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En France, la santé est prise en charge par l'Etat... et cela coûte moins cher qu'aux Etats-Unis
En France, la santé est prise en charge par l'Etat... et cela coûte moins cher qu'aux Etats-Unis
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Haro sur les préjugés

Ancien Président de l'APEC (l'Association pour l'emploi des cadres), Éric Verhaeghe répond à la tribune d'Agnès Verdier-Molinié publiée dans Atlantico sous l'intitulé "Les fonctionnaires contre l'État ?". L'auteur de "Jusqu'ici tout va bien" vient au secours des fonctionnaires et souligne qu'"un véritable débat national serait salutaire pour renouer le lien entre le pays et sa fonction publique".

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Il faut remercier Agnès Verdier-Molinié, directrice de l’IFRAP, de poser, dans son très attendu discours sur les fonctionnaires qui coûtent trop cher, de véritables questions pour notre temps. Par exemple, faut-il continuer à accorder un statut de fonctionnaire aux infirmières dans les hôpitaux ? Ne vaut-il pas mieux les recruter sous un contrat relevant du code du travail, comme n’importe quel salarié en France? De cette façon, on réserverait le statut de fonctionnaire à certains emplois (policiers, juges, militaires,...), et le reste relèverait du droit commun.

Ce débat est assez intéressant, car il montre excellemment comment la crise actuelle des finances publiques pousse les esprits bien pensants à recentrer l’État sur ses fonctions régaliennes (et sous la plume d’Agnès Verdier-Molinié, cela semble d’abord concerner le maintien de l’ordre), pour privatiser progressivement les fonctions d’intérêt général qui lui sont confiées depuis 1945. Avec, de façon implicite, l’idée qu’une gestion privée est forcément plus efficace et moins coûteuse qu’une gestion publique.

Un oubli dans le raisonnement

C’est ici que réside toute la faiblesse du raisonnement tenu par Agnès Verdier-Molinié. Qu’elle soit capable de démonter les coûts de la gestion publique, personne ne le conteste, puisque l’ensemble des données sur ce sujet est publié urbi et orbi, et abondamment discuté au Parlement. En revanche, elle ne nous prouve pas qu’une gestion privée du périmètre public serait moins chère. Elle se contente de l’affirmer, en surfant de façon à mon avis un peu indélicate sur le préjugé selon lequel le privé, c’est forcément mieux et moins cher que le public.

Le problème, c’est que toutes les études sérieuses prouvent le contraire. L’entreprise doit ajouter, à ses coûts de production, des coûts de commercialisation qui sont extrêmement élevés. Toute ouverture à la concurrence suppose en effet une stratégie pour attirer les clients. En outre, l’entreprise doit rémunérer ses actionnaires, ce qui représente un facteur de plus en plus pénalisant pour les marges qu’elles dégagent. Ces éléments pèsent tôt ou tard sur le prix final payé par le bénéficiaire, de telle sorte qu’à moyen terme une gestion privée est plus coûteuse, pour une activité d’intérêt général, qu’une gestion publique. L’exemple de la santé aux Etats-Unis, privatisée, chère et efficace pour les seules fractions de la population capables de payer, le démontre sans équivoque.

Redonner du sens à l’intérêt général

Ce constat ne doit pas occulter une vraie question : comment rétablir le sentiment d’une égalité satisfaisante de traitement entre fonctionnaires et salariés du privé ? Depuis des années, le dénigrement dont les fonctionnaires font l’objet a installé l’idée qu’ils étaient traités plus favorablement que les salariés du privé : garantie de l’emploi, retraite juteuse, etc. Et ce sentiment-là est aussi inconfortable pour les fonctionnaires que nauséabond pour les salariés soumis au Code du Travail.

Un véritable débat national serait salutaire pour renouer le lien entre le pays et sa fonction publique. Quelle place accorder à l’intérêt général ? Comment le financer ? Dans quelle limite ? A quelles missions renoncer ? Après tout, en démocratie, ces questions-là méritent bien un choix collectif.

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