reste dans les codes rétro avec de subtiles touches contemporaines : c’est le nouveau « sport chic », cool et classe comme disent les nouvelles générations qui ont recommencé à porter des Breitling tant la marque sait afficher pour eux une certaine distinction…

BELL & ROSS : Des connexions physiques…

En découvrant cette nouvelle Multimeter de Bell & Ross (famille des BR 03-94), on a pu croire un instant que cette maison indépendante française se lançait à son tour dans la montre connectée, avec un chronographe qui aurait pu paraître équipé d’un traceur d’activité capable d’indiquer différentes informations qui intéressent un athlète (pulsomètre pour les battements du cœur, asthmomètre pour le rythme des expirations, triple tachymètre pour la vitesse à pied, en vélo et en voiture). Toutes ces échelles de calcul se réfèrent à l’aiguille de secondes du chronographe, avec un repérage très fonctionnel à l’aide de codes couleurs qui dessinent un cadran des plus originaux. Avec ces échelles embarquées, on est ici entre l’instrument aéronautique pur et dur, tel que ceux qui équipent les cockpits d’avion, et l’élégance géométrique d’une montre urbaine qui n’a pas peur de jouer avec les couleurs pour affirmer sa personnalité. Au poignet, la stratégie du « rond dans le carré » et des repères concentriques a quelque chose d’hypnotisant. Pour paraphraser Magritte, « ceci n’est pas une Apple Watch » : purement mécanique, cette BR 03-94 Multimeter n’est pas une montre connectée, mais elle est clairement connectée à nos vies gavées de données dans nos villes de grande solitude…

JOHN-MIKAËL FLAUX : Dragons et faucons…

Une petite friandise pour les amateurs : la dernière montre du jeune créateur indépendant français John-Mikaël Flaux, un des espoirs de la nouvelle horlogerie française, qui s’est associé à une toute nouvelle marque très exclusive, Ben & Bros (monogramme au centre du cadran), pour réaliser cet hommage au grand Al-Jazari (1226-1206), un des génies arabes du XIIe et du XIIIe siècles, si fameux en son temps que, deux siècles plus tard, on avait considéré Léonard de Vinci comme un de ses successeurs ! Ingénieur, artiste et érudit, Al-Jazari a inventé quelques horloges à eau qui font encore référence par leur maîtrise technique de l’hydraulique appliquée aux beaux-arts du temps.Horloges monumentales évidemment réservées aux puissants de son époque, qui étaient autant d’œuvres d’art décorées avec le plus grand soin par les artistes de ce temps. John-Mikaël Flaux s’est inspiré d’une de ces horloges – la plus fameuse, celle de l’éléphant, pour sa montre : l’éléphant cachait le mécanisme d’une montre qui indiquait les heures par le remplissage successif de vasques (principe de la clepsydre) qui déclenchait la course d’une boule dans le bec d’un faucon, laquelle boule terminait sa course dans la gueule d’un dragon capable d’indiquer la demi-heure (ces données sont hâtivement résumées : si vous n’avez pas bien compris, profitez de la vidéo ci-dessous). La montre reprend en peinture miniature les éléments de cette horloge (éléphant, faucon, dragon), avec une lecture de l’heure qui se fait par des arches dont les guichets se remplissent tout au long de la journée (blanc) et de la nuit (noir), par demi-heures successives. Pour rappeler l’horloge d’Al-Jazari, le dragon bascule et vient ensuite reprendre sa place. Pour ceux qui seraient insensibles à la poésie de ces heures hydraulico-éléphantesques ou qui s’avèreraient hermétiques à la philosophie horlogère d’Al-Jazari, on trouve à midi un guichet traditionnel pour les heures, ainsi qu’un cadran classique pour les minutes. Le dos de la montre est décoré d’une peinture miniature qui reprend l’image que nous connaissons de cette horloge du XIIIe siècle. Bien évidemment, tout est ici soumis à des finitions de haute terminaison suisse : la qualité purement horlogère de cette pièce unique est irréprochable. Le prix peut faire tiquer (dans les 50 000 euros hors taxes), mais il s’agit d’une pièce unique à automate qu’une poignée d’amateurs de métiers d’art horlogers va se disputer. C’est sans doute une des montres les plus spectaculairement exclusives de ce printemps…

BON À SAVOIR : En vrac, en bref et en toute liberté…

•••• WONDER WEEK : c’est bien parti pour une semaine de salons horlogers dans Genève, où près de 160 marques exposent sur leurs nouveautés dans les différents espaces disponibles de la métropole horlogère suisse (Watches & Wonders, Time to Watches, Icebergues, etc.). Il y en a pour tous les goûts et à tous les prix, sans vraie tendance qui se dégage clairement pour l’instant – si ce n’est le culte forcené des icônes du passé, perpétuellement revisitée pour le plus grand bonheur des amateurs, des collectionneurs et des… spéculateurs ! •••• OMEGA x SWATCH : votre chronique Atlantic-tac vous avait pourtant prévenu la semaine dernière ! Il fallait s’attendre à des files d’attente considérables à la porte des boutiques Swatch pour le lancement de la MoonSwatch, une montre née de la fusion des marqueurs identitaires de l’iconique Speedmaster d’Omega et d’une Swatch en biocéramique. Idée marketing géniale (pour une analyse plus complète : Business Montres du 28 mars) et véritable « sauvetage » par Omega d’une maison Swatch qui ne savait plus trop qui elle était depuis quelques années : des millions de personnes ont passé des heures à attendre devant les boutiques Swatch du monde entier. Cette MoonSwatch vendue 250 euros dans les boutiques s’est négociée jusqu’à 2 000 euros sur les réseaux sociaux et les acheteurs ne manquaient pas, alors même que Swatch avait précisé qu’il ne s’agissait pas d’une édition limitée et qu’un bon million de montres allaient être produites… •••• FRANCK MULLER : regardez attentivement cette Crazy Hours de Franck Muller (ci-dessous). Vous allez tout de suite comprendre que quelque chose ne va pas : les chiffres des heures ne sont pas à la bonne place, mais on vous promet quand même que cette montre indiquera l’heure avec une remarquable précision suisse (sur ce cadran, il est dix heures dix). Au lieu de suivre de façon linéaire son parcours autour du cadran, l’aiguille des heures va « sauter » d’un bon chiffre à l’autre après soixante minutes (sur le cadran ci-dessous, une fois passées les soixante minutes de dix heures, l’aiguille va « sauter » pour rejoindre le 11 à trois heures. Maintenant, regardez encore plus attentivement : les chiffres sont encore plus fous que d’habitude, ils dansent pour le trentième anniversaire de cette Crazy Hours, avec le zéro du 10 qui forme un 30 avec le 3, un 12 déhanché ou un 11 qui se disloque. Ambiance encore plus festive avec la version Crazy Colors : vous avez là, en version joaillière, une des montres les plus amusantes de cette saison. Et chacun s’accorde à considérer que Franck Muller, qui tend maintenant à devenir une marque « classique » est un investissement de plus en plus sûr…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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