Partis faire le djihad aux frais de la République : ces Français de l’Etat islamique qui continuent de toucher des alloc’s<!-- --> | Atlantico.fr
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Certains djihadistes français toucheraient encore des allocations familiales
Certains djihadistes français toucheraient encore des allocations familiales
©Caputre d'écran / l'Express

Tout frais payé

Les députés Alain Marsaud et Thierry Mariani s'apprêtent à déposer une résolution à l'Assemblée sur la question des prestations sociales que continueraient de toucher certains Français partis faire le djihad. Alain Marsaud fait même état d'une personne qui percevrait encore 2 200 euros par mois.

Alain Marsaud

Alain Marsaud

Alain Marsaud est député de la 10e circonscription des Français de l'étranger. Ancien magistrat, il a aussi occupé le poste de chef du Service central de lutte antiterroriste au Parquet de Paris.

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Atlantico : Alain Marsaud, vous vous apprêtez à déposer avec Thierry Mariani, une résolution à l'Assemblée sur la question des prestations sociales qui continueraient d'être versées à des Français partis faire le djihad en série. Quel est l'objectif d'une telle résolution ? 

Alain Marsaud :  Ce qui a attiré notre attention c'est l'affaire Merah ou plutôt l'affaire de la famille Merah. On s'était en effet aperçu que la belle-sœur était partie en Turquie en passant par Barcelone pour aller faire le djihad. Et nous avions de bonnes raisons de penser qu'elle continuait à toucher différentes prestations sociales. J'avais d'ailleurs interrogé le ministre de l'Intérieur lors des questions au gouvernement au mois de juin. Ce dernier a estimé qu'il s'agissait de stigmatisation. J'ai trouvé cela gros et j'ai écrit au directeur de la CAF de Toulouse avec lequel j'ai échangé et qui a confirmé les faits. 

Entre-temps, on s'est rendu compte que ce phénomène a atteint des familles entières qui sont parties dans le but de faire le djihad. Je cite d'ailleurs dans la proposition de résolution pour la création de cette commission d'enquête le cas de trois familles, une venue d'Orléans, une de Lyon et autre de Nice. Désormais, il s'agit d'un phénomène familial alors qu'il s'agissait auparavant plutôt d'un phénomène de nature individuelle. Il est donc d'autant plus urgent de surveiller le versement des allocations. Jusqu'ici les prestations continuent à être versées et une procuration est remis à un tiers pour récupérer cette allocation en numéraire et cet argent est ensuite expédié dans le pays d'accueil, pas forcément en Syrie mais en Turquie. Et le destinataire récupère des prestations familiales. Comme cela commence à faire beaucoup et que personne ne bouge, j'ai jugé utile de prendre avec Thierry Mariani cette initiative. Afin de vérifier d'une part que ces abus soient bien réel d'une part et deuxièmement d'imaginer les moyens d'y remédier. 

Un bénéficiaire ayant quitté le territoire français depuis plus de 4 mois, cesse en théorie de percevoir ses allocations. Comment se fait-il que les Caisse d'allocations familiales ne puissent pas établir qu'une personne ait quitté le territoire depuis plus de 4 mois ? 

Les directeurs de CAF connaissent des difficultés à établir le départ des bénéficiaires hors du territoire français de plus de quatre mois, délais au-delà duquel les allocations sont normalement suspendues. Leur seul moyen de vérifier si un bénéficiare n'a pas quitté le territoire est d'aller frapper à sa porte. Mais si son nom est encore présent sur la boite aux lettres, on considèrera  que la personne est encore présente sur le territoire. 

Quel est l'ampleur du phénomène ?  De quel type d'allocations est-il question ? Et a combien estime-t-on le montant de ces allocations ? 

Je ne sais pas mais j'ai connu des cas ponctuels, de familles. A en croire les directeurs de caisse, il y aurait des cas ici et là mais on ne peut pas avancer de chiffres précis car les Caf ne se sont pas penchées sur le sujet. Les caisses les plus réactives sont celles du Sud-Ouest car elles ont été alertées par l'affaire Merah. Les Caf sont généralement assez autonomes, elles dépendent du ministre des Affaires sociales mais ne connaissent pas de tutelles administratives. Aussi, si les directeurs ne sont pas curieux, les abus ne sont jamais mis au grand jour. Je pense que 80% des directeurs de Caf qui n'ont même jamais imaginé faire des enquêtes de cette nature. 

Mais toutes les prestations versées par la Caf sont concernées, aussi bien le RSA que les allocations familiales, l'allocation de parent isolé, pu encore les APL. 

Comment être sûr que les fraudes dont vous parlez sont effectivement le fait d'aspirants au djihad ?

Lorsque les directeurs de Caf sont curieux, ce qui est rarement le cas, ils se rapprochent de la DGSCI. Un agent de la DGSCI les renseigne alors sur les soupçons de départs éventuels. Eux-même, s'ils ne se rapprochent pas des services de police ou des services de renseignement n'ont aucune chance de le savoir. C'est la raison pour laquelle nous demandons qu'il soit possible de croiser des fichiers des caisses d'allocations avec ceux des services de sécurité. Cette proposition avait été faite sous l'ancienne majorité et cette proposition était rentrée dans sa coquille après l'intervention extrêmement vive de Delphine Bato qui était à l'époque vice-présidente du groupe PS à l'Assemblée sur les questions de sécurité.  

De quels moyens supplémentaires disposeront les parlementaires ? 

Je crois qu'il faudrait entendre les responsables des caisses concernées afin qu'ils nous expliquent quels seraient les moyens humains et techniques nécessaires. Aussi, s'il est impossible de joindre la personne pendant quatre mois, il faudrait qu'il y ait automatiquement une suspension des prestations. 

Ne risque-t-on pas de se disperser ? Ne vaudrait-il pas mieux concentrer les moyens et l'énergie afin de stopper les aspirants au jihad ? 

C'est exactement le texte de la loi que nous a fait voter le ministre de l'Intérieur. J'étais le seul parlementaire à avoir voté contre cette loi. Parce que je connaissais l'impossibilité d'empêcher les gens de partir. On ne peut pas empêcher les gens de partir. Je n'y crois pas. La famille niçoise, personne ne pensait qu'elle pouvait partir. Pourtant, elle a pris sa voiture, traversée la voiture italienne et elle est partie. Les Lyonnais sont partis par la Suisse. Alors qu'il y a deux ans, cela concernait 50 personnes, nous sommes aujourd'hui dans un phénomène de nombre. 

Bien sûr que dans un système idéal, il faudrait les empêcher de partir. Mais je n'y crois pas. Et à ceux qui me dise qu'il s'agit de cas isolés, je réponds que même s'il n'y avait qu'un seul cas de djihadiste percevant ses allocations, ce serait scandaleux, une honte. Car c'est avec nos impôts que ces allocations sont payées !  

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