Salah Abdeslam, la cavale à domicile ; "Code de l'honneur" et familles djihadistes : le malaise Molenbeek ; Astro-Barbier : le patron de l'Express connaît les moments propices pour que Sarkozy et Hollande se retirent de la course à 2017 <!-- --> | Atlantico.fr
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Salah Abdeslam, la cavale à domicile ; "Code de l'honneur" et familles djihadistes : le malaise Molenbeek ; Astro-Barbier : le patron de l'Express connaît les moments propices pour que Sarkozy et Hollande se retirent de la course à 2017
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Revue de presse des hebdos

Vos hebdomadaires, cette semaine, sont parus alors que la Belgique était frappée par ses attentats meurtriers. Seuls "Le Point" et "Challenges" parlent de ce 22 mars dans leurs pages - parce que leurs bouclages sont plus tardifs - mais tous, évoquent, chacun à sa façon, l’islamisme aujourd'hui et l’état de l’Europe.

Sandra Freeman

Sandra Freeman

Journaliste et productrice, Sandra Freeman a animé des émissions sur France Inter, LCI, TF1, Europe 1, LCP et Public Sénat. Coautrice de L'École vide son sac (Éditions du Moment, 2009), elle est la fondatrice du média internet MatriochK.

 

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Double attentat de Bruxelles : représailles ou ciblage délibéré de la capitale de l’Europe ?

« Challenges » s’interroge sur « le symbole de Bruxelles » touchée par un double attentat ce 22 mars : « est-il une réponse terroriste à l'arrestation de Salah Abdeslam ? ». Les avis divergent et au magazine de pencher vers l’analyse du criminologue Alain Bauer qui « exclut cette hypothèse » : « Pour avoir refusé d'actionner sa ceinture de sécurité lors des attentats de Paris, pour avoir parlé avec la police après son arrestation, celui qu'on désigne comme le logisticien des attentats du 13 novembre  serait plutôt un renégat ». Un « condamné à mort ». Ainsi la question s’impose : « Faut-il alors privilégier l'hypothèse d'un ciblage délibéré de Bruxelles, capitale de l'Europe, siège des institutions communautaires ? Représailles ou actions planifiées ? ».

Djihadisme : pas « d’explication sociale » mais « une vision de l’Histoire »

Là est tout l’enjeu pour « Le Point ». Comprendre le sens profond de tout cela, mais aussi son fondement : « Le dossier que nous consacrons cette semaine à la genèse d'un djihadisme international montre d'ailleurs que ce mouvement a eu des fondateurs, des penseurs, des stratèges et des organisateurs avant d'avoir des exécutants ».

Ainsi le magazine met de côté ce qui serait une explication « sociale » du terrorisme (les problèmes d’intégration etc.). Elle permet surtout « d'avoir élaboré - fussent pour le pire -  une vision de l'Histoire ». L’hebdomadaire  propose un dossier complet : le « djihadisme, comment tout a débuté ». On y retrouve les théoriciens du terrorisme islamiste, des Frères Musulmans à Daech, et une enquête « sur une nébuleuse qui fait la guerre au monde ». De Hassan al-banna le fondateur des Frères Musulmans (organisation créée en 1928 en Égypte), à la proclamation de la nécessité d'un Etat islamique en 1941, puis le recrutement de djihadistes par Ben Laden dès 1984, la fondation d'al Qaïda en 1988, et en 2006, la création de l'Etat islamique.

« Le Point » prend ainsi largement partie et refuse la seule place d’observateur : « À nous, en retour, de promouvoir la nôtre (de vision de l’Histoire). À nous de ne pas rester tétanisé par la peur et la vulnérabilité. À nous de consolider ce qui nous rend durablement plus fort : l’Europe ».

Salah Abdeslam : "j'ai tué des gens"…

Mais cette question du « Pourquoi » ne cesse de se poser. Quelles sont les explications de Salah Abdelslam, « logisticien présumé des attentats du 13 novembre à Paris », arrêté cette semaine à Molenbeek ? « Le Point » semble savoir que « sous les verrous », lors de « ses premières confidences » à la police belge, il aurait « tenter de minimiser son rôle » mais que, pourtant, « le lendemain matin de la tragédie, le 14 novembre, ce français né à Bruxelles s'était confié à ceux qui étaient venus de Belgique le récupérer : « il affirme qu'il a participé aux attentats de Saint-Denis et du Bataclan, il se présente d'ailleurs comme le 10e homme du commando. Il précise même ce rôle : « j'ai tiré à la Kalash de ma voiture et j'ai tué des gens » avoue-t-il à ses comparses, selon leurs dépositions faites à la police belge », écrit « Le Point ».

La planque de Salah Abdelslam, une « cavale à domicile » !

La planque de Salah Abdelslam interpelle par ailleurs beaucoup la presse hebdomadaire. Dans « L’Express »,  Plantu dessine Molenbeek en « La barbaraque à frites » avec un Abdelslam « pourtant bien planqué » derrière avec un cornet de frites (dans lequel des balles de Kalachnikov font office de frites ».

« L’Obs », (qui a choisi de faire la Une sur l’immobilier qui repart et les conseils de Stéphane Plaza), propose un papier très informé sur sa « cavale à domicile ». Un ancien y parle de lui comme « d'un gamin », des adolescents certifient même que Salah était « cool » et qu'il avait fait « la sécurité pour des concerts ici ». On y comprend les enjeux locaux. La « loi du silence ». Le fait que pour certains ce soit « leur héros ».

« Code de l’honneur » : « A Molenbeek, on ne balance pas »

« Les Inrockuptibles » aussi sont partis « sur les traces de Salah Abdelslam » avec une enquête chez lui à Molenbeek. L’enjeu y est d’enquêter sur le quartier où il a grandi et a été retrouvé. Le magazine cherche à comprendre : « Comment a-t-il pu échapper durant quatre mois aux autorités ? » mais aussi « Comment les habitants vivent-ils la lumière crue ainsi jetée sur leur commune ? ».

C’est ici une lecture plus « sociale » qui transparaît. On y parle du « malaise à Molenbeek », de ses « 90000 habitants », et que « aujourd'hui, tu as honte de dire que tu vis ici », « quand tu cherches du boulot, tu évites de l'écrire sur ton CV. »

Le magazine interroge Ahmed el Khannouss, le premier échevin (adjoint au maire) de Molenbeek. Il parle de « sentiment de camaraderie » entre les jeunes du quartier, et reconnaît volontiers que le terroriste en cavale a pu recevoir de l'aide de la part de ses connaissances Molenbeekoise et pas uniquement des côtés des islamistes radicaux ». Il dit : « Les deux jeunes gens qui sont venus le chercher à Paris en voiture, je les connais. Je peux vous assurer que ce ne sont pas de dangereux terroristes », développe-t-il avant de reconnaître : « ils ont fait une grosse connerie quand il ne l'ont pas livré à la police ». « Les Inrocks » complètent : « En cause, selon lui, un certain esprit de quartier. Un code de l'honneur : « à Molenbeek, on ne balance pas. » D'autant qu'organiser une cabale comme celle d'Abdelslam ne coûte pas très cher. Surtout, elle ne nécessite pas d'avoir un grand réseau. « Les cellules affiliées à l'État islamique sont souvent organisées autour d'un noyau familial, ou d'un cercle d'amis proches » décrypte, Thomas Renard, un expert en terrorisme interrogé dans l’article.

Malgré tout : « Un coup de fil », décisif, pour l’arrestation de Salah Abdelslam

Et on apprend d’ailleurs dans « L’Obs » que c’est un coup de fil qui a permis l'arrestation : « dans la journée de mardi, nous avons eu un interlocuteur au téléphone qui nous a expliqué que Salah avait appelé des proches pour trouver une nouvelle planque », indique à « l'Obs », une source proche du dossier. Ainsi les services de police ont pu « faire un travail de téléphonie » et marquer « la fin de la cavale ».

« Regarde l’Europe tomber » : 14 000 réfugiés sont pris au piège à la frontière de la Grèce et de la Macédoine

« Europe : la fin du rêve ? » Une couverture en noir et blanc sur fond de barbelés. « Télérama » « regarde l’Europe tomber ». Le magazine, ayant bouclé ses pages plus tôt dans la semaine, ne fait pas de lien avec les attentats de Bruxelles et le symbole de l’Europe touchée en plein cœur.

Par contre, ce qui est au centre des réflexions de cet hebdomadaire, c’est l’incapacité de l’Europe aujourd’hui à s’occuper de ses migrants.

« Il y a 30 ans, les accords de Schengen ont été signés sans fanfare. Symbole d'une union européenne optimiste ». Mais quid aujourd’hui de « la libre circulation » face à « la crise des migrants et aux égoïsmes nationaux » ? « Télérama », sur le terrain, dans le camp de Idomeni, y décrit une « crise totale » : « Depuis que la Macédoine a fermé sa frontière, 14 000 réfugiés sont pris au piège » sur la route vers l'Allemagne ; Sur place, « seule une poignée d'O.N.G. leur vient en aide » ; « Les réfugiés sont, pour moitié, des familles » ; « Aucun Etat ne leur vient en aide ».

Thomas Piketty : « le drame de l'Europe, aujourd'hui, c'est l'absence de clarté »

Et, pour aller plus loin que l’image, dans ses pages « penser autrement », « Télérama » donne la parole à l'économiste Thomas Piketty, pour qui « une Europe prospère, démocratique et ouverte aux réfugiés est encore possible. À condition d'oser une révolution politique et fiscale ». Il y est question des politiques à mettre en œuvre en priorité et principalement de la dette interne de l’Europe : « 100 milliards d'euros par an, que les Européens se doivent eux-mêmes ».

Comment venir au bout d'une dette publique ? Réponse de Thomas Piketty : « Il y a la méthode lente - on rembourse par des surplus budgétaire - ça peut prendre un siècles. Et trois méthodes rapides : L'inflation (mais elle provoque d'autres dégâts). La restructuration (les créanciers acceptant alors de perdre certains montants). Et l'impôt progressif sur le patrimoine privé (méthode utilisée par l'Allemagne dans les années 50). Le plus réaliste, c'est une combinaison de ces trois méthodes. Mais il faut des instances démocratiques pour en débattre. Or le drame de l'Europe, aujourd'hui, c'est l'absence de clarté ».

« La religion, c'est que des emmerdes » !

Riss,  dans « Charlie Hebdo » signe une Une qui  pose côte à côte deux figures de l’actualité, qui a priori, n’ont rien à voir : Salah Abdelslam et Monseigneur Barbarin. « « Charlie Hebdo » vous l'avait bien dit : « La religion, c'est que des emmerdes ! ».

Affaire Barbarin, l'Eglise, et la pédophilie : « La majorité des faits, grâce à Dieu, sont prescrits »

« L’Obs » revient d’ailleurs plus en détail sur cette « Affaire Barbarin » : « Le primat des Gaules est accusé d'avoir maintenu en fonction des prêtres soupçonnés d'agressions sexuelles sur mineurs. Il s'en défend, mais est plus que jamais sur la sellette » recadre le magazine avant de tenter de faire le portrait de celui qui « règne depuis 14 ans sur le diocèse de Lyon » et est « l'un des trois cardinaux français à participer à l'élection du pape ». On apprend qu’il est « surnommé le Sarko de l'église » (« Même impatience », « même activité », « même nervosité », « même appétit pour la lumière et le devant de la scène »). Mais, il « avait jusque-là connu un parcours presque sans faute » !

Seulement voilà. « L'homme est éclaboussé par l'un des plus grosses affaires de pédophilie qu’ai connu l'église française ». Et puis, il y a eu ce lapsus, que rappelle « l’Obs » : « « La majorité des faits, grâce à Dieu, sont prescrits »… Il a lâché la phrase, l’air de rien, devant un parterre de journalistes médusés (…) « Jamais, jamais, jamais » il n'avait couvert « le moindre acte de pédophilie ». L'opération de communication devait apaiser. La polémique devait montrer le front uni de l'épiscopat face au micro inquisiteur. Sauf que le cardinal a lâché cette petite phrase. Il a beau s’être repris, avoir évoqué une « erreur de langage », c'était trop tard. Ces propos, qui concernent des agressions sexuelles sur des enfants âgés de 8 à 11 ans, effectivement prescrites, le fragilise ».

« L’affaire de Cologne » : l'Islam et le sexe

« L'express » (lui aussi sorti avant les attentats) fait sa Une sur  « l'islam et le sexe ». Depuis « l'affaire de Cologne », la question est posée : « la place du désir et du plaisir sexuel dans l'Islam est-elle à l'origine d'une vision dégradée de la femme ? ».

Le magazine se penche sur cette question avec cet enjeu : « Mesurer l'intensité du conflit existant aujourd'hui dans les sociétés arabo-musulmanes entre la religion, la tradition patriarcale - Il est souvent impossible de démêler l'une de l'autre - et les aspirations des individus à vivre librement la sexualité ».

L’hebdomadaire s’est intéressé à une enquête, la "Révolution du plaisir" de l'immunologiste et journaliste égyptienne Shereen el-feki. Elle « suscite chez le lecteur européen une curieuse impression : celle d'être revenu à l'époque d’avant la révolution sexuelle en Occident, lorsque les filles dociles se devaient d'arriver chaste dans le lit de leur époux choisi dans leur famille avant de garantir la lignée du clan » commente le journal.

Myriam El Kohmri : « C'est du Grand théâtre. Ça m'insupporte, ce cirque »

Il est aussi question de politique franco-française dans vos hebdos cette semaine :

Ainsi on retrouve dans « L’Obs », Myriam El Kohmri, « Ministre sur un fil », dans « l'enfer de Grenelle ». Elle a connu « un violent baptême du feu avec la réforme du travail ». Le magazine raconte comment elle a été « ballottée par les rivalités au gouvernement et les mouvements sociaux », et « dénonce le Grand théâtre politique ».

Retour sur le 18 février « c'était le jour de mon anniversaire »… L’Obs raconte : « Elle découvre dans l'interview accordée aux Échos une phrase qui a changé. Interrogée sur l'usage éventuel du 49–trois pour passer en force à l'Assemblée nationale sur la loi du travail, elle avait répondu au quotidien : « je veux convaincre les parlementaires et je ne parle pas avec en tête de recourir aux 49–trois. » La phrase a disparu, remplacée par : « nous prendrons nos responsabilité ». À la hussarde. Du manuel Valls dans le texte. La modification apportée par le premier ministre est arrivée in extremis au moment du bouclage du journal. Elle lâche : « ce n'était pas mes mots » pour elle. Le café du matin est amer. »

Elle explique au magazine cette semaine que son texte pâtit : « de la fin du débat sur la déchéance de nationalité, des primaires de la gauche et de la droite, des congrès de telle ou telle organisation syndicale », et à elle de commenter : « C'est du Grand théâtre. Ça m'insupporte, ce cirque. »

Mais : « Non, elle n'a pas envisagé de démissionner : « je suis endurante ! » ».

Nicolas Sarkozy : alors que « l’Obs » parle de sa « chasse aux dons »…

La semaine a été aussi fondamentale pour Nicolas Sarkozy puisque la cours de cassation a validé les écoutes téléphoniques qui peuvent le mettre fortement en danger dans sa course vers 2017.

Mais, pour l’heure, il avance : « L’Obs » parle de sa « chasse aux dons » : « Il n'est pas encore candidat à la primaire de la droite et du centre (…) mais il se lance désormais à la collecte de fonds au nom de l’ASANS, l’Association de Soutien à l'Action de Nicolas Sarkozy » (…). À la mi-mars, de potentiel donateurs, chefs d'entreprise et hommes d'affaires, ont reçu des premiers mails, intitulés : « Nicolas Sarkozy compte sur vous ! », leur expliquant que « Nicolas Sarkozy est le seul capable de bâtir et de proposer à nos compatriotes un véritable projet d'alternance, reposant sur la vérité ».

… « L’Express » l’encourage à ne pas se présenter !

« Sarkozy : 5 raisons de renoncer » ! Dans son édito, Christophe Barbier écrit : « tout, aujourd’hui, appelle Nicolas Sarkozy à se retirer de la compétition présidentielle ». Et il poursuit : « grâce à son expérience, son énergie et sa force de conviction, il sera utile ailleurs qu’à la présidence pour garantir le changement ».

Christophe Barbier voit encore plus loin : « c’est juste avant l’été qu’il sera temps pour Nicolas Sarkozy de jeter l’éponge ; plus tard, vers la fin de l’automne, viendra le moment pour François Hollande de comprendre qu’il ne doit pas se représenter. Alors la France électorale verra se lever un soleil neuf à l’horizon de 2017 ».

… d’ici là, à la semaine prochaine !

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