Transition énergétique mal pensée : 120 milliards d’euros engagés n’ont pas réduit d’une seule tonne nos émissions de CO2<!-- --> | Atlantico.fr
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Un parc éolien situé entre Abbeville et Epagne-Epagnette, dans la Somme, le 4 avril 2021.
Un parc éolien situé entre Abbeville et Epagne-Epagnette, dans la Somme, le 4 avril 2021.
©AMAURY CORNU / HANS LUCAS / AFP

Avenir de l'industrie en France

Ou comment nous avons à grands frais remplacé de l’électricité décarbonée…par de l’électricité décarbonée.

Gérard Buffière

Gérard Buffière

Gérard Buffière est ex-directeur général d'Imérys, ancien élève de l'Ecole polytechnique, titulaire d'un master of sciences de l'université de Stanford et diplômé de la Harvard Business School. 

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Bernard Kasriel

Bernard Kasriel

Bernard Kasriel est un ancien élève de l’Ecole Polytechnique, ex-directeur général de Lafarge et ex-administrateur de sociétés du CAC 40 et du NYSE

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Un peu de théorie :

En l’absence de solution de stockage massif d’électricité, la production doit être strictement égale à la consommation à tout moment.
Cela exige un pilotage en temps réel de la production et de la distribution d’électricité.
Un parc de production électrique se caractérise par sa puissance garantie, c’est-à-dire la puissance maximum qu’il est capable de produire à tout moment. Dans un réseau fermé, cette puissance doit être supérieure au pic de la consommation.
On a vu qu’un ensemble d’éoliennes ou de panneaux solaires ne pouvait offrir une puissance garantie. Il doit s’appuyer sur des sources pilotables (thermiques ou nucléaires) ; ces dernières s’arrêteront ou ralentiront lorsque l’éolien ou le solaire produiront de l’électricité et satisferont la demande lorsqu’il n’y aura plus assez de vent ou de soleil.
La puissance garantie de l’ensemble est alors celles des sources pilotables.

Dans le cas de l’Allemagne (mais aussi de l’Angleterre, de l’Espagne etc.) une grande partie de la production électrique vient de centrales thermiques. Si on leur ajoute un parc éolien ou solaire, ces centrales s’arrêteront ou ralentiront lorsqu’éolien ou solaire produiront.
Il y a bien alors une réduction des émissions de CO2 pour une même production d’électricité.

Le cas de la France est une exception : avant la construction de toute éolienne et de tout panneau solaire, la production d’électricité était décarbonée à plus de 90% grâce à l’énergie hydraulique et surtout grâce au nucléaire.
La très faible part du thermique dans la production électrique, de 7 à 10%, est pratiquement incompressible. En effet par leur flexibilité et leur réactivité, les centrales à gaz sont l’outil d’ajustement ultime, à tout moment, de la production à la consommation.

Dans ces conditions, la priorité d’injection sur le réseau, que confèrent leurs contrats aux producteurs d’énergie renouvelable, dès que leurs installations éoliennes ou solaires produisent, se traduit par une baisse de la production nucléaire.
C’est ce que confirme une analyse minutieuse des données de RTE pour chacune des années de 2006 à 2019 (2020,21 et 22 sont trop perturbées par de multiples facteurs pour permettre la même analyse)

On constate sur le graphique ci-dessous que, pour une production totale pratiquement stable sur la période, la production nucléaire a été réduite pour faire la place à l’éolien et au solaire, injectés en priorité. Il ne s’agissait en rien d’une incapacité du nucléaire à produire plus puisque sur toute la période la France a été un grand exportateur net d’électricité.

On a donc remplacé des kwh nucléaires décarbonés, produits par des centrales existantes à un coût marginal quasi-nul par des kwh décarbonés, éoliens ou solaires, produits au prix de lourds investissements et de subventions massives.

La Cour des Comptes estimait qu’à la fin de 2017, 120 milliards d’euros avaient été engagés dans l’éolien et le solaire (et beaucoup plus depuis). Cela n’a pas réduit d’une seule tonne nos émissions de CO2.

Et il en sera ainsi, tant que notre parc électrique pilotable (hydraulique, nucléaire et thermique d’ajustement) permettra de satisfaire la demande d’électricité. Tous les investissements dans l’éolien et le solaire, mis en route ou engagés depuis 2017 n’ont aucun impact sur nos émissions de CO2.

En fait l’Union Européenne s’est trompée (et nous ne l’avons pas démentie) en faisant de l’objectif de décarbonation de l’électricité un objectif d’augmentation du pourcentage d’énergies renouvelables, en particulier intermittentes.

Ces deux objectifs coïncident dans le cas de l’Allemagne et d’autres pays.
Ils ne le font pas pour la France : nous avons déjà payé très cher cette confusion.
Il est grand temps de le reconnaître et de la corriger.

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