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UMP : Bruno, François, Laurent, Xavier et leurs amis… les mieux placés à droite pour profiter du trou d’air Sarkozy-Juppé
©Reuters

L'heure de tirer les marrons du feu

Le Conseil national de l’UMP du samedi 7 février a été l’occasion pour Nicolas Sarkozy et Alain Juppé de s’écharper par discours interposés sur la politique à mener vis-à-vis du FN et du centre. Une situation dont les ténors du parti, anciens comme nouveaux, peuvent tirer profit.

Bruno Jeudy

Bruno Jeudy

Bruno Jeudy est rédacteur en chef Politique et Économie chez Paris Match. Spécialiste de la droite, il est notamment le co-auteur du livre Le Coup monté, avec Carole Barjon.

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Atlantico : Nicolas Sarkozy a chuté de 26 points en six mois auprès des sympathisants UMP, Alain Juppé  s’est fait siffler samedi lors du Conseil national du parti… De quoi font-ils les frais ?

Bruno Jeudy : La situation des deux hommes est très différente. Nicolas Sarkozy est confronté à la difficulté du retour dans la vie politique, et a fortiori pour un ancien président de la République qui a fait le choix de revenir par la case "parti". Or on sait depuis Valéry Giscard d’Estaing que le retour est quasi impossible, et que le poste de chef de parti et de l’opposition est souvent ingrat et ne permet pas de gagner beaucoup en popularité auprès des Français. Cela étant, Nicolas Sarkozy se trouve dans une situation plus confortable qu’Alain Juppé, même si sa position dans les sondages est compliquée. Il tient les manettes de l’appareil politique, ce qui lui donne un atout dans la perspective de la primaire en 2007. Alain Juppé est dans une position plus délicate, car se trouvant dans le rôle du challenger, il se trouve obligé d’être à l’offensive face à un patron de l’UMP légitimé récemment par les militants, et anciennement par son statut d’ancien président de la République. Il n’a donc d’autre choix que de passer à l’attaque, se découvrir, se démarquer de Nicolas Sarkozy, quitte à mordre la ligne rouge, qui en l’occurrence se trouve être le créneau centre-droit, lui-même décentré par rapport à la ligne médiane de l’UMP, parti qui s’est droitisé ces dernières années, qu’on le veuille ou non.

Quel bénéfice les autres membres de l’UMP peuvent-ils tirer de l’opposition entre Sarkozy et Juppé, ainsi que de leur baisse de popularité ?

  • François Fillon

Pour la énième fois, François Fillon a changé de stratégie. Après la funeste guerre contre Jean-François Copé, suivie de ses attaques à répétition contre Nicolas Sarkozy, il a décidé de se démarquer et de se tenir à l’écart de la bataille qui commence, avec le secret espoir que les deux hommes "s’atomisent", de la même manière qu’il s’était atomisé avec Copé. Il espère tirer les marrons du feu en se posant comme celui qui élabore un programme, construit sa rupture par les idées et non plus par les petites phrases politiques, les positionnements tacticiens et autres jeux politiques. Il n’a plus d’autre choix que celui-ci, sachant qu’il a beaucoup reculé dans les intentions de vote à la primaire, et qu’à droite, moins de gens misent sur lui. Au fond, il se repositionne sur son image d’homme peu versé dans la joute politique qui préfère les idées et les discours. N’étant plus en première ligne, il ne peut plus que profiter d’une guerre mortifère entre les deux favoris.

  • Bruno Le Maire

Comme pour l’élection interne du mois de novembre, Bruno Le Maire essaie de tirer parti au maximum de sa situation d’homme neuf à droite. Il essaie à d’incarner à la fois cette politique nouvelle et ce besoin de renouveau qu’éprouvent les militants. Il a été très applaudi samedi au Conseil national, sa notoriété a grandi, et se trouvant désormais dans la cour des grands à droite il peut légitimement envisager une candidature à la primaire, et même, pourquoi pas, être faiseur de roi.

Bruno Le Maire a été qualifié d’homme le "plus dangereux" à l’UMP par Jean-Christophe Cambadélis, parce qu’il "pense comme Buisson et se présente comme Juppé". Le ministre de l’agriculture Stéphane Le Foll a émis le même type d’appréciation à l’endroit de Bruno Le Maire mais aussi de Laurent Wauquiez. En quoi seraient-ils dangereux ?

Je pense que les socialistes ont voulu ce weekend mettre dans le même sac Le Maire, Wauquiez, toute la nouvelle génération de droite, pour les cataloguer comme des gens susceptibles de faire des compromis avec l’extrême droite. Ce sont des éléments de langage politiciens, et plutôt faux : Wauquiez s’est fait acclamer samedi sur une ligne très à droite, quand Le Maire, lui, bien qu’ayant musclé son discours sur la sécurité, la nationalité et l’Europe, reste tout de même loin de la droite dite décomplexée. Bruno Le Maire tente une synthèse entre la droite chiraquienne et la droite sarkozyste, tout en restant pro européen, ainsi que sur des solutions économiques libérales assez radicales.

  • Laurent Wauquiez

Incontestablement, Laurent Wauquiez a fait beaucoup de chemin depuis l’été 2014. Son ralliement à Nicolas Sarkozy semble lui réussir : il le soutiendra jusqu’en 2017, sur des convictions politiques qui sont sans doute les plus à droite de la nouvelle génération, en tout cas bien que celles de Nathalie Kosciusko-Morizet. J’exclue totalement qu’il soit candidat si Nicolas Sarkozy l’est, en revanche si ce n’était pas le cas, il est certain qu’il rebattrait ses cartes et pourrait se lancer à son tour. Il ne fait pas mystère de ses ambition présidentielles.

  • Xavier Bertrand

Xavier Bertrand n’a pas voulu se présenter pour la présidence de l’UMP, car quoi qu’il dise, il s’est fait doubler par Bruno Le Maire. Depuis cette période, on ne l’a guère entendu. Maintenant pour se relancer, sous la pression des élus du Nord-Pas-de-Calais et de Picardie, il s’est lancé dans la bataille pour les régionales. C’est assez bien joué de sa part, car il n’a rien à perdre : si Marine Le Pen est candidate cela produira l’un des matchs les plus médiatiques de la campagne, et si elle n’est pas candidate il peut décrocher la présidence de cette région traditionnellement socialiste, et donc symbolique. Cela pourrait le relancer pour la présidentielle, même s’il peut paraître compliqué d’enchaîner deux grosses campagnes à moins d’un an d’intervalle.

Combien de temps peuvent-ils profiter de cette situation ?

Le paysage politique devrait de nouveau se modifier après les départementales. Si la droite bénéficie d’une nouvelle vague bleue, c’est-à-dire, gagne entre 20 et 30 départements au mois de mars, cela aura immanquablement des conséquences politiques pour Nicolas Sarkozy qui saura capitaliser là-dessus. Il pourra espérer voir sa cote remonter, même si celle-ci n’a pas baissé tant que cela. Par contre, si la vague bleue n’a pas lieu parce que le FN s’en mêle, cela profitera à ses challengers, qui continueront de surfer sur les difficultés de l’ancien président de la République. Juppé quant à lui sait que s’il continue de surfer à la fin de l’année 2015 à plus de 60 % d’opinions favorables au niveau du pays, il bénéficiera d’un atout, même pour une campagne interne au parti. Actuellement nous nous trouvons à fronts renversés dans une situation comparable à 1995 : Sarkozy, comme Chirac, compte s’appuyer sur le parti, et Juppé, comme Balladur, espère profiter des sondages en sa faveur. L’ironie étant que la dernière fois Juppé était le chiraquien, et Sarkozy, la balladurien.

Propos recueillis par Gilles Boutin

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