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Serial killers : Pourquoi ils échappent de plus en plus aux radars des services de police
©Sebastien SALOM-GOMIS / AFP

Blindhunter

Le journal The Atlantic, en se basant sur les travaux de plusieurs scientifiques, émet l’hypothèse que plusieurs milliers de tueurs en série pourraient être en circulation aux Etats-Unis. Un nombre qui peut s'expliquer par de nombreux facteurs.

Stéphane Bourgoin

Stéphane Bourgoin

Stéphane Bourgoin est un écrivain spécialisé dans la criminologie et l'étude des tueurs en série. 

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Atlantico : En 1965, le taux de classement des homicides aux États-Unis était de 91%. En 2017, il était tombé à 61,6%, l'un des taux les plus bas du monde occidental. Le journaliste Thomas Hargrove, fondateur du projet Murder Accountability Project, une organisation à but non lucratif qui compile des données sur les homicides, estime que 2% des meurtres commis pourraient être du fait de tueurs en série (définition + de 2 meurtres séparés) souvent avec un motif sexuel ou psychologique. Cela ferait 2000 tueurs en série en circulation aux Etats-Unis. Souscrivez-vous à cette estimation ?

Stéphane Bourgoin : Le taux de résolution des homicides aux Etats-Unis a depuis quelque peu augmenté mais il reste extrêmement faible en comparaison à ceux de la France, de l'Allemagne, de la Grande-Bretagne. Ceci peut s'expliquer par la structure des forces de police aux Etats-Unis, pays où il n'y en pas qu'une mais plusieurs qui ne communiquent pas forcément entre elles. Dans le cas de serial-killers, les liens ne sont pas forcément faits entre les différentes affaires, d'autant plus que le FBI n'intervient pas comme ça, il faut que les forces locales lui demande d'intervenir, de venir à leur rescousse.

Cette estimation de 2 000 tueurs en série en circulation aux Etats-Unis me paraît néanmoins un petit peu exagérée. Tout d'abord parce que pour les forces de police et pour le FBI, un tueur en série n'est pas, tel qu'on le définit en France, quelqu'un qui aurait fait deux victimes mais plutôt trois victimes avec un certain intervalle de temps entre chaque meurtre. 

Les tueurs se sont-ils améliorés ou la police a-t-elle perdu en qualité ?

La police dispose de plus d''outils qu'elle n'en avait il y a quelque années mais l'essentiel des victimes de meurtres aux Etats-Unis, notamment ceux commis par les tueurs en série, sont des femmes (70% des victimes de serial killer sont des femmes) alors que si prend l'ensemble des homicides, elles ne constituent que 20% des victimes. 

Les homicides visant des femmes, visent principalement des femmes droguées, faisant du stop, en situation de vulnérabilité, des prostitués.

Mais il est vrai que les forces de police, en ce qui concerne les meurtres de femme droguées, des prostituées ne font pas forcément d'enquêtes approfondies,  ce qui peut expliquer que nombre de serial-killers ne soient pas incarcérés. 

L'article met en avant la plus grande facilité pour un tueur en série actuel de commettre des meurtres sans être identifié. Au niveau sociétal, pourquoi le monde moderne serait-il plus adapté qu'auparavant ?

On peut citer tout d'abord la grande mobilité possible. On a de plus en plus affaire à des tueurs mobiles alors que précédemment, les tueurs avaient tendance à tuer près de chez eux ou chez eux.

Lorsque la mobilité est plus grande, les séries de meurtres sont beaucoup plus longues dans le temps. On pense par exemple à Michel Fourniret qui a tué sur plus de 20 ans dans de nombreuses régions.

Les profils de tueurs en série et leur psychologie sont étudiés à partir de tueurs qui ont été identifiés et arrêtés. Si on prend l'exemple de tueurs comme le BTK ou Jeffrey Dahmer, ils ont pourtant été arrêtés par "accident" ou par une astuce. Cette logique ne rend-elle pas toute la doctrine du FBI inadaptée par essence ?

Je pense que le travail du FBI est maintenant presque un travail de fonctionnaire. L'accent n'est plus donné aux enquêtes sur les serial-killers ou à des cold case. A Quantico par exemple, on forme les profilers pour des affaires de terrorisme et non des affaires de meurtres. 

L'autre problème, c'est que la base de donnée -Vicap- avec lesquelles travaillent les forces de polices américaines est loin d'être complète puisqu'elle n'est pas utilisée par toutes les forces locales et n'est pas nourrie non plus par suffisamment de cold case. Ces analyses concernent également principalement les crimes dont les victimes sont des femmes, 30% des cas -les crimes dont les victimes sont des hommes- sont ignorés.

Dans le cas où cette hypothèse serait avérée, les pays européens seraient-ils eux aussi concernés par les tueurs en série non-identifiés ?

Pour la France, depuis 1999, j'ai identifié, 158 cas différents de serial killer ou tueuse en série. Certains ont été arrêtés, d'autres identifiés, tandis que pour d'autres la série de meurtres a été identifiée (les liens entre les différents meurtres ont été établis). 

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